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Collection « Les auteur(e)s classiques »

Une édition électronique réalisée à partir du texte de l'INSTITUT DE FRANCE, PAUL JANET. NOTICE HISTORIQUE lue en séance publique le 6 décembre 1902. Par Georges Picot, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences morales et politiques. Paris: Librairie Hachette et Cie, 1903, 100 pp. Une édition numérique réalisée à partir d’un facsimile de la Bibliothèque nationale de France par Jean ALPHONSE, bénévole, responsable du site philosophique Métascience.

[1]

Paul Janet

NOTICE HISTORIQUE

lue en séance publique le 6 décembre 1902.

Par Georges Picot, secrétaire perpétuel
de l’Académie des sciences morales et politiques.



Paul Janet. Notice historique. [1]
Paul Janet.

Sa vie. [77]
Ses ouvrages. [79]
Travaux académiques. [86]
Rapports sur les concours. [90]
Collaboration à la «Revue des deux mondes». [91]
Journal des savants. [96]


Messieurs,

Il y a des hommes, même parmi les philosophes, qui, dans le cours de leur vie agitée, ont été mêlés à tous les événements de leur siècle : leur histoire est celle de leur temps. Attachés à une cause, ils sont portés au pouvoir avec elle, fiers de ses succès et non moins fiers de subir ses disgrâces. Leur destinée a été partagée entre la pensée et l'action.

Celui dont nous venons aujourd'hui vous entretenir n'a pas cherché à faire deux parts de son existence. Il l'a consacrée tout entière [2] à la philosophie, non pas seulement à la métaphysique, aux conceptions abstraites qui absorbent le penseur et le transportent, pour ainsi dire, dans un monde irréel, mais à cette philosophie qui, touchant à la morale, examine l'être social, l'observe dans ses manifestations, compare son rôle dans le monde et est amenée à faire de la politique une étude spéciale.

Écrire l'histoire de la politique sans être attiré par ses ambitions, définir des principes sans être tenté de les appliquer, se sentir vraiment citoyen, donner des leçons aux hommes sans avoir la prétention de les gouverner, ne pas sortir du monde de la pensée tout en aimant passionnément son pays et en partageant toutes les émotions de ses contemporains, c'est un effort d'esprit, rare en tous les temps, mais qui mérite assurément d'être signalé comme sans exemple au XIXe siècle.

M. Paul Janet n'a voulu être que professeur. C'est une vie de professeur n'ayant été [3] étranger à aucune pensée de son temps que nous allons essayer de faire revivre devant des confrères qui ont tous été ses amis.

Paul Janet est né à Paris le 30 avril 1823. Issu d'une famille de libraires, il vint au monde au milieu des livres. Son grand-père avait fondé avec succès une grande maison de librairie rue Saint-Jacques. Il avait six fils ; il s'occupa peu de leur instruction, mais il sut développer en eux le goût littéraire ; la comédie était la grande distraction des jeunes gens. Le samedi soir, le magasin était fermé ; on montait un théâtre et de nombreux amis s'assemblaient pour applaudir Corneille et Racine, Molière et Bagnard. C'est ainsi qu'à la veille de la Révolution, dans la petite bourgeoisie parisienne, les plaisirs de l'esprit tenaient souvent lieu d'études. Paul Janet se rappelait avoir entendu les acteurs survivants des soirées de la rue Saint-Jacques ; leur conversation était toute parsemée des souvenirs du [4] théâtre classique. Il respira cet air dès son enfance.

À l'âge de six ans, il avait été envoyé à l'école ; ce fut sa première douleur. Il ne pouvait s'habituer aux rudesses de la camaraderie forcée ; le tumulte lui répugnait ; il avait besoin de l'amitié ; il sut découvrir un enfant de son âge, chétif et boiteux, d'une médiocre apparence et d'un grand cœur ; il le défendit contre les sarcasmes, se lia avec lui, et cette union, prolongée durant trente années, ne fut rompue que par la mort de son ami.

Paul Janet demeura orphelin à neuf ans. Il conserva sa mère qui appartenait à une famille de magistrats ; elle était fort distinguée, un peu austère et réservée, mais nullement sévère, d'une piété sage et tolérante, d'un esprit judicieux et éclairé.

La révolution de Juillet, la mort de son père, un changement complet d'existence interrompirent ces premières études. En 1832, il entra définitivement dans une pension [5] qui suivait les classes du collège Saint-Louis. Revenant, au terme de sa vie, sur ses années de collège, il écrivait : « Je souffre quand je revois tout cela par l'imagination. La vie banale et commune de la caserne m'a toujours été odieuse... Je n'aimais pas le bruit et la violence des jeux de garçons : beaucoup d'entre eux étaient vulgaires ; le langage était brutal. J'avais des amis et je les ai conservés ; par là, je ne saurais avoir trop de reconnaissance pour ma vieille pension et mon vieux collège... mais j'avais un tel besoin de la vie de famille, une telle aversion de la captivité, que je souffrais réellement. »

Lès premiers succès adoucirent son chagrin ; il parvint vite en tête de sa classe et sut s'y maintenir. Les vers latins excitèrent vivement son esprit. Cette étude avait un mérite qu'aucun enseignement n'a remplacé ; elle faisait aimer la poésie latine et sentir des beautés d'expression et de rythme dont la prose ne donne nulle idée. Les jeunes [6] gens d'aujourd'hui seraient bien étonnés si on leur disait que les jeunes gens d'autrefois s'éprenaient d'Horace et de Virgile. Paul Janet se prit d'enthousiasme pour les maîtres de l'imagination antique. En veut-on la preuve ? Il avait pour répétiteur un écrivain d'un esprit rare, Despois, qui venait de remporter peu auparavant le prix d'honneur. Avec un de ses amis, ils allaient le trouver, la nuit, et prolongeaient en de longues veillées la lecture des poètes.

