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Collection « Les auteur(e)s classiques »

George SOULIÉ de MORANT (1878-1955), La passion de Yang-Kwé-Feï (1924).
Préface


Une édition électronique réalisée à partir du texte de l'oeuvre de George SOULIÉ de MORANT (1878-1955), La passion de Yang-Kwé-Feï. L’Edition d’art, Paris, 1924, 204 pages. Une édition réalisée par Pierre Palpant, bénévole, Paris.

Préface

Il est en tous pays des histoires d’amour, des légendes presque divines qui font palpiter tous les cœurs et troublent même les esprits les plus rudes. Mais, entre l’Occident et l’Extrême-Orient, en cela comme en tant d’autres choses, la différence est profonde.

Les Européens, pareils aux enfants et aux simples que charme surtout l’irréel, ont pour héros d’amour des personnages mythiques ou légendaires : Eros, Léda, Tristan et Yseult, Don Juan.

En Chine, au contraire, les héros de la passion sont d’une incontestable vérité historique ; leurs aventures n’empruntent rien à l’imagination irisée des poètes. Et les plus célèbres d’entre eux, la séduisante Yang Kwé-feï et son Impérial époux Ming Rwang-ti, ont si bien mêlé leurs amours à la vie même de l’Empire, que les moindres épisodes de leur existence ont été consignés dans les Annales de l’État et sont donc admis comme authentiques.

De plus, chance unique dans l’Univers, non seulement l’Empereur et l’Impératrice étaient eux-mêmes des poètes délicats dont les œuvres nous ont été conservées, mais ils avaient encore à leur Cour les plus illustres génies de la littérature chinoise : Li Po, Tou Fou, Mong Rao-jann, Wang Wé et tant d’autres, de qui l’Europe connaît et admire depuis longtemps le talent puissant et l’originalité rare. Ainsi, chacun des passages de cette touchante aventure, chacune des fêtes ou des souffrances du couple amoureux se trouvent chantés par des contemporains ou par les héros eux-mêmes, en stances demeurées immortelles.

*

L’Empereur Siuann-tsong Ming Rwang-ti « L’Ancêtre du Ciel profond, Étincelant Auguste Empereur », sixième souverain de la dynastie Trang, naquit en 685 après J.-C. Son nom de lait fut A-mann « les yeux rêveurs ». Son nom de famille était Li, et son prénom Long-tsi « le Socle-de-la-Gloire ». Troisième fils de son prédécesseur, il fut longtemps connu dans le peuple sous le nom de Sann-lang « Le Troisième Seigneur ». Son apanage fut d’abord le royaume de Tchrou, au centre de la Chine ; puis le Linn-trao, dans le nord-ouest. Son enfance et sa jeunesse assistèrent aux meurtres affreux qui ensanglantèrent le palais au temps de Wou Reou, la seule femme qui osa prendre le titre d’Empereur et dont le règne personnel soit enregistré dans les Annales de l’Empire Fleuri. Elle mourut enfin à 82 ans, en 705. La tante de Ming Rwang-ti, l’Impératrice Wé, voulut suivre un aussi bel exemple et empoisonna son mari en 710, mettant sur le trône un de ses fils âgé de 16 ans. C’est alors que Ming Rwang-ti s’introduisit dans le palais avec une troupe armée, massacra l’Impératrice et intronisa son père, Jwé Tsong, auquel il succéda en 712. Passionné de littérature, de musique et de peinture, il sut attirer à sa Cour les plus rares talents. Son règne marque l’apogée de la poésie et des arts en Chine. La révolte de Ngann Lou-chann, en 755, amena son abdication en 756. Il mourut en 762. Il adopta comme périodes de règne, les noms de Kraé-yuann « Le principe-ouvert » de 712 à 742, et Tiènn-pao « Les joyaux-du-ciel » de 742 à 755.

*

La ravissante Yang Yu-rwann « Bracelet-de-Jade », naquit en 720. Elle fut envoyée en 735 dans le harem du Prince Cheou, dix-huitième fils de Ming Rwang-ti. Les historiens semblent croire qu’elle ne fut à aucun moment la favorite du jeune prince. Trois ans après, en 738, elle fut aperçue par l’Empereur et fit partie de son harem, étant nommée au rang de Kwé fe « Précieuse Épouse Impériale », correspondant à Seconde Impératrice ou Première favorite, avec le titre de Traé-tchènn Kong-tchou « Princesse de la Réalité Suprême ».

