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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Rachad Antonius, “Israël: le mythe de la légitime défense. C’est plutôt le «droit» de coloniser sans résistance que veulent ses partisans.” Version légèrement modifiée d'un article publié dans le journal LE DEVOIR, Montréal, édition du jeudi, 7 août 2014, p. A7 — idées. [Autorisation accordée par l'auteur le 10 août 2014 de diffuser cet article dans Les Classiques des sciences sociales.]

Rachad ANTONIUS

sociologue, professeur, Département de sociologie, UQÀM,
spécialiste du Proche-Orient.

Israël:
le mythe de la légitime défense
.
C’est plutôt le «droit» de coloniser
sans résistance que veulent ses partisans
.

Version légèrement modifiée par l'auteur d'un article publié dans le journal LE DEVOIR, Montréal, édition du jeudi, 7 août 2014, page A7— idées.



Le mythe voulant qu’Israël soit en situation de légitime défense, propagé par le gouvernement israélien et par ses lobbys au Canada, a été adopté par une partie de l’élite politique canadienne et québécoise. Or ce mythe ne correspond pas du tout à la réalité, ni du point de vue des rapports juridiques entre Israël et les territoires occupés ni du point de vue du rapport de force réel entre les diverses parties.

Du point de vue juridique, Israël occupe militairement les territoires palestiniens. C’est la position officielle du Canada, des États Unis, et de l’ensemble des signataires de la IVe Convention de Genève de 1949. Le site Web du ministère des Affaires extérieures et du Commerce international du Canada le dit très explicitement : « La Quatrième Convention de Genève s’applique dans les territoires occupés et définit les obligations d’Israël en tant que puissance occupante, en particulier en ce qui concerne le traitement humanitaire des habitants des territoires occupés. Comme le mentionnent les résolutions 446 et 465 du Conseil de sécurité de l’ONU, les colonies de peuplement israéliennes dans les territoires occupés sont contraires à la Quatrième Convention de Genève. »

La Cisjordanie et Gaza ont été occupés militairement par Israël depuis 1967, c’est-à-dire depuis 47 ans. Il ne s’agit donc pas d’une occupation temporaire, visant à régler un différend, mais d’une intention de prendre le contrôle des parties les plus stratégiques du territoire palestinien, intention réitérée par les divers premiers ministres israéliens et illustrée par l’expansion toujours croissante des colonies et du nombre de colons.

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Photo: Mahmud Hams, Agence France-Presse. Le conflit actuel n’est pas tant une guerre entre Israël et le Hamas qu’une guerre contre la population civile palestinienne, soutient Rachad Antonius. Ci-dessus, des Palestiniens ont profité de la trêve mercredi pour récupérer quelques objets de bâtiments dans la bande de Gaza.

Le contrôle de Gaza

Même si les colonies ont été retirées de Gaza en 2005, le contrôle israélien ne s’est pas terminé pour autant. Israël contrôle les frontières, le ciel, le sous-sol et la mer de Gaza. Depuis 2006, le blocus imposé à Gaza a signifié qu’Israël contrôle aussi la vie et la mort des Gazaouis, puisque les denrées alimentaires, les médicaments, les produits industriels ou manufacturés ainsi que les personnes ne peuvent ni sortir ni entrer à Gaza sans autorisation israélienne qui est refusée pour nombre de produits de première nécessité. Et l’Égypte est tenue par ses traités avec Israël de respecter ce blocus.  Outre la mort de plusieurs civils de Gaza, ce blocus a entraîné une détérioration dramatique de la santé des habitants, qui ont eu recours à des tunnels pour faire transiter des marchandises et, du même coup, des armes.