Il ne fallait pas moins que cette passion pour le soutenir ; il éprouva vers la seconde et la rhétorique un dégoût pour l'étude qui alarma sa mère. Son esprit ressentit une secousse, dès les premières classes de philosophie. « S'il m'est permis, disait-il, à la fin de sa vie, d'évoquer d'illustres exemples, moi aussi, j'ai senti la vocation philosophique se manifester en moi, en entendant les premières leçons de mon maître en philosophie, M. Gibon. Il n'était pas éloquent ; mais il était grave, convaincu, d'un esprit [7] libre et indépendant : je lui dois un amour de la philosophie qui n'a jamais tari depuis tant d'années. »

Après une année d'études brillantes, la plus heureuse de sa jeunesse, Paul Janet se présentait à l'École normale. Il aimait à raconter avec quel succès il soutint l'examen d'histoire : interrogé sur les empereurs romains, il se mit à débiter, d'Auguste à Septime-Sévère, la liste complète de tous les Césars. L'examinateur, surpris de tant de science, donna une note qui contribua à faire recevoir le philosophe. Il devait ce tour de force de mémoire à son professeur d'histoire qui ne sachant pas tenir sa classe, et accablant ses élèves de pensums, lui avait donné à copier si souvent la liste des empereurs qu'elle s'était gravée dans sa tête. L'examinateur, notre vénéré doyen, M. Wallon, ne lui en voulut pas. Vous m'avez bien trompé ! lui dit-il, avec une malice indulgente, lorsqu'il s'aperçut que l'École avait admis non un historien, mais un philosophe.

[8]

C'était le temps de la vieille école, établie rue Saint-Jacques à côté du collège Louis-le-Grand, dans les bâtiments de l'ancien collège du Plessis. Les cours étaient tristes ; les logements médiocres ; les salles obscures et étroites et cependant nul ne se plaignait, tant était grand le renom de l'École normale. Il avait pour camarades Hippolyte Rigault, Thurot, Émile Burnouf qui devait diriger un jour l'École d'Athènes. En première année, le cours d'Amédée Jacques l'intéressa ; mais il fut charmé, la seconde année, par Saisset, « maître très solide, très-sérieux, d'un esprit très philosophique » ; il avait une conversation séduisante ; il était « plus libre, plus naturel, plus chercheur dans ses entretiens que dans ses livres ». [1] Saisset laissa son empreinte sur l'intelligence du jeune philosophe.

C'est au concours d'agrégation que Paul Janet se révéla. Parmi ses camarades [9] de l'École et ses concurrents qui remplissaient la salle, l'acclamation fut unanime : sa parole était nette, ferme, douée d'une autorité naturelle ; l'éloquence ne venait ni des mots habilement groupés, ni de phrases à effet, mais de l'ordonnance heureuse et puissante des idées, au service de la vérité. Victor Cousin présidait le jury : il en rendit témoignage. « M. Janet, dit-il dans son rapport au ministre, a été le premier hors ligne pour sa leçon. Il a de la science, du nerf, de la précision. Sa leçon sur la divine Providence est assurément une des plus fortes et des plus belles que j'aie entendues depuis quinze ans. La doctrine la plus pure, une méthode sévère, un rare savoir, une élocution nette et vigoureuse ont, pendant une heure entière, captivé un nombreux auditoire. » Il n'hésitait point à le signaler comme une des meilleures espérances de l'enseignement philosophique.

Ceux que distinguait ainsi Victor Cousin, il s'emparait d'eux comme secrétaires. Pendant [10] un an, Paul Janet vécut dans son intimité.

Cousin projetait alors une édition des Pensées de Pascal. II y pensait et en parlait sans cesse. Il y fit travailler son jeune secrétaire. Paul Janet racontait quelle frayeur respectueuse il avait éprouvée en sentant, dans sa petite chambre de la Sorbonne, à sa libre disposition, le manuscrit des Pensées, sur lequel il travailla pendant tout l'hiver de 1844.

Au printemps de 1845, M. Cousin entreprit de publier son ouvrage sur le Vrai, le Beau et le Bien. Il fil de son secrétaire un collaborateur ; il l'emmenait en de longues promenades, tantôt dans son jardin de Bellevue, tantôt dans les bois de Meudon, et développait, pendant l'après-midi, les idées que Paul Janet passait ses soirées, et quelquefois ses nuits, à rédiger ; puis le lendemain matin, le travail était soumis à l'auteur qui arrêtait le texte définitif. Cette intimité était intermittente et agitée ; les premiers [11] temps furent pénibles, les contacts rudes, la crainte de subir des emportements continuelle ; il eut quelque peine à s'habituer aux formes solennelles d'une parole qui, au premier abord, semblait apprêtée. En travaillant avec le maître, en le voyant à toute heure, en vivant de sa vie, il sentit que l'éloquence était l'enveloppe naturelle de sa pensée, et ce qui l'avait refroidi, quand il croyait à un art prémédité, contribua à le séduire lorsqu'il comprit qu'il assistait à la production spontanée d'un grand esprit. Le disciple admirait le maître, mais il sentait plutôt le poids que le charme de sa supériorité, et ne prévoyait pas l'attachement qui devait naître plus tard sous l'influence de la plus libre et de la plus affectueuse familiarité.

