RECHERCHE SUR LE SITE

Références
bibliographiques
avec le catalogue


En plein texte
avec Google

Recherche avancée
 

Tous les ouvrages
numérisés de cette
bibliothèque sont
disponibles en trois
formats de fichiers :
Word (.doc),
PDF et RTF

Pour une liste
complète des auteurs
de la bibliothèque,
en fichier Excel,
cliquer ici.
 

Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Classes sociales et question nationale au Québec, 1760-1840. (1970)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir du livre Gilles Bourque (1970), Classes sociales et question nationale au Québec, 1760-1840. (1970). Montréal: Les Éditions Parti-Pris, 1970, 352 pp. Collection Aspects, no 7. (Autorisation formelle de l'auteur accordée par le professeur Bourque le 12 décembre 2002)

Introduction

L'histoire du Québec présente un intérêt particulier dans l'histoire des sociétés capitalistes et, avec elles, des États nationaux et du colonialisme moderne. C'est, ironiquement, l'histoire du colonisateur-colonisé.

On peut relever deux modes principaux de colonisation. Citons d'abord la colonisation d'un territoire vierge où une collectivité s'installe et crée une civilisation. C'est le cas des Amérindiens qui sont venus peupler l'Amérique du Nord, particulièrement les régions du futur Canada, avant et après Jésus-Christ. Le second mode, plus récent dans l'histoire, consiste en la colonisation d'un territoire habité. Il existe alors deux possibilités. Il y a possibilité qu'une société colonisatrice s'établisse définitivement dans une colonie, qu'elle se sépare de sa métropole et mette en tutelle la société des premiers habitants. Elle développe alors à son profit les ressources du pays et devient une nation. C'est le cas de la colonisation européenne de l'Amérique au dix-septième et dix-huitième siècles. Dans le second cas, après une période plus ou moins longue de vassalisation, la société colonisée repousse l'envahisseur. C'est le fait du colonialisme du vingtième siècle et du mouvement de décolonisation.

9
Vu sous cet angle, le Québec prend un éclairage particulier. Il est placé, comme nous l'avons souligné, dans l'ironique situation d'un colonisateur qui, par une espèce de retour des choses, doit, à son tour, subir la colonisation. En 1750, la Nouvelle-France se présente sous l'aspect d'une société coloniale en voie de développer un territoire, en désorganisant la population autochtone : les Amérindiens. Cette société est à se donner des structures qui, à plus ou moins long terme, la rendront indépendante de la métropole et lui permettront de développer le pays à son entier profit. Mais ce peuple en voie de structuration est, lui aussi, conquis et doit accepter la venue d'un nouveau colonisateur : le colon anglais. Il est alors coupé de sa métropole et doit poursuivre seul son développement en face de la société anglo-saxonne qui, elle, peut s'appuyer sur l'Angleterre.

L'histoire du Québec est donc le lieu d'un phénomène de colonisation simple (celui de la France et celui de l'Angleterre) et d'un phénomène de colonialisme par nation superposée au sein d'un même État. À ce dernier titre, elle présente des analogies avec les phénomènes qui ont présidé à la création de quelques États nationaux européens. On a assisté en effet, dans certains pays, à la vassalisation de nations faibles par des sociétés fortes qui ont créé l'état national à leur profit.

L'histoire de cette province offre un intérêt supplémentaire. Elle permet l'analyse scientifique des répercussions du colonialisme sur une société colonisée ayant, au point de départ, atteint un degré de développement semblable à celui du peuple qui la dominera.

Cette histoire s'avère donc, sous certains aspects, un champ d'analyse privilégié. Il est possible d'y étudier les rapports existant entre la question nationale et la détermination des classes sociales.

Dans un cas de nationalisme superposé, un caractère d'opposition nationale. existe-t-il qui transcende ou qui vient s'ajouter 'aux antagonismes de classes ? L'historiographie québécoise est, on le sait, divisée sur cette question. Les historiens nationalistes, depuis Durham et Garneau, s'attachent à faire ressortir les oppositions nationales en négligeant les oppositions de classes. D'autres historiens, plus sensibilisés aux problèmes socio-économiques qu'au facteur politique, s'intéressent davantage aux problèmes posés par les antagonismes de classes, niant ou négligeant les oppositions nationales. Nous essaierons de déceler le rapport qui existe entre la question nationale et celle des classes sociales : Il s'agit de déterminer le caractère et la place qu'il faut lui accorder dans l'ensemble structural de la situation québécoise.

Vu sous cet angle, le Québec prend un éclairage particulier. Il est placé, comme nous l'avons souligné, dans l'ironique situation d'un colonisateur qui, par une espèce de retour des choses, doit, à son tour, subir la colonisation. En 1750, la Nouvelle-France se présente sous l'aspect d'une société coloniale en voie de développer un territoire, en désorganisant la population autochtone : les Amérindiens. Cette société est à se donner des structures qui, à plus ou moins long terme, la rendront indépendante de la métropole et lui permettront de développer le pays à son entier profit. Mais ce peuple en voie de structuration est, lui aussi, conquis et doit accepter la venue d'un nouveau colonisateur : le colon anglais. Il est alors coupé de sa métropole et doit poursuivre seul son développement en face de la société anglo-saxonne qui, elle, peut s'appuyer sur l'Angleterre.

L'histoire du Québec est donc le lieu d'un phénomène de colonisation simple (celui de la France et celui de l'Angleterre) et d'un phénomène de colonialisme par nation superposée au sein d'un même État. À ce dernier titre, elle présente des analogies avec les phénomènes qui ont présidé à la création de quelques États nationaux européens. On a assisté en effet, dans certains pays, à la vassalisation de nations faibles par des sociétés fortes qui ont créé l'état national à leur profit.

L'histoire de cette province offre un intérêt supplémentaire. Elle permet l'analyse scientifique des répercussions du colonialisme sur une société colonisée ayant, au point de départ, atteint un degré de développement semblable à celui du peuple qui la dominera.

Cette histoire s'avère donc, sous certains aspects, un champ d'analyse privilégié. Il est possible d'y étudier les rapports existant entre la question nationale et la détermination des classes sociales. Dans un cas de nationalisme superposé, un caractère d'opposition nationale existe-t-il qui transcende ou qui vient s'ajouter aux antagonismes de classes ? L'historiographie québécoise est, on le sait, divisée sur cette question. Les historiens nationalistes, depuis Durham et Garneau, s'attachent à faire ressortir les oppositions nationales en négligeant les oppositions de classes. D'autres historiens, plus sensibilisés aux problèmes socio-économiques qu'au facteur politique, s'intéressent davantage aux problèmes posés par les antagonismes de classes, niant ou négligeant les oppositions nationales. Nous essaierons de déceler le rapport qui existe entre la question nationale et celle des classes sociales. Il s'agit de déterminer le caractère et la place qu'il faut lui accorder dans l'ensemble structural de la situation québécoise.


Retour au texte de l'auteur: Gilles Bourque Dernière mise à jour de cette page le Mardi 14 janvier 2003 16:10
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue.
 



Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
La vie des Classiques des sciences sociales
dans Facebook.
Membre Crossref