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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir du texte de M. Jean Benoist, “Saint-Barthélemy: racines et destin d'une population”. Un article publié dans l’ouvrage sous la direction de Singaravelou, Pauvreté et développement dans les pays tropicaux, pp. 305-317. Bordeaux: CEGET (Centre d’Études de Géographie Tropicale-CNRS), Université de Bordeaux III, 1989, 588 pp. [Autorisation formelle accordée par l'auteur, le 17 juillet 2007 de diffuser, dans Les Classiques des sciences sociales, toutes ses publications.]

 Jean Benoist

Professeur à l'Université d’Aix Marseille III 

Saint-Barthélemy: racines et destin d'une population”. 

Un article publié dans l’ouvrage sous la direction de Singaravelou, Pauvreté et développement dans les pays tropicaux., pp. 305-317. Bordeaux : CEGET (Centre d’Études de Géographie Tropicale-CNRS), Université de Bordeaux III, 1989, 588 pp.

 

Introduction 
I. —  Identité et endogamie
II. — Structures présentes, structures passées
III. — Racines 
BIBLIOGRAPHIE 
Résumé / Summary

 

Introduction

 

Depuis une dizaine d'années, la petite île de Saint-Barthélemy est devenue l'un des hauts lieux du tourisme international. Aux nombreux passagers des paquebots de croisière qui n'y font qu'une brève escale, s'ajoutent les clients de ces hôtels qui ont commencé à se multiplier dans l'île au cours des années 70, et les propriétaires, souvent américains, des villas et pavillons qui s'éparpillent sur les sommets et le long des côtes. Des boutiques s'ouvrent à Gustavia, la minuscule « capitale », et ceux qui les tiennent viennent souvent de la Guadeloupe ou de la France métropolitaine. Est-ce à dire que nous assistons, en quelques années, à l'absorption irrévocable d'une petite population dans le brassage général dont notre temps semble s'être fait une règle ? 

Saint-Barthélemy donnait en effet, encore récemment, une tout autre image. Longtemps tenue à l'écart des préoccupations des administrateurs comme des chercheurs, elle semblait vivre dans une véritable intemporalité. Guy Lasserre ne notait-il pas, dans le chapitre sur Saint-Barthélemy de sa célèbre thèse parue en 1961, des remarques qui resteraient valables pendant encore une dizaine d'années, et dont on se doit de citer ici quelques brefs extraits ? « Certaines descriptions du Père Labat restent d'actualité et l'on se surprend à penser, en parcourant certains quartiers de l'île, à la vie des matelots et des engagés de l'époque pionnière (p. 846) »... « La vie à Saint-Bart est d'un calme extraordinaire. Messes, processions, mariages et enterrements donnent aux gens l'occasion de se réunir... Les distractions sont rares: ni cinéma, ni bibliothèque, ni terrain de sport (p. 870) »... « Les cases sont généralement petites et sommaires, mais elles plaisent par leur extrême propreté. Carrées ou rectangulaires, construites en bois, elles abritent deux ou trois —exceptionnellement quatre— petites pièces de deux ou trois mètres de côté (p. 874) ». Mais ce tableau n'est pas idyllique pour autant, car il traduit « I'équilibre précaire des campagnes, où plus des deux-tiers des habitants vivent dans la gène, et un assez grand nombre, sans doute, presque dans la misère (p. 878) ». Cependant l'île avait connu auparavant une agitation sociale et économique bien autrement intense que celle qui la saisit de nos jours. Sa cession à la Suède en 1784 avait été suivie de l'afflux de navires de commerce dans le port du Carénage, nommé désormais Gustavia, et par l'installation de nombreux commerçants. Pendant plus de vingt ans, I'île fut au centre d'une vie économique active, plaque tournante d'un commerce international qui y introduisit une population cosmopolite de plusieurs milliers d'individus. Mais, quand cette activité régressa à compter de 1830, cette population s'effrita, et à la fin de la présence suédoise en 1878, elle avait pratiquement disparu. Guy Lasserre note justement que « I'épisode suédois n'a pas eu de grandes répercussions sur le peuplement rural de l'île (p. 861) ». 

L'histoire seule dira s'il en ira tout autrement de l'épisode actuel, ou si, comme voilà un siècle et demi, la population de Saint-Barthélemy côtoiera sans en être autrement transformée la masse des visiteurs plus ou moins temporaires qui affluent de nos jours sur son île.