Du point de vue du rapport de force, l’affirmation qu’Israël est en état de légitime défense est ridicule. Mais le ridicule ne tue pas. Les bombes israéliennes, si. Près de 2000 morts durant le dernier round. Dès la première semaine (13 juillet), plus de 1000 tonnes de bombes avaient déjà été larguées sur la population palestinienne, lit-on dans le journal israélien Haaretz, un chiffre que les médias ici ne citent pas. Du point de vue du ratio civils/combattants tués, du côté israélien on dénombre 3 civils tués et 64 soldats, donc moins de 5% de victimes civiles. La grande majorité des victimes sont donc des soldats. Du côté Palestinien, sur environ 2000 morts, 80% sont des civiles.

L’idée qu’Israël est en état de légitime défense est donc une énorme fabulation. Pour prétendre à la légitime défense, Israël devrait d’abord se conformer au droit international pour cesser d’être dans la position d’agresseur en tant que puissance occupante. Or ce n’est pas le cas.

En 1993, l’écrasante majorité des Palestiniens avait approuvé la reconnaissance d’Israël contenue dans les accords d’Oslo. Or ces mêmes accords ne reconnaissaient pas l’État palestinien, terme qui n’apparaît nulle part, ni dans les accords eux-mêmes, ni dans la correspondance les entourant. Et de plus, Israël a profité des négociations pour s’approprier encore plus de territoire palestinien. Et vous parlez de légitime défense ?

Ce qu’Israël veut, c’est coloniser en paix. Sans résistance.  Ce qui est en jeu, ce n’est pas le droit d’Israël d’exister mais bien le « droit » qu’il revendique de coloniser ce qui reste de la Palestine, et surtout, de le faire sans contestation. Même la contestation pacifique et diplomatique est interdite. Quand les Palestiniens ont voulu obtenir un statut d’observateur à l’ONU, les sanctions israéliennes et américaines n’ont pas tardé à s’abattre tant sur les Palestiniens que sur l’UNESCO.

La popularité du Hamas

Au moment de la signature des accords d’Oslo en 1993 la popularité du Hamas était tombée à moins de 4%. Trois facteurs ont fait que le leadership traditionnel des Palestiniens, enclin à faire un compromis historique avec Israël,  a été  discrédité et marginalisé, au profit du Hamas : les politiques israéliennes de prises de contrôle du territoire, largement ignorées par la presse occidentale ; les violences exercées par les colons et par l’armée israélienne, contre lesquelles l’Autorité palestinienne ne faisait rien ; et surtout l’échec du processus diplomatique de paix, à cause des pressions exercées envers l’Autorité palestinienne pour qu’elle cède à Israël des régions stratégiques de la Cisjordanie. Le résultat a été que la popularité du Hamas a beaucoup augmenté, avec des conséquences sociales et politiques extrêmement négatives pour la société palestinienne compte tenu de l’orientation idéologique islamiste de ce groupe.

Israël est prêt à tout pour empêcher que naisse un État palestinien sur l’ensemble des territoires occupés et reconnu par la communauté internationale.  Chaque fois que des développements politiques étaient possibles, la stratégie israélienne a été de recourir à la guerre plutôt qu’au compromis, tentant de justifier son action comme une « légitime  défense ».  « Since the first Lebanon war over 30 years ago, Israel's main strategy has been killing Arabs. The current atrocious war in Gaza is no different. », nous disait le journaliste israélien Gideo Levy dans le Haaretz du 13 juillet, évoquant les opérations israéliennes de 2006, 2008, et 2012.

Mais rien de cela ne compte pour les partisans de la colonisation. Il faut l’appuyer et prétendre, de surcroît, qu’Israël est victime. Tout autre point de vue est qualifié d’antisémitisme. Pour cela, un dernier tour démagogique est nécessaire : celui d’affirmer que c’est une guerre entre Israël et le Hamas, alors qu’en réalité c’est une guerre contre la population civile palestinienne. Le manque total d’empathie des partisans de la colonisation envers l’ampleur du massacre et l’ampleur de la destruction de Gaza laisse pantois. Honte à ceux qui appuient ce massacre.


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Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 10 août 2014 11:56
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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