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Collection « Histoire du Saguenay—Lac-Saint-Jean »

LE PAYS DU LAC-SAINT-JEAN. Esquisse historique de la colonisation. (1988)
Introduction


Une édition réalisée à partir du livre de Russel Aurore Bouchard, LE PAYS DU LAC-SAINT-JEAN. Esquisse historique de la colonisation. Chicoutimi-Nord, Québec : Russel Bouchard, 1988, 241 pp. Seconde édition revue et corrigée. Une édition numérique réalisé par Diane Brunet, bénévole, guide, Musée La Pulperie, Chicoutimi. [L'auteure nous a accordé le 22 septembre 2005 sa permission de diffuser ce livre dans Les Classiques des sciences sociales.]

Introduction

L'idée d'écrire une histoire du Lac-Saint-Jean remonte à plusieurs années, alors que je commençais à peine de rédiger les premières pages de mon Histoire de Chicoutimi-Nord. Document nettement imparfait, surtout en ce qui concerne la logique de l'évolution des municipalités, mais qui aiguisait néanmoins suffisamment ma curiosité pour que je pousse davantage la recherche aux confins de la connaissance de la science historique en ce domaine. Ce premier jet a permis de déboucher, tout naturellement, sur la création du projet dune série portant sur l'histoire des municipalités, à laquelle s'associa par la suite la Société Historique du Saguenay. Le troisième numéro, celui de « Métabetchouan : du poste de traite à la ville », eut comme conséquence première de mettre en évidence la lacune de ne pas posséder un document spécifique sur l'histoire du Lac-Saint-Jean. Nous avions bien l'Histoire du Saguenay rédigée par les abbés historiens Lorenzo Angers et Victor Tremblay, mais cette approche trop générale et trop limitée dans le temps avait le désavantage de cacher la spécificité de chacune des deux sous-régions formant la Sagamie.

Nous ne sommes pas les seuls à vouloir établir les traits communs et notifier les différences, même subtiles, du caractère particulier du Lac-Saint-Jean par rapport au Saguenay. D'ailleurs, en 1888, lorsqu'arrive le chemin de fer à Chambord, les Jeannois eux-mêmes avaient déjà commencé à démontrer un certain « nationalisme » envers leur « Pays », et n'hésitaient plus à dénoncer les empiètements du « Saguenay » qui dirigeait de Chicoutimi toute leur vie politique et économique. De plus en plus sur la défensive, les pressions populaires aboutirent à un premier résultat, lorsqu'en 1890 le Lac-Saint-Jean qui avait été depuis toujours compris dans le comté de Chicoutimi, demanda puis obtint son autonomie politique.

Le rehaussement du Lac-Saint-Jean pour répondre aux besoins énergétiques de l'industrie particulièrement logée au Saguenay, nous a démontré également certaines différences au niveau des intérêts strictement économiques des deux contrées. Nous étions encore à l'époque du Lac-Saint-Jean agricole qui vivait trop souvent pour répondre ponctuellement et sans broncher aux besoins du Saguenay. Jusqu'à l'avènement tout récent de la grande industrie singularisée par les supers complexes industriels réunissant sous le même chapeau scieries, pulperies et papeteries, la population jeannoise avait effectivement l'impression que son industrie était atrophiée par la trop grande force d'attraction du Saguenay et de son port en eau profonde lui ouvrant la voie vers les marchés extérieurs. Aujourd'hui, nous savons que le panorama n'est plus le même. Le développement de la grande industrie et l'amélioration de l'agriculture ont permis à l'infrastructure routière de se déployer à travers toutes les directions, libérant la sous-région par la même occasion de ses principales entraves.

En effet, à la fin des années cinquante, grâce aux routes de La Tuque et de Québec, le Pays du Lac-Saint-Jean a élargi ses rapports commerciaux avec l'ensemble de la communauté québécoise. Avec la route Chibougamau, il occupe stratégiquement la place de région tampon entre la région minière de Chibougamau et le Saguenay. Qui sait, certains esprits éclairés croient, avec les développements hydro-électriques, qu'il occupera un rôle de transition entre Québec et le Moyen-Nord.

Nous croyons justifié de préciser que ce sont les particularismes singularisant le Jeannois du Saguenéen qui ont permis à un peuple original de prendre forme et de se développer. L'histoire a malencontreusement donné préséance à l'appellation de « Saguenay » pour englober les deux sous-régions. Conscient du rôle et de l'importance de tous et chacun à l'intérieur de ce vaste royaume qu'est le Saguenay et le Lac-Saint-Jean, un fait demeure ; les deux régions sont nées de la combativité et des espoirs d'une population qui ne désirait qu'une chose : conquérir sur la forêt suffisamment de terrain pour forger un Pays.

