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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Syndrome québécois et mal canadien (1981)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir du livre de M. Gérard Bergeron (1922-2002)Syndrome québécois et mal canadien. Québec: Les Presses de l'Université Laval, 1981, 297 pp. [Autorisation formelle accordée, le 12 avril 2005, par Mme Suzane Patry-Bergeron, épouse de feu M. Gérard Bergeron, propriétaire des droits d'auteur des ouvres de M. Gérard Bergeron]

Introduction

À M. Paul-M. Lemaire de Hull, qui m’avait écrit, via Le Devoir du 30 novembre 1979, pour me reprocher le langage de « la froide et minutieuse analyse », J’avais répondu dans le même journal du 7 décembre 1979 par l’article suivant, intitulé « Le cri du cœur qui a ses raisons ». Il me semble opportunément introduire à ce recueil de textes et à la conclusion inédite qui suit. 

VOTRE RÉCENTE LETTRE au Devoir est toute vibrante d’une déception que vous semblez libérer. Bien que consentant à accorder quelque utilité à ce que je fais, vous souhaiteriez que je dépasse « la froide et minutieuse analyse » pour appuyer carrément le programme indépendantiste du Parti québécois. Observons d’abord, pour n’y plus revenir, qu’un autre correspondant, tout autant désappointé, aurait pu déplorer aussi que je ne m’emploie pas à soutenir le programme fédéraliste du Parti libéral du Québec. 

Cette règle stricte, que je m’impose d’être en dehors de la mêlée pour mieux l’analyser, je ne la prescris pas aux autres. Je ne me l’impose même pas à moi-même dans ma vie de « citoyen bien ordinaire ». Comme tout un chacun j'approuve parfois, je m'indigne souvent et aurais plutôt tendance à rouspéter tout le temps ; surtout je vote toujours, et hélas! avec la trop fréquente conscience du « moindre mal ». 

Mais quand je fais acte public d’écrire, dans le prolongement d’un métier de recherche et d’enseignement, je me tiens en bride. Je souhaite, que cet acte ne serve pas que d’exutoire à mes préférences et mes valeurs, à mes préjugés et mes humeurs. Ce type de témoignage n’a toujours qu’un intérêt très circonscrit : celui de l’expression d’un homme parmi six millions d’autres qui, l’espace d’un moment, fait acte de présence sur l’une des lignes ouvertes de la foire permanente aux opinions. Je n’estime pas que ma propre opinion soit d’intérêt public. 

Mais peut-être que ce que vous définissez comme le rôle de « questionneur soumettant impitoyablement au crible toutes les mesures politiques » a quelque utilité sociale. Ne serait-ce que par la rareté : il n’y a vraiment pas foule pour postuler ce rôle. Par ailleurs, il ne manque pas de gens pour faire la politique des partis : pléthore de candidats, cohortes de militants, masses d’adhérents. La pénurie est ailleurs. Il en faut des « questionneurs » et ils ne seront jamais si nombreux pour enrayer les mouvements qui se déclenchent et se développent sans eux. Tout au plus peuvent-ils parfois servir à pointer la direction des mouvements, à localiser les contre-mouvements, à discerner les obstacles, à évaluer les masses d’inertie. C’est parce qu’ils sont en dehors de la politique que ces « questionneurs » la voient peut-être moins mal que ceux qui la font - même correctement. 

Je tiens l’activité politique comme la plus haute de l’homme en situation de société. Ce n’est pas par hasard que j’y consacre toute une vie d’étude. Quand je « cause » avec le prochain de quelques résultats de cette réflexion ce n’est pas pour « châtrer le discours Politique » de ceux qui sont aux différents pouvoirs s’exerçant ou à exercer. Ce sont deux discours tout différents. Le mien est au second degré puisqu’il porte sur leur propre discours. Je les interpelle pour que le discours qu’ils nous adressent ait un « sens » plein et clair pour mériter le « bon sens » de nos adhésions, tant recherchées par eux. 

Vous avez merveilleusement écrit : « Les renouveaux historiques n’adviennent jamais dans un peuple sans un fertile déclenchement de l’utopie, sans une active anticipation de l’avenir, sans une fervente mobilisation de la passion. » C’est ce que j’enseigne dans mes cours d’histoire internationale. Seulement, cette histoire-là est déjà faite, parfois bien, parfois mal. Mon inquiétude est que la nôtre doive bien se faire et qu’on s’y emploie à temps, c’est-à-dire avant de risquer des embardées dont la simple récupération engagerait le gros des énergies de la génération d’après. 

Pour vous le dire encore en une formule plus enveloppante, où votre propre inquiétude rejoindrait peut-être mon anxiété : pour moi la grande question n’est pas que l’indépendance du Québec ait lieu ou pas, mais qu’elle ne rate pas si elle doit se produire. Ainsi, dans mon rôle de « questionneur », je ne suis peut-être pas si isolé qu’il semble - puisque je me retrouverais avec, au moins, la moitié des Québécois à vivre inconfortablement avec cette question circulaire, assez lancinante et combien fondée dans les faits (aussi bien pour les menaces d’échec que pour les belles promesses). 

Et même je me sens très près de vous lorsque je vous lis, réclamant à la fin « un langage politique où les accents de la raison, du cœur, de l’imagination et de la passion se conjuguent dans la sérénité et l’enthousiasme ». C’est « la raison » qui vient en tête de votre énuméré : avant le cœur, l’imagination, la passion, la sérénité et l’enthousiasme.


Retour au texte de l'auteur: Gérard Bergeron, politologue, Université Laval Dernière mise à jour de cette page le dimanche 6 mai 2007 14:14
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur au Cégep de Chicoutimi.
 



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