Il avait vingt-deux ans, lorsqu'en 1845, « affranchi de cette noble et sévère tutelle », il fut nommé professeur de philosophie au collège royal de Bourges. Quitter Paris, aller s'enfouir en province lui causait le plus vif [12] effroi. N'était-ce pas un exil ? et ne serait-il pas sevré de tous les plaisirs de l'esprit ? Une surprise heureuse l'attendait.

Nous sommes très loin de nous représenter la vie intérieure d'une ville de province, il y a un demi-siècle. La rapidité des transports a tout rattaché à Paris, hommes et choses ; elle a effacé les caractères, aplani les reliefs, donné à toutes les sociétés une empreinte parisienne, M. Paul Janet était à Bourges lorsque le premier train de chemin de fer arriva dans la cité de Jacques Cœur. Bourges tenait son rang ; elle était encore la capitale du Berry ; elle était fière de ses renommées de terroir : on pardonnait presque tout à George Sand parce qu'elle jetait quelque éclat sur les mœurs berrichonnes. On parlait beaucoup d'un avocat que l'esprit local opposait à Berryer ; dès son arrivée, le jeune professeur fut présenté à Michel de Bourges ; il fut attiré par cette éloquence passionnée au service d'un esprit généreux ; sans partager ses convictions [13] ardentes, il était captivé par des élans dont « la flamme et l'audace le charmaient » ; il le retrouva souvent, entra dans son intimité ; il lui semblait qu'il se rapprochait des noms qui avaient agi le plus vivement sur sa pensée en l'entendant parler de Lamennais, de Cavaignac, de Lamartine. L'orateur interrogeait le philosophe ; leurs entretiens passaient de Kant et de la philosophie allemande aux problèmes de la politique contemporaine.

Paul Janet était très libéral, très épris de réformes : mais il n'avait en rien le tempérament révolutionnaire. Presque tous les hommes du XIXe siècle ont été élevés au milieu de souvenirs de la Révolution qui ont fait, à leur insu, l'éducation de leur esprit. Telle anecdote a frappé leur imagination d'enfant d'une empreinte que le temps n'a pas effacée. « Ma famille, a-t-il écrit, n'avait rien à regretter de l'ancien régime, mais, dans la bourgeoisie, la Révolution a surtout laissé comme trace le souvenir terrible de 93 et pendant longtemps de la Révolution je [14] ne connus que cela. » Certains récits l'avaient particulièrement frappé. Un jour, son père et ses oncles jouaient gaiement ; leur père, très chaud partisan de la Révolution, entre fort agité, il arrête les jeux : Silence, mes enfants, dit-il d'un ton grave, le Roi est mort ! Puis on lui avait décrit des scènes de Terreur, la vie en quelque sorte suspendue, enfin le réveil, la rentrée de Bonaparte à Paris après la première campagne d'Italie, et surtout le délire d'enthousiasme qui emportait la nation. Il se désolait de n'avoir pas questionné tant de parents spectateurs de la Révolution et de l'Empire ; ces souvenirs, déposés en germe dans son esprit d'enfant, lui donnaient l'éblouissement de la gloire et lui inspiraient en même temps l'horreur des violences qui préparent les dictatures et les rendent inévitables. Il partageait les sentiments des jeunes gens qui arrivaient à l'âge d'homme vers 1840 : comme eux, il souffrait du contraste entre la poésie de l'épopée qui avait ouvert le [15] siècle et la prose au milieu de laquelle ils vivaient. Émotion douloureuse et impuissante de la jeunesse dont l'imagination appelait de grands événements, travaillait dans le vide, écoutait la parole de Lamartine disant : la France s'ennuie, et s'exprimait par la plume de Paul Janet écrivant : « Rien de semblable ne s'est vu de notre temps. Tout paraît terne depuis. Cela explique la révolution de 1848. »

Il était bien placé pour en comprendre le sens ; son ancien professeur, Amédée Jacques, dirigeait la Liberté de penser ; il y avait attiré son élève et Paul Janet, initié par lui au mouvement d'idées qui précéda l'avènement de la seconde République, y publia plusieurs articles.

Ces travaux ne le détournaient pas de ses études. Reçu agrégé des Facultés et docteur es lettres, il avait tenu tout ce qu'espéraient ses maîtres. Aussi était-il nommé, à vingt-cinq ans, professeur à la Faculté des lettres de Strasbourg. Il partait pour sa nouvelle [16] résidence l'esprit tranquille et le cœur joyeux. Sa carrière était assurée et le bonheur venait d'entrer à son foyer. Il n'avait pas cédé à l'attrait d'une rencontre improvisée ; ce jeune philosophe avait fait son choix de longue date : il y pensait depuis quinze années. Ce qui était le rêve d'un enfant de neuf ans était devenu l'idée fixe du jeune homme. Les intelligences les plus fortes ont des âmes simples : elles se donnent sans se reprendre, la constance, fait partie de leur nature, elles sont fidèles aux personnes comme aux idées. Ce roman, dont souriraient les sceptiques, devait se prolonger durant plus de cinquante années, apportant à ce travailleur infatigable cette satisfaction, d'aimer qui est le repos des grands cœurs et faisant luire un rayon de poésie sur une vie uniforme comme le devoir. D'une communauté de réflexions avec un esprit digne de le comprendre émanait un charme intime qui stimulait sa pensée.