 

I — IDENTITÉ ET ENDOGAMIE

 

Or ceci n'est pas sans importance à de multiples niveaux. On verra plus loin combien la forte identité « Saint-Barth » s'est accompagnée d'un enfermement qui a fait de cette population l'une des plus endogames qui se puissent observer. Cette endogamie a ses sources dans une histoire sociale profondément ancrée à un territoire insulaire exigu, mais aussi très marquée par les contrastes ethniques, culturels et biologiques avec les populations des îles voisines. Elle a également des conséquences, souvent mal perçues sur place: l'importance de la consanguinité a eu, par malheur, pour effet d'emprisonner comme dans une nasse certains facteurs génétiques pathogènes et de permettre leur large diffusion dans la population. 

Aussi, la population de Saint-Barthélemy, si résistante aux apports extérieurs, si tenace dans son implantation sur un petit territoire, si influencée par les conditions qui ont régi sa pérennité, est-elle le siège de forces multiples. Les unes l'ont créée, d'autres l'ont structurée en l'arrimant à sa terre, d'autres enfin se sont inscrites dans sa réalité démographique en y canalisant des traits biologiques, dont certains recèlent la possibilité d'une pathologie non négligeable. 

Cerner cet objet-population, connaître les limites qui l'enclosent, les structures qui l'organisent, les dynamiques internes qui le font évoluer et y insérer l'analyse des troubles éventuels qui le perturbent, tel a été alors l'objectif du programme assez ambitieux dont on trace ici les grandes lignes et les principaux résultats. 

Une première série de recherches a permis de mettre en évidence quelques particularités majeures de la population de Saint-Barthélemy (Benoist,1964 et 1966; Benoist et Lefèvre, 1972). 

Dans ce groupe humain qui n'a dépassé que très récemment le nombre de deux mille individus, il existe en effet des subdivisions extrêmement nettes qui viennent littéralement le morceler en sous-ensembles fortement liés à des secteurs géographiques de l'île. La coupure principale apparaît entre les deux moitiés, dites respectivement « Au Vent » et « Sous le Vent », qui sont depuis longtemps des paroisses distinctes. Entre les habitants de ces paroisses, on constate que les mariages sont très rares, et que les changements de résidence d'une paroisse à l'autre sont eux aussi exceptionnels. Mais, bien plus, chacune de ces paroisses est découpée en quartiers, clairement identifiés dans l'espace, et eux aussi très endogames, bien qu'à ce niveau les coupures soient moins intenses et varient en ampleur selon les quartiers. 

Il en va de la même façon si l'on considère cette fois la position de la population d'origine européenne de l'île face au reste du monde: coupure extrêmement marquée avec les quelques centaines de Noirs de Saint-Barthélemy, coupure non moins intense avec le monde extérieur. Hormis de rares exceptions, dont le nombre s'accroît un peu depuis quelques années, les unions hors du cercle local conduisent à l'émigration définitive du conjoint Saint-Bart et à sa sortie de fait de la population. 

Ces faits sociaux ne sont pas sans conséquences sur la vie biologique de cette population. En canalisant les mariages dans des directions privilégiées, en opposant un barrage efficace aux arrivants de l'extérieur et au métissage, en subdivisant l'île en petits groupes de quelques dizaines d'individus et en poussant de facto au mariage entre apparentés, ils entraînent des effets que les généticiens connaissent bien. D'abord c'est la transmission des caractères héréditaires d'une génération à l'autre qui connaît des fluctuations importantes, du fait de l'exiguïté des populations au sein desquelles ils se transmettent et donc des effets aléatoires que cela exerce sur leur échantillonnage (Benoist, 1964; Serre et coll. 1987). Ensuite, c'est la consanguinité qui connaît un niveau élevé. L'examen de la fréquence des mariages entre cousins germains et entre cousins issus de germains telle qu'il ressort de l'analyse des dispenses religieuses au mariage entre apparentés montre des faits intéressants. Dans toute population, le simple jeu du hasard laisse prévoir qu'en l'absence de toute pression sociale un certain nombre de mariages doit se faire entre parents. Un modèle probabiliste simple permet d'évaluer ce nombre en rapport avec les caractéristiques de la population. L'écart entre le nombre probable et le nombre observé est un indicateur important sur la dimension quantitative du fonctionnement du choix du conjoint dans une société donnée. Or l'observation des dispenses accordées à Saint-Barthélemy entre 1862 et 1961 nous indique 189 mariages entre cousins (germains et issus de germains) alors que leur probabilité atteignait à peine 40. Ces faits reflètent directement d'une part la subdivision des paroisses en quartiers endogames, d'autre part l'acceptation aisée d'un conjoint choisi au sein de la proche parenté. 

