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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Marc BRIÈRE, Point de départ ! Essai sur la nation québécoise. (2000)
Préface


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Marc BRIÈRE, Point de départ ! Essai sur la nation québécoise. Montréal: Les Éditions Hurtubise HMT ltée, 2000, 222 pp. Une édition numérique réalisée par Gemma Paquet, bénévole, professeure de soins infirmiers retraitée du Cégep de Chicoutimi. [Autorisation accordée par M. Marc Brière, le 18 octobre 2006 de diffuser ce livre dans Les Classiques des sciences sociales.]

[11]

Point de départ !
Essai sur la nation québécoise

Préface

De Julien Bauer

Politiquement correct, s'abstenir. Ce livre s'attaque à des sujets tabous qui feront enrager les lecteurs. Aux uns, il répète inlassablement que le Québec a le droit de choisir son avenir, y compris l'indépendance, aux autres, qu'une majorité simple, 50 % plus un, n'a pas grand sens et que la partition du Québec est envisageable.

Marc Brière est un cas. Le discours constitutionnel au Québec relève de deux tendances : la conversion et la répétition. La conversion voit des ténors d'un camp devenir les champions de l'autre. Que l'on pense à Guy Bertrand ou à Lucien Bouchard. La répétition est le ronron qui, à force de dire la même chose, devient parole d'Évangile. Que l'on pense à Jean Chrétien et à Jacques Parizeau. L'auteur du livre est un nationaliste québécois suffisamment non politiquement correct pour reconnaître que la réalité est plus complexe qu'un programme électoral, que les sociétés, et le Québec n'est pas une exception, sont divisées, que ceux qui ne pensent pas comme lui peuvent apporter quelque chose au débat. Cela change agréablement du ton mi-hargneux, mi-prêchi-prêcha qui prédomine. Brière a le mérite de ne pas faire dans le « crois ou meurs » et le courage (ou l'inconscience ?) d'écrire sur des sujets qui tapent sur les nerfs d'un nombre important, pour reprendre sa terminologie, de Canadiens, de Québécois, de Canadien- Québécois, de Québécois-Canadiens sans parler de tous les autres. Son livre est une cure de jouvence. [12] Imaginez un instant que vous avez vécu un an ou deux en dehors du Québec, en dehors du Canada, sans aucun contact avec le pays et que vous y rentriez. Vous aurez l'impression que le temps s'est arrêté : les mêmes acteurs jouant la même pièce avec les mêmes arguments. Où ailleurs qu'ici, peut-on s'intéresser depuis aussi longtemps au problème constitutionnel ?

Sans doute influencé par des années au Tribunal du travail, Marc Brière fait partie de ces oiseaux rares au Québec qui font attention au sens des mots et n'utilisent pas des concepts pour leur faire dire le contraire de ce qu'ils signifient. Dans sa Constitution, l'article 7 nous affirme que « la République est laïque ». Le terme laïcité est souvent utilisé ici pour désigner l'anticléricalisme et, encore plus, pour refuser le droit à la différence aux autres. La société, même laïque, étant imbibée de catholicisme, la laïcité devient un cheval de bataille pour interdire aux autres religions tout droit dans le système public. Pour Brière, la laïcité officielle du Québec veut simplement dire que l'État ne favorise pas une religion au détriment des autres mais que, tout en étant « neutre entre les religions »(expression de Renan), il les respecte et est même prêt à les accommoder.

Dans cette vision, l'État laisse les religions donner des cours dans les écoles à ses frais - ce qui est aller au-delà de la laïcité -, autorise les Églises à donner à leurs frais tout enseignement supplémentaire et rend obligatoire l'enseignement du civisme. Cette laïcité, peu banale, est sans doute une des propositions les plus ouvertes du texte, proposition dans laquelle le maximum de Québécois, toutes origines et tendances confondues, peuvent se sentir à l'aise.

Que dire du cœur de cet essai, le Projet de constitution de la République québécoise ? De prime abord, l'idée d'une république dans un système monarchique est surprenant, mais n'avons-nous pas déjà un parti progressiste-conservateur, un multiculturalisme bilingue à moins que ce ne soit un bilinguisme multiculturel sans oublier un Conseil privé qui est public.

L'article premier sur le peuple québécois ne manquera pas de faire lever plus d'un sourcil. Que ce peuple, qui, nous dit-on ailleurs, n'existe pas (p. 66), soit composé de quatre peuples cela est possible, mais pourquoi limiter la notion de peuple à ces quatre groupes. Si l'on peut distinguer un peuple québécois de langue française et de [13] culture québécoise, de son frère jumeau, le peuple canadien de langue française et de culture québécoise, pourquoi limiter les Anglais au seul peuple québécois de langue anglaise et de culture québécoise et les peuples autochtones aux seuls peuples autochtones québécois. Anglais et autochtones n'ont-ils pas droit, eux aussi, à leurs jumeaux canadiens ?

Certaines propositions sont originales et justifient qu'on y réfléchisse et, éventuellement, qu'on les adopte : système électoral panaché (art. 13), résurrection du Conseil législatif pour jouer le rôle de Sénat (art. 14), garanties linguistiques pour les anglophones (art. 18). D'autres sont plus surprenantes. L'article 11 sur la représentation québécoise à la Chambre de Communes semble reléguer aux oubliettes la clause du grand père qui garantit aux provinces qu'elles garderont le nombre de sièges qu'elles avaient en 1985, soit 75 dans le cas du Québec, clause d'autant plus importante que, depuis 1995, le poids démographique du Québec à l'intérieur du Canada est passé en dessous de 25%.

Et pourtant, elle tourne, a dit Copernic. Et pourtant, le Québec existe. Qu'à soit une province canadienne, un État indépendant, une société distincte ou toute autre formule, la réalité incontournable est que le Québec existe. Que l'on soit d'accord ou non avec les propositions de Marc Brière, elles nous obligent à nous poser des questions. Y donner des réponses claires et permanentes est sans doute impossible et aurait une conséquence dramatique, la disparition de notre sport national, le débat constitutionnel.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le samedi 1 juin 2013 15:01
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie retraité du Cégep de Chicoutimi.
 



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