[17]

Il était à l'âge où le choix d'un sujet décide souvent de la vie. On se plaît à médire des concours de l'Institut : Proposer un sujet n'est-ce pas l'imposer ? Est-ce ainsi qu'on respecte la liberté de l'esprit ? L'histoire de notre Académie répond victorieusement à ces critiques. Ne parlons que des morts. N'interrogeons que la section de philosophie que Victor Cousin gouvernait alors avec tant d'éclat. Si, en 1835, l'examen critique de l'Organum d'Aristote n'avait pas été mis au concours, un obscur surnuméraire au Ministère des Finances, se serait-il épris d'Aristote ? Aurait-il consacré cinquante années à la publication de trente-cinq volumes contenant une traduction générale ? — Si, en 1857, les principes de la science du beau n'avaient pas été offerts comme champ d'études, un écrivain nous aurait-il donné ce livre attrayant et profond qui a attaché à la science du beau un des confrères que nous avons le plus aimés ? Pouvons-nous oublier l'histoire de la philosophie cartésienne proposée en [18] 1838 ? et l'histoire d'Alexandrie mise au concours en 1841 ?

Comme M. Barthélémy Saint-Hilaire et comme M. Levêque, comme M. Bouillier et comme M. Vacherot, Paul Janet trouva sa voie en écoutant les conseils de nos anciens. Il venait d'assister aux événements de la politique avec une curiosité très éveillée ; il n'était pas de ceux que l'ambition jette sur la scène ; il se contentait d'être un spectateur attentif, étudiant les faits, les analysant, les comparant et se plaisant à remonter aux causes. Dans les révolutions, l'ambitieux cherche l'homme pour s'en servir, l'orateur pour le convaincre, le philosophe pour l'étudier.

Le 3 juin 1848, quelques jours avant les événements qui allaient déterminer le chef du pouvoir exécutif à demander à vos prédécesseurs de collaborer par leurs écrits au rétablissement de l'ordre, l'Académie mettait au concours la comparaison de la philosophie morale et politique de Platon et d'Aristote [19] avec les doctrines des plus grands philosophes modernes sur les mêmes matières : elle demandait aux concurrents l'ensemble des jugements portés par les penseurs qui avaient illustré l'humanité sur les conditions de la vie sociale de l'homme.

M. Paul Janet n'hésita pas à concourir. Délivré des soucis quotidiens d'une classe, il abordait les travaux plus libres d'une Faculté. Pendant quatre ans, il se consacra exclusivement à ce travail. En 1853, l'Académie lui décernait le prix. L'« histoire de la philosophie morale et politique », devenue plus tard l'« Histoire de la science politique dans ses rapports avec la morale », et bientôt couronnée par l'Académie française, est un des titres de notre confrère à la reconnaissance de ceux qui lisent et qui pensent.

C'était à la fois un livre de philosophie, de morale et d'histoire. Ses recherches l'avaient amené à vivre dans le commerce des plus grands philosophes de tous les temps ; il avait recueilli leurs dépositions sur un problème [20] que chaque siècle de l'humanité avait successivement posé et légué au siècle suivant sans avoir pu le résoudre. De cette confrontation de tant de témoignages venus de l'antiquité et des temps modernes sortit un livre largement conçu, ordonné suivant une méthode claire, laissant au lecteur l'impression d'une érudition toujours précise au service d'un jugement toujours sûr.

Il aime l'antiquité grecque, il la comprend et y pénètre ; il nous conduit, avec Platon et Aristote, dans la cité antique à laquelle un maître dans l'art d'écrire l'histoire a su de nos jours rendre la vie. Il analyse l'âme du citoyen où se trouvaient mêlés et comme confondus l'amour des dieux et l'amour de la patrie. C'est à l'ardeur de ce double sentiment qu'était mesurée la valeur de l'homme, s'appelant le courage, le dévouement, la poursuite du bien, noms divers se confondant dans cette qualité qui embrasse tout, qui dit tout et que les anciens exprimaient d'un mot éloquent et complexe : la vertu.

[21]

Platon et Aristote, dont les méthodes sont si contraires, l'un partant de l'idée pure, aboutissant dans le domaine politique aux plus monstrueuses chimères, tandis que, dans l'ordre philosophique, il proclame des règles impérissables, l'autre appliquant aux institutions telles qu'elles existent la méthode d'observation, les analysant avec profondeur, donnant aux politiques de tous les temps des conseils qui seront vrais tant que dureront les sociétés humaines, Platon et Aristote s'accordaient à exiger du citoyen la vertu.

Paul Janet n'hésite pas à condamner Platon lorsque, après avoir proclamé le dogme de l'unité de l'État, il s'empare des enfants, réglemente l'éducation, enfin, par une logique inévitable, crée une poésie et une philosophie d'État protégées par la censure. Jeter toutes les intelligences dans le même moule, faire du législateur l'éducateur universel, soumettre à des méthodes édictées par la puissance publique cette œuvre de liberté qui [22] s'appelle la croissance et le développement de l'esprit, faire en un mot du monopole de l'enseignement un des ressorts de la politique, telle était l'utopie chère à l'antiquité. Notre auteur la condamne d'un mot : « C'était, dit-il, la servitude intellectuelle de l'Orient transportée dans un État grec », et il montre avec force que, pour l'établir, Platon a été amené à sacrifier la famille, à supprimer le mariage, monstrueux attentats contre l'humanité et la raison, suites logiques de la suprématie de l'État, la seule des idolâtries qui, si on en juge par les déclamations qui nous obsèdent, n'ait pas péri avec l'antiquité. Le stoïcisme, en relevant la dignité de l'homme, eut un double honneur ; il inaugura le principe d'une liberté intérieure, contre laquelle venait se briser l'autorité de l'État, et, en inspirant des jurisconsultes qui furent des philosophes, il fonda le droit romain.