Nous atteignons ainsi à une première estimation de la consanguinité. Il s'agit de la consanguinité récente, telle qu'elle apparaîtrait dans une population qui aurait pu être formée, une génération en amont, d'individus non apparentés entre eux. Mais à cela s'ajoute une consanguinité éloignée, qui vient se cumuler avec la première. Elle reflète les nombreux mariages entre apparentés qui semblent avoir eu lieu à une époque plus ancienne, et, dans le cas de Saint-Barthélemy son poids peut être considérable. 

Là, d'autres méthodes s'imposent. Il s'agit de construire un tableau généalogique ascendant aussi complet que possible, tant par sa profondeur historique que par l'enregistrement d'un nombre maximum d'individus. Or l'existence dans l'île d'une pathologie héréditaire non négligeable, dont il s'agit d'interpréter la transmission et la diffusion vient donner à cette question une dimension lourde de signification pour la population. 

Une île donc, marquée par une forte population blanche à l'identité sociale très forte, identité qui transcende ses cloisonnements internes (Morril, 1977) mais qui l'oppose aussi bien à tout élément allogène qu'aux natifs de l'île qui ont des ancêtres de couleur. Et, au sein de cette population, des sous-groupes endogames, qui nous posent une série de questions relatives à l'histoire et à la dynamique interne du groupe. Quel est le support sociologique de cette structure ? Quelle en est la profondeur historique: s'agit-il d'un fait relativement récent ou d'une forme d'organisation qui s'est mise en place depuis longtemps ? Quelles en sont les conséquences sur les relations de la population de l'île avec l'extérieur, en particulier avec les groupes (dans l'île de Saint-Thomas surtout) qui se sont constitués dans l'émigration ? Quelle est l'ampleur de l'endogamie, et quelles conséquences a-t-elle, via la consanguinité, en particulier sur certaines manifestations pathologiques ? 

On ne peut répondre à ces questions qu'en passant de l'observation de la société contemporaine à celle de la société passée. Or Saint-Barthélemy permet cette sociologie rétrospective, grâce à des sources exceptionnellement riches, dont les formes modernes de traitement de l'information permettent de prendre en compte la masse impressionnante.

 

II— STRUCTURES PRÉSENTES,
STRUCTURES PASSÉES

 

Il avait été possible de constater l'isolement actuel de la population de l'île et sa subdivision en sous-ensembles, grâce au relevé, foyer par foyer, de l'origine des conjoints, confirmé par le dépouillement de quelques décennies des archives paroissiales. Répondre aux questions qui se posaient à partir de ce premier constat impliquait toutefois un dispositif beaucoup plus lourd, qui se déploya dans plusieurs directions. 

Il s'agissait essentiellement de remonter le plus haut possible vers le passé, mais cela ne pouvait se faire qu'en n'introduisant aucun biais d'échantillon. Une critique attentive des sources nous a convaincu que le dépouillement systématique des données d'état civil et, pour une période remontant dans une première étape jusqu'à 1820, des archives paroissiales, permettait d'édifier un tableau de la population. A partir de ces sources, on a pu reconstruire un fichier informatisé de la population. Le « corpus » démographique ainsi mis sur support informatique (à l'Université de Montréal, Canada) recèle alors la possibilité de reconstruire sur la période 1820-1970 la généalogie de tout individu identifiable dans la population actuelle. 

Sur cette base, il a été possible de répondre dans un premier temps à une question essentielle pour notre démarche: quelle est l'ancienneté du découpage de l'île en sous-ensembles endogames ? Cette question porte en elle une autre question, qui est de grande importance pour la pathologie héréditaire de l'île: quelle est au long de l'Histoire la nature et l'intensité des échanges génétiques entre les sous-populations de l'île, échanges que reflètent les mariages ? 

