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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Jacques Brazeau, “ Les nouvelles classes moyennes ” (1966)
Définition des classes moyennes


Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Jacques Brazeau, “ Les nouvelles classes moyennes ”. Un article publié dans la revue Recherches sociographiques, vol. 7, n° 1-2, janvier-août 1966, pp. 151-170. Québec: Les Presses de l’Université Laval. [Avec l’autorisation formelle accordée le 8 janvier 2004 par la directrice de la revue Recherches sociographiques, Mme Andrée Fortin, professeure de sociologie à l’Université Laval, qui nous a demandé de bien mentionner nos sources ainsi que la revue qu’elle dirige.

Définition des classes moyennes

Au deuxième jour d'un colloque ou l'on traite du pouvoir dans notre société, les notions de strate et de classe n'ont besoin d'être ni défendues ni longuement explicitées. Il est pertinent cependant de dire ce que nous entendons par classes moyennes et d'indiquer comment elles se situent par rapport aux élites dont M. Jean-Charles Falardeau a déjà traité et par rapport aux classes laborieuses.

De par la naissance, la fortune, le talent ou l'autorité, les membres des élites sont en mesure de jouer un rôle social qui dépasse leur milieu immédiat et leur secteur professionnel. Ils sont des définisseurs de situations et ce fait est plus important que les privilèges personnels dont jouissent leurs familles comme consommateurs en raison de leurs revenus. Étudier les élites d'après leur pouvoir et leur rôle social, c'est aussi nous disposer à percevoir les classes moyennes de façon dynamique en nous demandant comment elles participent au pouvoir.

Les classes moyennes de notre société sont composées des familles dont les chefs occupent les postes de cadres dans les institutions. Ces personnes ont des responsabilités intermédiaires entre les détenteurs du pouvoir et les exécutants du travail de routine dans notre société urbaine et industrielle. C'est par leur fonction d'intermédiaires que les membres des classes moyennes se définissent le mieux, dans une société stable comme dans une société mouvante. Dans une société du premier type, les classes moyennes acceptent les définitions existantes du rôle des organismes dans lesquels elles œuvrent et elles contribuent a maintenir l'ordre établi. Dans une société en évolution, ce sont elles qui ont élaboré les solutions de rechange qu'offrent les définisseurs de situations et elles représentent une force éventuelle si elles choisissent de constituer un groupement du type qu'Émile Pin appelle «tendanciel». (1)

Une distinction aussi générale entre l'élite et la classe Moyenne doit être justifiée avant d'être précisée davantage. John Porter nous rappelle que dans la société nord-américaine, il est difficile de discerner les divisions entre classes si nous nous en tenons à la consommation des biens matériels. (2) Le relèvement du niveau de vie en société post-industrielle, l'expansion du crédit et l'ingéniosité de la réclame créent des inversions inextricables. Le revenu du chef de famille, compte tenu de la grandeur variable des familles et du nombre indéterminé des salaries dans chaque famille, devient un pauvre indice de la classe dans une société dont l'idéologie nie le bien-fondé de la stratification. La combinaison du revenu et de la scolarisation, en vue d'établir une division de la société en strates pour fins de recherche, donne une image statique dont les barres horizontales semblent des crans d'arrêt arbitraires. Finalement, les mensurations objectives du statut selon des indices communs pour des ensembles sociaux hétérogènes présentent bien des difficultés.

Un lien indéniable a été établi en Amérique du Nord entre l'origine ethnique et la division du travail. Ceci a amené des auteurs américains à se demander si l'on peut attribuer un statut social d'après la même échelle aux familles de race blanche et de race noire. Plus près de nous, le concept de «classe ethnique» a vu le jour mais sans que sa naissance soit l'occasion d'unanimes réjouissances. (3) La question posée ici est la suivante: doit-on concevoir l'utilisation d'une théorie de la stratification et un instrument pour en établir les coordonnés, qui fassent abstraction des sociétés régionales, des sociétés ethniques, de leur vie propre aussi bien que de leur imbrication dans des ensembles coopératifs et concurrentiels plus grands? Il ne semble pas et ceci, comme la stérilité de l'usage d'indices trop contraignants, invite à la recherche de définitions fonctionnelles des classes. Ces premières définitions, il va sans dire, doivent être raffinées à l'usage.


Notes :

(1) Émile PIN, Lee classes sociales, Paris, Spes, 1962. L'auteur note que l'action commune des membres de la classe moyenne n'est pas fréquente, d'où l'utilisation au pluriel du concept de «classes moyennes» (p. 242). Les membres d'une classe peuvent cependant se grouper en associations et en sociétés en vue d'une action qui sera commune à certaines catégories ou à l'ensemble des membres. C'est alors que la classe forme un ou des groupements «tendanciels» (p. 246).

(2) John PORTER, The Vertical Mosaic, Toronto, University of Toronto Press, 1965, pp. 125-132.

(3) Marcel Rioux et Jacques DOFNY, «Les classes sociales au Canada français», Revue française de Sociologie, III, 3, 1962, pp. 290-300.


Retour au texte de l'auteur: Jacques Brazeau, sociologue, retraité de l'Université de Montréal Dernière mise à jour de cette page le Vendredi 19 novembre 2004 06:56
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue.
 



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