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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Christine Kerdellant, “Tocqueville et les gilets jaunes.” Éditorial, L'Usine nouvelle, 19 janvier 2019.

Christine Kerdellant

Tocqueville
et
les gilets jaunes.”

Editorial, L’USINE NOUVELLE, 19 janvier 2019.

Alexis de Tocqueville était un grand penseur, mais pas un grand tribun. L’homme qui a créé le mouvement de la Jeune gauche (on l’oublie trop souvent) aura pourtant été, une fois dans sa vie, un orateur extraordinaire. Le 27 janvier 1848, lors d’un discours prophétique à la Chambre des députés, il annonça la révolution imminente. Pour Jean-Louis Benoît, le biographe référent de Tocqueville, il décrit une situation très semblable à celle que nous vivons.



La boîte de Pandore est ouverte

En 1848, des amis de Tocqueville, dans l’opposition, organisent la "campagne des banquets", des rassemblements en région contournant l’interdiction de réunion politique afin de permettre aux classes populaires de s’exprimer. Tocqueville avertit ses amis qu’ils ouvrent la boîte de Pandore et vont déchaîner des forces qu’ils ne pourront plus contrôler. Le peuple possède des raisons de se plaindre : son sort ne s’améliore pas, tandis qu’il supporte depuis trop longtemps des gouvernants lestés par les "affaires". La caste au pouvoir est devenue "par son indifférence, par son égoïsme, par ses vices", illégitime. Même si le gouvernement actuel n’y est pour rien, les citoyens en ont trop supporté…

La France est prospère, mais l’État ruiné

Les soulèvements sociaux jaillissent rarement en bas de cycle économique. Tocqueville souligne, dans "l’Ancien Régime et la Révolution", que la France n’a jamais été aussi riche qu’à la veille de la révolution de 1789. Mais l’État était en faillite et le petit peuple portait sur son dos la quasi-totalité de la charge des impôts. Il a suffi d’une mauvaise récolte pour allumer l’incendie. Aujourd’hui, même si le pouvoir d’achat a augmenté, la peur de nouvelles taxes est justifiée car l’État exsangue cherche des recettes désespérément…

L’égalitarisme met à mal toute la société

Tocqueville défend l’égalité, mais avertit des dangers de l’égalitarisme : "Le désir de l’égalité devient toujours plus insatiable à mesure que l’égalité est plus grande." La France est moins inégalitaire que ses voisins, pourtant ses habitants souffrent davantage des inégalités de revenu. Au siècle prochain, toute supériorité, quelle qu’elle soit, passera pour une injure…

Les cahiers de doléances sont inexploitables

L’historien Ran Halévi rappelle un autre mot de Tocqueville : "Quand on demande à un peuple d’énumérer ses griefs, on trouve à l’arrivée un catalogue à la fois révolutionnaire et impraticable." Il est illusoire d’attendre d’exercices de démocratie directe une solution politique. Elle n’existera que dans le cadre des institutions représentatives traditionnelles.

Le besoin de corps intermédiaires est criant

La main tendue par Laurent Berger n’était pas désintéressée, mais l’avoir refusée est une faute lourde. Tocqueville évoquait un pouvoir central "parvenu à détruire tous les pouvoirs intermédiaires", "seul ressort de la machine sociale", ayant fait en sorte "qu’entre lui et les particuliers, il n’existe plus rien qu’un espace immense et vide". Que se passe-t-il alors lorsqu’ils se soulèvent ?

Leur nombre compte moins que le bruit qu’ils font

Les Gilets jaunes sont peu nombreux, comparés aux insurgés de 1789 ou 1848. De plus, les vrais Gilets jaunes sont pacifiques. Mais voilà, ils sont le cheval de Troie consentant des casseurs, pilleurs et autre "boxeur". Consentant, car sans les violences, le mouvement n’aurait pas été plus médiatisé que 250 000 manifestants de la CGT. Il aurait eu deux minutes au journal de 20 heures et pas H24 sur BFM.

*Sur ce point, on peut se référer à : "Pour une lecture tocquevillienne de la crise française".



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le mercredi 23 janvier 2019 16:19
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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