Or la pathologie qui affecte Saint-Barthélemy n'est pas négligeable (Bois et coll., 1987). L'examen audiométrique de la quasi-totalité de la population de l'île révèle la forte présence d'une surdité partielle qui touche surtout les adultes après s'être installée au cours de l'adolescence. Près de 30 (~lo des sujets examinés ont un audiogramme pathologique, l'atteinte portant surtout sur les fréquences aiguës. C'est donc à la fois pour une connaissance d'intérêt théorique des modes de structuration de cette société et pour une réponse aux questions des généticiens avec lesquels le travail était étroitement conjugué que l'analyse des généalogies a été faite. En effet si nombre de sujets fortement déficients avaient entre eux des liens étroits de parenté, il n'en allait pas de même pour d'autres, et la remontée généalogique avait pour ambition d'inférer l'identité de l'ancêtre commun à partir du recroisement des généalogies. 

Les détails de la démarche ont été exposés ailleurs (Mayer, Bonalti, Benoist, 1985) et nous n'en donnerons ici que les grandes lignes et les conclusions. Rappelons qu'il s'agissait de sonder la profondeur dans le temps des découpages actuels de l'île, de façon à saisir les mécanismes de diffusion de la maladie héréditaire dans sa population. Le point de départ a été choisi à partir de 32 individus, les plus gravement malades, tous nés à Saint-Barthélemy, originaires de 11 des 15 quartiers de l'île. Les étapes de l'analyse sont décrites dans l'article mentionné plus haut de la façon suivante: « I'étude se décompose en trois temps: 1. La reconstitution des 32 généalogies pour chacun des sujets atteints de surdité sévère, à partir de l'exploitation du registre d'état civil. 2. La recherche et l'identification à travers l'examen des 32 généalogies des ancêtres communs aux sujets étudiés. 3. L 'étude des échanges entre les généalogies au cours des générations successives de manière à pouvoir identifier une structure d 'échange que l 'on puisse comparer à la structure actuelle de la population (p. 165) ». 

Il en ressort quelques conclusions fort intéressantes. Il apparaît d'abord que les couples ancestraux se regroupent en deux « colonnes )> ascendantes, de telle sorte que ceux qui sont présents dans l'un de ces ensembles sont régulièrement absents de l'autre. Il s'agit donc de cercles endogames, qui remontent au moins jusqu'à l'origine des sources utilisées (1820) mais qui reflètent une plus grande profondeur historique, les mariages concernés remontant souvent au milieu du XVIIIe siècle. Ces cercles endogames correspondent aux deux moitiés encore actuellement endogames de l'île (Au Vent et Sous le Vent). De plus, les lignages ancestraux mis en évidence par cette recherche tressent souvent entre eux des liens d'échange de conjoints, répétés au long des générations. Ces échanges réciproques, qui intègrent les uns aux autres, de proche en proche, les lignages d'une des moitiés de l'île n'apparaissent pas entre ces moitiés. Entre elles n'existent, en nombre très restreint, que quelques relations, qui ne touchent d'ailleurs qu'un nombre très restreint, que quelques relations, qui ne touchent d'ailleurs qu'un nombre limité de généalogies. 

Cette reconstruction de l'archéologie d'une population permet aussi l'archéologie de trait pathologique qu'elle porte, et permet d'affirmer que la permanence de la structure sociale a pour corollaire l'ancienneté de la maladie. Puisque le cloisonnement est ancien et qu'aucun ancêtre commun à tous les malades ne se révèle sur la période qui va de 1820 à nos jours, il est possible de déduire que la maladie a été introduite antérieurement au XVIIIe siècle et peut-être même dès le début du peuplement au milieu du XVIIe siècle. 

Mais les généalogies ont pour défaut de ne donner qu'une image approximative de l'insertion spatiale du phénomène qu'elles reconstituent. Elles permettent d'identifier des cercles endogames et de préciser leur ancienneté. Elles donnent un point de départ à l'évaluation de la consanguinité. Mais elles ne peuvent qu'indirectement, par les mentions marginales (lieu de naissance, domicile), situer ces cercles d'endogamie sur l'espace de l'île et elles ne rendent pas compte du rôle ni de l'ampleur de la mobilité géographique des individus. Elles reflètent mal les unités de cohabitation et de voisinage sur lesquelles se fonde la vie sociale. Or on a vu combien la spatialisation du phénomène endogamique est à Saint-Barthélemy une caractéristique fondamentale, et vraisemblablement fondatrice de la structure de la population. 