Telles étaient les idées du monde antique lorsqu'un souffle nouveau vint rajeunir l'âme humaine. La loi morale que le christianisme [23] apportait au monde modifiait toutes les conditions de la société. M. Janet aurait pu suivre cette révolution dans toutes ses conséquences ; il a préféré se borner ; l'exemple sur lequel il a concentré son étude a une portée qui embrasse tout le développement de notre civilisation. En rendant à Dieu ce qui est à Dieu, à César ce qui est à César, la religion nouvelle créait ce que nulle science politique n'avait jusqu'alors entrevu ; deux pouvoirs, l'un spirituel, l'autre temporel, et proclamait leur légitimité. Elle plaçait l'homme désormais affranchi dans le domaine de la foi en face de l'État dont il était dans l'ordre politique le sujet respectueux ; elle donnait au croyant, ce qui était entièrement nouveau, un sentiment très net des droits de sa conscience. Toute l'histoire des premiers siècles du christianisme en face de l'oppression est brillante des revendications de la liberté. Du jour où la religion et l'État se confondent, reparaît la doctrine d'absolutisme. La confusion des pouvoirs spirituel et temporel, [24] à l'aide de laquelle les derniers empereurs pensaient tout sauver, avait tout perdu. La foi faisait partie de la constitution de l'empire : il n'y avait plus de place pour les âmes libres. Cette conception ne pouvait reparaître qu'avec l'indépendance des deux pouvoirs, distincts l'un de l'autre, vivant d'une vie propre, sans s'ignorer, ni se combattre, ne cherchant ni l'ingérence, ni l'oppression. Équilibre aussi nécessaire que difficile, problème terrible dont la solution tiendra à jamais en suspens la liberté des consciences, dans toute société politique, qu'elle ait à sa tête les empereurs de Byzance, un Henri IV ou un Louis XIV !

Le livre de M. Janet est plein de rayons lumineux qui éclairent l'histoire. Au seuil de nos temps modernes, il rencontre Machiavel ; il pénètre au fond de la doctrine, il en signale l'origine. « La religion, dit-il, gouvernait la politique ; la morale religieuse dominait tout. Le jour où la politique se trouva affranchie, par une réaction violente, elle secoua toute [25] morale. » Que l'homme ait commis des forfaits, nul ne s'en étonne. Ce qui est unique dans les annales de l'humanité, c'est de rencontrer un écrivain qui se plaît à faire la théorie de la cruauté, qui ose professer que la grandeur du crime en couvre l'infamie, qui, adressant les mêmes conseils aux princes et aux peuples, engage les chefs à se défaire de leurs rivaux, les républiques à faire périr jusqu'au dernier gentilhomme, préparant ainsi l'apologie de tous les massacres, donnant des armes à ceux qui devaient concevoir et justifier la Saint-Barthélemy et la Terreur.

Il y a des préceptes plus pernicieux que la doctrine du sang et M. Janet est trop bon moraliste pour ne pas le sentir, c'est la théorie de la mauvaise foi, du mensonge, des trahisons qu'excuserait la raison d'État et, pour tout résumer d'un mot, de la fin justifiant les moyens, doctrines honteuses dont se sont vantés les politiques cyniques et qui ont jeté une ombre sur l'œuvre du [26] maniement des hommes ! Contre elles, M. Janet avait raison de protester : il ne tolérait point qu'on prît pour une ironie la prétention d'établir des rapports entre la politique et la morale ; il croyait fermement que le bien était l'habileté suprême ; il tenait la probité pour la règle inflexible qui dominait les relations entre les particuliers aussi bien qu'entre les nations.

La dernière partie de ce grand ouvrage est consacrée au XVIIIe siècle. Montesquieu et Rousseau le dominent. Fidèle à sa méthode, M. Janet nous montre ce que la science politique doit à l'Esprit des Lois. Il faudrait être bien aveuglé par les découvertes politiques dont notre temps se targue, pour nier qu'en 1750 la conception d'un gouvernement modéré garanti par la séparation des pouvoirs fut un progrès. Quel est l'écrivain qui a flétri avec plus d'éclat l'esclavage, qui a dénoncé avec plus d'indignation l'excès des peines ? Quel est celui dont l'influence, exercée dans le sens de la pitié et de la [27] modération, a agi plus profondément sur son temps ? Il a eu de son vivant des admirateurs, après sa mort des disciples, il a fait école et il a eu cette rare fortune qu'en ayant battu en brèche tous les préjugés, attaqué les idées reçues, préparé plus que personne la ruine des institutions, nul n'a songé ni au milieu de la chute de l'ancien régime, ni après la réaction qui l'a suivie, à faire remonter jusqu'à lui la responsabilité des excès révolutionnaires, tant il y avait de force et de mesure dans son génie.