Li Po (Li Taï-pe) avait quarante ans en 745 après J.-C. Il mourut la même année que Ming Rwang-ti, se noyant dans le lac Tong-ting au cours d’une promenade nocturne. Quelques biographes affirment que, dans son ivresse, s’étant penché sur l’image de la lune reflétée dans l’eau calme, il voulut s’élancer vers l’astre qu’il avait tant célébré. Ses admirateurs préfèrent croire qu’il fut ravi au Ciel par des Immortels.

Tou Fou avait six ans de moins que Li Po, et vécut jusqu’en 770. Il remplit longtemps le rôle dangereux de Censeur Impérial et fut confirmé dans cette charge par le jeune Empereur Sou-tsong, fils de Ming Rwang-ti. Mais une remarque trop sincère le fit exiler comme gouverneur d’une ville éloignée. Il se démit de cette charge et voyagea longtemps parmi les merveilleux paysages du Se-tchrwann. Rappelé à la Cour comme vice-ministre, il y resta six ans, puis se retira encore pour reprendre sa vie errante. Surpris par une inondation, dans les ruines d’un temple, il vécut dix jours de racines et d’herbes. Mais quand il fut sauvé, enfin, il ne put résister à sa faim et succomba au milieu de son premier repas.

Les principaux ouvrages où j’ai puisé tous les traits de ce récit sont :

Trong-tsiènn Kang-mou « Miroir Universel avec résumés et développements », histoire générale en quatre-vingts volumes, écrite au XIIe siècle, par l’illustre philosophe Tchou Si, et donnant, par ordre chronologique, pour chaque événement, un résumé en gros caractères et des développements en texte plus fin.

Trang chou « Livre de la dynastie Trang » (609-910 ap. J.-C.), en deux cents sections, publié au Xe siècle par Liou Sin, et qui donne, avec un exposé détaillé des faits, des biographies complètes des principaux personnages et d’innombrables renseignements sur les sujets les plus divers.

Trang che « Les poésies des Trang », et Trang che ro-tsié « Poésies des Trang avec commentaires ». Le premier contient, dans ses trente-deux volumes, la majorité des œuvres de la dynastie, expliquant, pour la plupart d’entre elles, les circonstances dans lesquelles l’auteur les a composées.

Tchrang-cheng tiènn « Le Palais de la Vie-sans-fin », pièce historique en 50 tableaux, écrite par le célèbre dramaturge Rong Cheng et représentée pour la première fois en 1655 ap. J.-C. Ce drame, dont plusieurs scènes sont encore jouées de nos jours, contient une grande partie de la vie de Yang Kwé-feï.

Un assez long poème de Po Tsiu-y (772-846 ap. J.-C.) « L’hymne des regrets sans fin », Tchrang-rènn Ko, montre comment, cinquante ans à peine après la mort des héros, leurs amours étaient déjà divinisées.

*

Ayant pris dans l’histoire le récit de chaque événement, et souvent même les paroles des Souverains, je n’ai plus eu qu’à enchâsser les poèmes à leurs places, aidé dans cette recherche par les commentaires indiquant dans quelles circonstances la plupart des œuvres avaient été composées.

Je me suis fait un devoir de traduire avec une exactitude littérale ces chefs-d’œuvre poétiques, dont deux ou trois à peine étaient déjà connus en Europe, et grâce auxquels nous apercevons les personnages et les décors du drame, tels que d’incomparables génies les avaient vus de leurs yeux.

Pour d’inexplicables motifs, cette tragédie, devenue légendaire, n’a jamais tenté les romanciers ni les historiens chinois : peut-être le sujet était-il trop connu ? C’est en Europe ainsi qu’elle va paraître pour la première fois.

Que n’ai-je pu la redire telle que j’en entendis parfois quelques fragments, chantés par des musiciens aveugles sur les terrasses des maisons de thé, où, par les nuits transparentes d’Asie, les rêveurs viennent, en foules silencieuses, goûter le clair de lune au bord des lacs fleuris de nélumbos.

G. S. DE M.


Retour au livre de l'auteur: Laurence Binyon (1869-1943) Dernière mise à jour de cette page le vendredi 12 janvier 2007 8:19
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur au Cegep de Chicoutimi.
 



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