Qu'il soit Saguenéen ou Jeannois, la précarité des lieux et les innombrables embûches mises au travers de notre histoire par la condition difficile du terrain, ont permis à la loi de la sélection naturelle de créer une race d'homme nouveau qui devra vivre en symbiose avec la nature. « Mon Pays ce n'est pas un Pays c'est l'hiver » disait le poète qui avait certainement l'idée de poursuivre en disant que ce Pays est né de l'hiver, de la forêt et de l'eau. Si nous voulons continuer de nous battre pour une identification ou pour une autre, il faudra d'abord réussir à le conserver vivable ce Pays.

*   *   *

Nous tenons à préciser que cette étude ne se veut pas une synthèse générale du Lac-Saint-Jean. Nous avons préféré adopter comme trame de fond, l'histoire de la colonisation de cette contrée qui forme en gros la moitié de la Sagamie. Nous croyons de notre devoir de préciser ici que le mot colonisation est emprunté dans son sens le plus général pour faire état de la marche du peuplement et de la récupération du territoire par l'Homme, qu'il soit « Rouge » ou « Blanc ». Pour dissiper tout doute, disons que cette colonisation débute avec l'arrivée des premiers Amérindiens, pénétrant alors le territoire à la recherche de nourriture, suite au retrait de la calotte glaciaire. À cette phase préliminaire, nous pouvons ajouter quatre autres étapes qui sont marquées par la conquête du sol et de l'espace.

La seconde étape, qui débute en 1849 et se termine en 1856, est la plus brève. Elle marque les débuts de la récupération du territoire cultivable par les sociétés de colonisation. Secondées dans leur action par le clergé, celles-ci ont décidé de diriger et de concentrer les efforts pour acquérir des lots qu'elles redistribueront à leurs concitoyens selon un mode qui leur est propre. Après la dissolution de la Société de colonisation des comtés de l'Islet et de Kamouraska, en 1856, le Lac-Saint-Jean entre dans ce que nous appelons la grande marche du peuplement. C'est au cours de ces années que les colons arrivent pour récupérer la grande partie des cantons lacustres. Cette phase prend fin avec l'ouverture des premières pulperies. Le quatrième mouvement s'étend de 1901 à 1927. Ce quart de siècle est une étape importante car il marque l'époque des pulperies et la formation des villages-usines, époque qui prend fin comme nous le savons par la fermeture de Val-Jalbert. C'est à ce moment plus particulièrement que sont récupérées la majorité des terres de l'arrière-pays. Enfin, de 1927 à 1968, nous assistons à la cinquième et dernière phase. Cette époque voit la fin du rêve agricole, le début de la grande industrie et le harnachement du Lac-Saint-Jean et de la rivière Péribonca.

Nous avons choisi l'année 1968 pour signifier la fin de notre étude car c'est à ce moment que disparaît, sans faire de bruit, la Société de Colonisation du Diocèse de Chicoutimi. Fondée au milieu des années trente, elle avait supervisé la distribution des dernières concessions et s'était surtout occupée à consolider les paroisses récemment formées. Évidemment, l'occupation de l'écoumène agricole tire à sa fin au milieu des années cinquante.

Cette étude ne se veut pas une « vision » de la colonisation et de l'histoire du Lac-Saint-Jean. Avoir voulu présenter ce texte dans cette perspective aurait été certainement hasardeux, voire même prétentieux. Conscient que nul historien ne peut arriver à un tel résultat et conscient de la limite de nos propres capacités nous nous devons d'adopter une attitude plus réaliste. La recherche dans les documents d'histoire et dans les études publiées ne fait pas que nous ouvrir les portes de la connaissance, elle nous apporte également les questions qui consacrent notre ignorance. Nos espérances visent deux buts : apprendre les grandes lignes de l'histoire de notre coin de pays et vous présenter le résultat de nos trouvailles. Pour l'un, nous croyons avoir appris car notre ignorance était si grande. Pour l'autre, la population du Pays du Lac-Saint-Jean à laquelle nous dédicaçons le présent ouvrage, si ces quelques lignes vous font passer des moments agréables tout en apportant certains éléments nouveaux à votre savoir, notre but sera atteint.

Russel Bouchard,

Chicoutimi-Nord,

le 8 janvier 1988


Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le jeudi 24 septembre 2009 13:50
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



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