Tel n'a pas été le sort de Jean-Jacques Rousseau, auquel l'auteur consacre le plus brillant chapitre. En 1853, le rapporteur du concours, M. Barthélémy Saint-Hilaire, n'hésitait pas à le proclamer : « Nous ne connaissons pas, disait-il, une réfutation du Contrat social plus complète, ni plus juste... les critiques n'avaient jamais été réunies dans un ensemble aussi solide et aussi clair. » Il était facile de montrer comment l'aliénation totale de la personnalité humaine [28] au profit d'une puissance composée de toutes les forces individuelles, aboutissait au plus absolu despotisme ; mais l'auteur avait ce mérite de découvrir à travers quelles illusions Rousseau avait été amené, en croyant augmenter la force de l'individu, à le sacrifier entièrement. Ce que Rousseau appelle le souverain, ce composé de toutes les volontés particulières mises en commun, ne peut pas se tromper : juge de l'intérêt de tous, « n'étant formé que des particuliers qui le composent, il n'a ni ne peut avoir d'intérêt contraire au leur ; par conséquent la puissance souveraine n'a nul besoin de garant envers les sujets ». La tyrannie d'un seul, contre laquelle tous les philosophes depuis Socrate jusqu'à Rousseau avaient soulevé les protestations de la conscience humaine, était moins féconde en calamités que cette nouvelle doctrine. Contre un César abusant de son pouvoir, se dresse le recours au peuple. Contre l'État appuyé sur le nombre, soutenant qu'il exprime les volontés [29] individuelles, qu'il est l'émanation du peuple qui ne peut se tromper, il n'existe ni recours, ni appel. L'esprit humain se plaît aux idées simples : qu'y a-t-il de moins compliqué que le pouvoir absolu directement exercé par le peuple ? La conviction que le roi est un tyran soulève la foule ; l'horreur pour le peuple exerçant la tyrannie ne sera jamais une idée populaire. Voilà pourquoi les sophismes de Rousseau étaient tout prêts pour les courtisans du peuple. Le manuel que Machiavel avait destiné aux tyrans, Rousseau l'avait préparé pour la démocratie.

M. Paul Janet avait écrit un livre dont toutes les pages méritaient d'être lues et méditées par les politiques, où tous les vices qui se rencontrent dans la vie publique étaient censurés, les crimes flétris, les idées fausses combattues, sans qu'une défaillance de l'auteur trahît la faiblesse ou la passion. Écrire en des temps troublés deux volumes sur la politique sans hausser le ton, ni baisser la voix, c'est montrer une singulière [30] possession de soi-même, c'est rendre un hommage à la philosophie.

L'homme était là tout entier : il avait commencé ses recherches sous la République ; il poursuivait son œuvre à l'heure où le coup d'État de 1851 donnait à ses convictions le plus soudain démenti. Il l'achevait sous l'Empire. Son attachement à la liberté n'en était pas troublé. Il écrivait à M. Cousin, au commencement de 1852 : « Je me suis remis à mon grand travail, un peu interrompu par les émotions politiques. Ce qui se passe ne changera pas, mais fortifiera, au contraire, ma pensée. Elle est tout entière, comme vous le savez, au libéralisme, que je ne crois vaincu que pour un temps. » À l'heure où M. Cousin, victime de la réaction, était nommé professeur honoraire par M. Fortoul, M. Janet tenait à l'honneur de se montrer fidèle au vaincu en écrivant au philosophe disgracié : « Pour ma part, je suis plus disposé que jamais à me reconnaître votre disciple. »

[31]

Sa vie s'écoulait, à Strasbourg, au milieu d'un cercle de collègues et d'amis bien faits pour maintenir très haut le niveau de sa pensée. Nous en avons connu plusieurs : c'était un groupe studieux, vivant de recherches et de méditations, passant de la salle des cours aux bibliothèques et des archives au laboratoire : Jules Zeller commençait ses travaux sur l'histoire d'Allemagne et d'Italie ; Michel Bréal abordait ses savantes études de philologie ; la Faculté de droit comptait Charles Beudant, Aubry et Rau, qui devaient laisser un nom parmi les jurisconsultes ; la Faculté des sciences avait pour doyen Daubrée, dont les recherches géologiques annonçaient les succès.

Le philosophe était heureux de vivre dans ce monde des intelligences, mais ce qu'il cherchait avant tout, c'étaient les âmes : il se sentit attiré vers un jeune professeur, sorti après lui de l'École normale, voué aux études minéralogiques, ayant le respect et la passion de la science et destiné à jeter [32] sur sa patrie et sur son siècle un rayon de gloire, il l'interrogea, recueillit sa pensée en de longs entretiens. Il était fier de dire, vers la fin de sa vie, qu'il lui devait non seulement ce qu'il savait en ces matières, mais le goût des idées et des méthodes scientifiques. En approchant de Pasteur, il avait éprouvé l'attraction qui émane des esprits supérieurs. Un des premiers, le psychologue avait découvert l'homme au delà et au-dessus du savant.

Dès son arrivée à la Faculté, Paul Janet avait été accueilli par un auditoire qui n'avait cessé de s'accroître. Il ouvrit son cours en 1849 en exposant l'histoire des doctrines morales et politiques. Jamais le public ne s'était pressé si nombreux autour d'une chaire de philosophie et sa réputation franchit rapidement les limites de la province. Loin de chercher le bruit et de négliger ses devoirs, il se plaisait à les multiplier : il lui arrivait de réunir, en un petit cercle d'études, les auditeurs les plus laborieux, pour traiter [33] des principaux problèmes de psychologie ; ni ses cours, ni la préparation de ses livres ne l'empêchèrent de rassembler chez lui les candidats au professorat ; il estimait que sa charge n'aurait pas été remplie s'il ne s'était pas adressé aux étudiants de tous ordres.