Par chance, nous disposons de recensements fort bien faits que les Suédois nous ont laissés. Le plus ancien date de 1787, le plus récent de 1872, la période de 1840 à 1872 comptant à elle seule neuf recensements effectués à des intervalles irréguliers, de un an et demi à presque sept ans. Ces recensements ont été étudiés par nous aux Archives Royales de Stockholm (A.R.S.) pour le recensement de 1787 et aux Archives Nationales, section Outre-Mer (A.O.M.) pour les autres. 

Les recensements suédois de Saint-Barthélemy donnent de très précieuses indications sociologiques. Disons d'abord qu'ils sont divisés en deux parties indépendantes. L'une, « Ville », concerne le bourg de Gustavia. Les individus recensés appartiennent essentiellement au groupe suédois et aux éléments de passage, ainsi qu'aux esclaves urbains. Dans les derniers recensements, une grande partie de cette population disparaît et l'on assiste à son remplacement partiel et progressif par des gens de couleur libres et par des Blancs venus de la campagne qui vont par la suite se mêler plus ou moins avec eux. L'autre partie, « Campagne » recense toute la zone rurale de l'île. Elle indique avec précision le domicile, ou du moins le quartier de chaque foyer. Elle oppose les moitiés « Au Vent » et « Sous le Vent » recensées indépendamment l'une de l'autre, ce qui souligne l'ancienneté de leur contraste et son caractère très explicite. 

Comme les sources de paroisse ou d'état civil, les recensements ont l'avantage d'offrir des données systématiques, peu suspectes de biais d'échantillon, et aussi complètes que possible. Ils ont de plus l'extrême intérêt d'apporter des faits très sûrs sur des questions généralement difficiles à connaître: appartenance ethnique des individus, unités de cohabitation, distance entre les domiciles des futurs conjoints, structure et évolution des foyers. Le rythme élevé des recensements et leur haute qualité permettent ainsi de suivre les familles d'un recensement à l'autre et de reconstituer avec précision leur cycle évolutif. Surtout, nous parvenons ainsi à une datation absolue des diverses phases de ce cycle. Il est alors possible d'inscrire dans l'espace l'évolution des familles, et des cercles endogames que nous révèlent les généalogies. 

L'exploitation des recensements a nécessité une technique assez lourde, dans le souci de maîtriser la totalité de l'information disponible. Dans un premier stade, les recensements de la « Campagne » ont été transférés sur fichier informatique. Ces coupes transversales de la population à un moment donné ont permis de préciser son profil démographique et sa répartition lors du recensement (De Pourbaix, Nault, 1982). Mais cette première démarche est le prélude à une séquence coordonnée de l'ensemble des recensements. Il s'agit alors de les jumeler les uns aux autres afin de retrouver la profondeur diachronique par une voie indépendante de ce que nous avaient appris les généalogies. Par la suite un autre jumelage aboutit à identifier la position dans les généalogies des individus mentionnés dans les recensements. Là, les données d'état civil et de recensement s'épaulent mutuellement et on atteint une reconstruction généalogique, spatiale et dynamique d'une extrême précision. 

La codification nécessaire à ces jumelages a dû être effectuée de façon non automatisée, par l'examen comparé des listes sorties de l'ordinateur après enregistrement des recensements (Nault, 1987; Lavoie, 1987). Partant de l'unité de recensement qu'est le ménage, on tente d'abord de coupler de recensement à recensement des ménages complets, demeurés identiques d'un recensement à l'autre. Ensuite on retrace des ensembles qui ont pu changer de composition tout en demeurant identifiables, puis on s'attaque aux cas des individus isolés, en particulier en confrontant ce qu'apprend le recensement avec les données dont on dispose par ailleurs. Les résultats sont très encourageants. On a ainsi pu jumeler plus de 90 % des individus sur la période 1854-1863 (Lavoie, 1987). 