La Faculté de Strasbourg attachait beaucoup de prix à étendre son action et à agrandir son auditoire : on demanda en 1855 à M. Janet de donner, dans la grande salle de la mairie, une série de leçons : il choisit pour sujet la Famille. Le succès dépassa toute prévision : ce fut un triomphe. Journaux et correspondances en apportèrent l'écho jusqu'à Paris : le public fut ému et charmé ; ses auditeurs ne tarissaient pas d'éloges, non seulement sur la solidité du fond, mais sur les merveilleuses qualités d'une parole aussi claire qu'élégante, aussi sobre que généreuse. « L'originalité de ces leçons, a dit un des meilleurs juges, consistait à partir du vrai, du simple, du naturel, et à rencontrer la beauté et la poésie par la [34] seule analyse, délicate et profonde, de cette vérité même. »

On se plaît à dire que la réflexion refroidit les élans du cœur et de l'imagination, rien n'est plus faux ; le scepticisme critique les glace ; l'observation simple et loyale les confirme. Entre vingt-cinq et trente ans, M. Paul Janet, au sein de la vie la plus heureuse, entre sa jeune femme et les enfants qui venaient au monde, appliquant sa pensée aux objets de son affection, décrivait tout naturellement la famille, étudiait les raisons de son bonheur, et concevait peu à peu ce beau livre qui porte un nom digne de tous les respects : mari et père, il était fait pour comprendre et faire aimer la Famille.

En abordant un problème à la portée de tout le monde, le jeune professeur abandonnait-il la philosophie ? Il pressentit le reproche et s'en défendit vivement. « L'antiquité, dit-il avec justesse, à laquelle il faut toujours revenir en philosophie, était bien loin d'avoir nos scrupules ; elle ne renfermait pas la philosophie [35] dans l'école... » Il s'en prenait à l'Allemagne : « Quelques métaphysiciens intraitables soutiennent en ce pays que les moralistes qui se sont appliqués à la description des mœurs et des caractères, à l'analyse des passions et des vertus, ne sont point des philosophes. Mais je voudrais savoir quel intérêt la philosophie peut avoir à exclure de son sein précisément les hommes qui lui font le plus d'honneur, qui lui gagnent le plus d'esprits, et dont les idées ont le privilège d'être comprises et goûtées de tout le monde. Est-cc à dire que la philosophie tienne à honneur de ne point se laisser comprendre et devons-nous considérer comme des traîtres ceux qui abaissent ses doctrines jusqu'au point de les rendre utiles ? »

De nos jours, les rêveurs se sont donné carrière en reconstituant à leur fantaisie la société. Il est une institution qu'ils ne pourront jamais renverser. La famille n'est pas un vain édifice élevé par le législateur : elle repose sur le droit naturel. Impuissants à [36] la bouleverser, les utopistes cherchent à l'atteindre en limitant l'autorité du mari, en éveillant contre lui les défiances, en excitant la passion, en appelant les femmes à la révolte. Remettre chacun à sa place, montrer que l'autorité du chef est fondée sur la nature, que la femme, sa subordonnée dans l'ordre du droit, est son égale dans l'ordre moral, peindre « cet heureux équilibre d'une raison étendue, profonde, vigoureuse et d'une raison vive, fine et délicate », exposer comment l'un « conçoit les grands plans et voit le but, comment l'autre saisit les détails et les moyens », donner au mari un sentiment supérieur de sa responsabilité, l'élever sans abaisser la femme, assurer à chacun son domaine dans une harmonie que développe et complète la naissance des enfants, rassembler ainsi les devoirs de l'homme et prouver que tous se rencontrent dans la famille ou par elle, « qu'elle est l'idéal de l'amour, parce que seule elle garantit la fidélité qui en est l'âme », telles étaient les idées [37] maîtresses d'un livre qui donnait aux époux aussi bien qu'aux parents la plus haute leçon de philosophie.

Dès que le livre parut, l'Académie française le couronna.

Un prix décerné par l'Académie, quelques lignes d'un rapport de M. Villemain, suffisaient à signaler le lauréat ; on pensa à le rappeler à Paris. Il ne quittait pas sans regrets Strasbourg ; il avait trouvé en Alsace des intelligences fermes et douces, une race de cœurs élevés et fidèles, de vrais Français ayant toutes les qualités de notre nation, ignorant l'intolérance et la haine, et n'usant de leur voisinage de la frontière que pour servir d'interprète et de lien entre la pensée de la France et celle de l'Allemagne. « Aujourd'hui, écrivait-il à la fin de sa vie, nous ne pouvons plus prononcer le nom de Strasbourg sans un sentiment de douleur. Après avoir habité cette ville pendant huit ans j'ai fini par l'aimer de cœur et je n'y puis penser sans tristesse. C'est un morceau de la patrie [38] perdue ; c'est une partie de nous-mêmes. » Il avait vu de près la vie de province ; il lui avait semblé que « l'âme y était plus libre et plus désintéressée ; qu'il lui restait plus de temps pour penser, pour rêver et pour aimer ; qu'elle y aspirait moins au nouveau qu'au vrai ». [2]