L'examen de la séquence des recensements permet alors d'identifier les individus qui ont changé de domicile, soit en allant d'un quartier à un autre, soit en passant d'une moitié de l'île à l'autre. Mais surtout, en relation avec les généalogies, il permet d'approcher de très près les raisons des déplacements (qui règlent les échanges génétiques dont nous relevions plus haut la signification). Il apparaît que les mariages représentent la cause la plus fréquente de mobilité, et que ce sont essentiellement les femmes qui se déplacent vers le quartier de leur mari. Mais le fait notable sur cette longue période, et qui montre combien les structures présentes sont la suite des structures du passé, est que ces déplacements de quartier à quartier ne touchent que 5 °70 de la population rurale et que parmi ces 5 %, seuls 10 °70, soit 0,5 °70 de la population totale, impliquent un mouvement d'une moitié de l'île à l'autre (Lavoie, 1987). 

De plus la sociologie des migrants, de ceux donc qui, potentiellement, assurent le lien entre les unités closes, montre un profil qui les écarte de la masse de la population rurale. D'une part on y compte une proportion plus élevée de gens de couleur, d'autre part, parmi les Blancs, plus de personnes issues de foyer ayant un veuf ou une veuve parmi ses membres. 

De cette brève esquisse de la démarche et des résultats actuels du programme de recherche, on retiendra donc comment la chance de disposer à la fois de sources précises et abondantes et des moyens informatisés d'exploiter ces sources a permis de placer l'ethnologie d'une société contemporaine en pleine continuité avec son histoire.

 

III — RACINES

 

Comment aller plus avant, et reconstruire, en amont de ce que nous connaissons maintenant, la mise en place de structures qui allaient durer aussi longtemps ? Il est en effet très clair que la société du début du XIXe siècle à Saint-Barthélemy était déjà solidement construite, et que les contrastes internes qui persistent depuis plus de 150 ans y étaient bien en place. 

En amont, les sources se font plus disparates, les lacunes et les imprécisions des archives paroissiales et des recensements rendent nécessaire l'utilisation de sources plus variées. 

Retenons tout d'abord qu'il existe tout de même de précieux jalons systématiques qui permettent de donner des repères très solides pour certaines périodes. Ce sont tout d'abord les documents établis par les Suédois à leur prise de possession de l'île en 1785. Il s'agit d'une part du recensement de l'île en 1787 (A.R.S., XXVIII), d'autre part de la carte établie par Fahlberg en 1801 (A.R.S.: Karten över Saint-Barthélemy) qui mentionne de façon très précise, en annexe à un véritable plan cadastral, le nombre d'habitations par quartier ainsi que les limites précises de chaque quartier. Un autre document complète cette carte, et donne l'inventaire de ces habitations, leurs propriétaires, leur localisation et leur superficie (A.R.S., XXVIII). 

De la même époque, un registre des baptêmes, mariages et naissances du 6 novembre 1785 au 30 novembre 1786 apporte une autre source systématique (A.R.S., XXVIII). Toutes ces données sont en cours d'introduction dans le fichier de population de Saint-Barthélemy, ainsi que diverses sources encore plus anciennes (listes nominatives, fragments de registres de 1765) qui datent de la première présence française à la fin du XVIIe siècle et au cours du XVIIIe siècle. Confrontées aux généalogies établies par Deveau (1972, 1976) toutes ces indications permettent de reconstituer la charpente de l'organisation sociale de l'île. Il apparaît alors que la mise en place de sa structure cloisonnée remonte très loin dans le passé, et date sans doute des deux ou trois premières générations. Ces premières conclusions sont corroborées par les récits de voyageurs, et par les rapports officiels. On y rencontre toujours de façon plus ou moins explicite les contrastes suivants: contraste entre les Blancs ruraux et la population de Gustavia à l'époque suédoise; contrastes entre Blancs et gens de couleur, affirmés souvent avec beaucoup de vigueur par des pétitions des habitants blancs; contrastes entre « Au Vent » et « Sous le Vent ». Les quartiers ne sont pas tous mentionnés avant 1785, bien que plusieurs d'entre eux apparaissent très tôt, mais on ne dispose pas encore d'une analyse suffisamment fine pour préciser la chronologie de leur mise en place et les incidences qu'elle a eu sur la structure de la population. 

De façon plus illustrative que systématique, relevons quelques attestations de ces faits. Dès 1689, dans une lettre du chevalier de Guiraud, commandant de Saint-Christophe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy (A.N., C10 D1, Saint-Barthélemy), on relève de précieuses indications: « Je me suis transporté en l'isle de Saint-Barthélemy commandée par le Sr Charles de Mayencourt (...) j'ai trouvé septante et cinq hommes (...) je me suis transporté aussi aux Eglises des quartiers du Roy et Dorléans ». Nous trouvons là les deux moitiés de l'île, dont une remarque faite par de Guiraud nous montre combien elles étaient déjà séparées, sur la base géographique qui allait voir s'enraciner le contraste sociologique. Un seul curé, le père Michel Ange, capucin, réside dans l'île, et dit sa messe au quartier du Roy. Il conviendrait, note de Guiraud qu'il y eut un second curé pour le quartier Dorléans « la plupart des habitants ne pouvant venir à la messe dudit quartier du Roy en estant éloignés d'environ deux lieus ». 

Une autre indication du même ordre remonte à novembre 1687. Le commandant de « Saint-Martin et autres dépendances » déclare avoir « vu les églises situées aux quartiers appelés du Roy et d 'Orléans » (A.N., F3 54). 

Dans cet environnement où les deux paroisses constituent des ensembles sociaux nettement marqués, se place une population dont la continuité frappe. Les listes nominatives du XVIIe siècle contiennent la plupart des patronymes actuellement présents; les autres peuvent être identifiés par des fondateurs immigrés de France au compte-goutte au cours du XVIIIe siècle et un peu au XIXe siècle (Deveau, 1972,1976). Simultanément tous les documents attestent combien la coupure avec les gens de couleur, même libres, était radicale. A la différence de ce qui a pu se passer ailleurs dans les Antilles, la pauvreté des Blancs n'a pas joué en faveur de leur métissage. De nombreux textes de la période suédoise font au contraire état de l'intransigeance des Blancs de la « Campagne » envers toute mesure de la part des gouverneurs suédois qui leur ferait perdre leur prééminence face aux gens de couleur, même libres. Un exemple parmi bien d'autres est cette pétition adressée au gouverneur Ankarheim, le 17 septembre 1811, pour lui demander au nom des Blancs que les gens de couleur libres ne soient pas autorisés à voter, comme semblait l'impliquer une décision accordant le vote aux « free residents » de l'île. La pétition déclarait que « quoique les habitants et les soussignés ayent pour la classe des gens de couleur libres une considération que la tranquilité de leur conduite sûrement leur mérite ils n 'ont point prétendu s'arroger l'autorité de demander qu'ils fussent appelés à voter »... (A.R.S., I C). 

Là encore les textes recoupent ce que nous enseignent recensements et généalogies: l'étonnante pérennité des structures et des comportements de la population des campagnes de Saint-Barthélemy. Le dépouillement actuellement entrepris par notre équipe, des Archives royales de Suède et des Archives de France, nous permettra vraisemblablement d'accéder avec encore plus de nuances aux mécanismes sociaux qui ont permis à la population de Saint-Barthélemy de construire son profil si marqué et au cadre spatial où il s'est formé. 

La profondeur historique nous permet de comprendre combien forte est la structure sociale de l'île. Remarquons simplement que du premier recensement suédois de 1787 jusqu'au dernier de 1872, jamais on n'a assisté à une interpénétration des populations. Cela malgré le nombre considérable de résidents suédois et étrangers à Gustavia où ils dépassaient de loin la population des campagnes. Seules deux ou trois filles de Saint-Barthélemy ont épousé des Suédois, mais elles sont alors sorties du groupe où l'on ne retrouve aucun de leurs descendants. Et quand les derniers Suédois s'éteignirent, cent ans de présence furent à jamais effacés dans l'héritage de Saint-Barthélemy, du moins en ce qui a trait à la formation de la population Traversant indemne cette longue phase où elle aurait pu se dissoudre, elle a également traversé jusqu'à nos jours la phase de la départementalisation. L'île, bien que simple commune de la Guadeloupe, a édifié un barrage volontaire et efficace contre ce qu'elle percevait comme allogène. Les changements du niveau de vie, de l'éducation, des formes du travail n'ont pas, dans un premier temps, remanié le cercle des mariages. Tout au plus a-t-on pu noter depuis quelques années un certain accroissement des unions entre les deux moitiés, et quelques mariages entre des Blancs et la minorité de couleur. Qu'en sera-t-il de demain ? Le choc que reçoit Saint-Barthélemy de nos jours l'ébranle plus profondément que ne l'avait fait la présence suédoise: il remet en cause les rapports entre générations, la primauté du foyer, la place de l'Eglise. Il oppose à la pression sociale qui contraignait chacun à se conformer aux règles, une autre pression que suivent les plus jeunes, à travers leurs relations maintenant quotidiennes avec les touristes et avec ceux qui se fixent dans l'île pour y créer des hôtels, des restaurants ou des boutiques. Mais tout cela ne conduit pas nécessairement à une rupture brutale avec le passé. Malgré de nombreux événements qui auraient profondément transformé d'autres sociétés, Saint-Barthélemy a fait preuve au cours de trois siècles d'une étonnante stabilité. Les chocs qui l'ébranlèrent (guerres, épidémies, présences étrangères) ont été suivis d'une reprise en main qui annula leurs effets. La période actuelle a certainement introduit des souplesses imprévues là où les modèles antérieurs étaient rigides. Par là peuvent se glisser des comportements inconnus jusque-là, et on en décèle certains signes. Selon le point de vue où se place l'observateur, I'ampleur des effets des changements est variable. Pour le généticien, il suffit de transformations relativement discrètes de la structure des mariages pour que la structure génétique soit considérablement transformée: un petit flux de métissage, une baisse de l'endogamie de quartier ou de paroisse suffiraient à changer radicalement la consanguinité. Tout semble indiquer qu'il en va bien ainsi et que cette tendance se poursuivra. 

Mais ces changements peuvent ne pas affecter durablement l'identité de la population de Saint-Barthélemy, ni son contrôle sur le destin de son île. Passée la phase menaçante d'un tourisme qui aurait pu aboutir à la prise de contrôle par des éléments allogènes, l'île paraît tenir bien en main l'essentiel de son destin. Dominant un nouveau défi, Saint-Barthélemy pourrait alors réussir son passage à la modernité sans perdre sa personnalité et trouver la solution à quelques-uns des problèmes qui pesaient jusque-là sur elle.

 

BIBLIOGRAPHIE

 

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RÉSUMÉ

 

La population de Saint-Barthélemy (à peine plus de 2 000 habitants) installée sur un territoire insulaire exigu est l'une des plus endogames qui se puisse observer. Ce groupe humain est morcelé, d'abord en deux sous-ensembles « Au Vent » et « Sous le Vent » qui n'ont pratiquement aucun échange entre eux, eux-mêmes subdivisés en quartiers bien individualisés, à peine plus ouverts. Il en découle un nombre de mariages, entre apparentés très important et cette forte consanguinité n'est pas sans risque pathologique. 

Grâce à des archives de qualité (paroisses, état civil, recensements) attentivement dépouillées, des études généalogiques nombreuses et précises permettent de constater que cette endogamie est très ancienne et a su résister à la période suédoise (1784-1878). En sera-t-il de même dans l'avenir avec l'afflux du tourisme et l'ouverture vers l'extérieur ? 

Mots-clés. - Saint-Barthélemy; milieu insulaire; isolement; société; endogamie; consanguinité; pathologie. 

 

SUMMARY

 

The Roots and Destiny of a Population. The population of Saint Barthélemy (barely more than 2,000 inhabitants), settled on a tiny island territory, is one of the most endogamous that can be found. This human group is divided, first into two sub-groups. "Windward" and "Leeward"—which maintain practically no communication between themselves, and, secondly, these groups are in turn subdivided into quite distinct sectors, hardly any more open. The result is that there are a considerable number of marriages among family members, and this high degree of consanguinity involves a future pathological situation. Thanks to archives of a high order (parishes, civilian records, census takings) that have been carefully sifted, quite a number of geneological studies have been made which enable to realize that the endogamous situation is of long date and managed to survive the Swedish period (1784-1878). Will the same be the case in the future with the arrival of tourists and an opening towards the outside world ? 

Key-words. - Saint Barthélemy; island milieu; isolation; society; endogamy; consanguinity; pathology.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le samedi 29 septembre 2007 16:32
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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