En descendant d'une chaire de faculté pour accepter une classe de logique au lycée Louis-le-Grand, en échangeant le retentissement d'un cours attirant les intelligences contre la vie silencieuse d'un professeur de lycée, un ambitieux aurait cru déchoir. Paul Janet avait une conception si élevée de l'enseignement, qu'il n'eut pas une heure de déception. Ses élèves en ont témoigné ; groupés autour de leur jeune professeur, aimant en lui son âge rapproché du leur, admirant sa parole souvent éloquente au service d'une pensée toujours claire, d'une méthode rigoureuse, ils voyaient, à travers [39] tant de rares qualités, ce mérite supérieur qui fait un maître : la conscience. Le philosophe — et c'est son incomparable grandeur — ne se borne pas à enseigner des notions qu'il a reçues et qu'il transmet ; il se donne lui-même ; il doit avoir la foi philosophique et aimer ses élèves. S'il ne croit pas au fond de son âme que son enseignement est appelé à transformer ceux qui l'écoutent, s'il n'a pas la conviction que l'homme sans philosophie est destiné à être le jouet de ses passions, et à devenir dans la vie un instrument stérile ou dangereux, s'il n'est pas persuadé qu'après une année d'études communes, peut naître, grâce à lui, dans les jeunes esprits que pénètre sa pensée, l'idée de devoir, l'idée de responsabilité ct que par elles seules l'enfant devient un homme, l'homme un citoyen probe et libre, si le maître n'a pas en lui cet enthousiasme et cette foi, s'il doute, non avec Descartes, mais avec Pyrrhon, s'il critique non avec Kant, mais avec Voltaire, s'il remplace une conviction absente par des traits [40] d'esprit, s'il se plaît non à édifier, mais à détruire, il n'est pas digne d'enseigner, de monter dans une chaire de philosophie.

La reconnaissance de ses élèves montra tout ce que Paul Janet avait su leur donner.

La réputation du professeur avait franchi les murs du lycée ; aussi nul ne fut surpris quand, en 1862, Garnier, malade, demanda à Paul Janet de le suppléer dans sa chaire de la Sorbonne. Son début fut un succès. S'attaquant, non sans courage, au problème de la théodicée, il exposait avec franchise les objections ; à ceux qui la traitent de science immobile et vieillie, il montrait les erreurs réfutées, les théories condamnées, toute cette évolution qui pour une science est le signe décisif de la vérité et de la vie. Il ne s'étonnait d'aucune critique et sa parole toujours vive, sa réplique toujours prête les réfutait avec esprit. L'accusait-on de soutenir une théodicée d'ancien régime ? il demandait si à la folie de la tradition, il convenait de substituer [41] la folie de l'innovation. Déclarait-on que la théodicée spiritualiste était une doctrine populaire, vulgaire et nullement scientifique ? il répondait qu'il était prêt à subir tous les outrages et qu'il savait que la plus grande insulte qu'on pût faire à un philosophe, c'était de dire de lui qu'il avait le sens commun. Ses raisonnements aussi bien que ses critiques témoignaient d'un esprit libre et convaincu qui n'étant asservi à aucun système, était compétent pour juger avec autorité les doctrines parce qu'il les avait toutes pénétrées. La contradiction ne l'effrayait pas. C'est la grandeur des sciences morales et surtout de la philosophie d'être perpétuellement débattues parce que la volonté de l'homme y a sa part, parce que dans le jugement la responsabilité et la liberté interviennent.

Les auditeurs étaient captivés par la vivacité et la franchise de sa pensée ; ils le suivaient sans effort dans ce monde des idées où son intelligence les faisait pénétrer ; ils [42] l'écoutaient et s'étonnaient eux-mêmes de comprendre aisément ce qui leur avait semblé jusque-là si obscur ; de tous les mérites du professeur, celui qu'il mettait au premier rang, qu'il exigeait des autres et qu'il recherchait pour lui-même, c'était la clarté, vieille qualité française, « héritage national que nous avons le devoir de conserver et de transmettre à nos descendants », [3] qui est le fondement de l'autorité scientifique, parce qu'elle est loyale, lucide et franche comme notre race.

Les débuts de son cours ne l'empêchèrent pas d'achever un livre qui était le fruit de longues méditations. Ce que des penseurs avaient déjà tenté, ce que Franklin avait cherché en enseignant l'art d'être vertueux, le but que Droz s'était proposé en étudiant l'art d'être heureux, M. Janet voulut l'atteindre en exposant « la Philosophie du bonheur ».

[43]

Jamais, dans aucun de ses écrits, Paul Janet n'avait pénétré plus profondément dans les secrets du cœur humain. La vie est-elle un bien ? Après avoir pesé rigoureusement les beautés et les misères de l'existence, railleur se déclare pour la solution optimiste. Oui, la vie est un bien incomparable, mais la condition du bonheur, c'est « le déploiement énergique et libre de toutes les forces de l'âme ». Le vrai problème est donc de savoir comment faciliter le développement de toutes ces facultés. L'auteur passe en revue les manifestations de l'intelligence et du cœur : il juge sévèrement l'égoïsme des passions, leur emportement, la vie de tempête, comme l'appelle Pascal, et montre l'épanouissement de nos forces multipliées par toutes les formes des affections, amour et amitié, qui transfigurent l'homme. « Ce n'est pas seulement au nom d'une philosophie généreuse qu'il combat la doctrine de La Rochefoucauld : c'est du spectacle même de la vie qu'il fait sortir la [44] réprobation de l'égoïsme. » [4] Il décrit tous les sentiments dont elle est embellie et il exprime son enthousiasme pour toutes les ardeurs de la volonté en reprenant ce mot de Tocqueville : « La plus grande maladie de l'âme, c'est le froid. » Si le cœur nous charme, que de joies sereines et profondes nous apporte la pensée ! c'est le bonheur idéal, puisqu'elle nous initie à la vérité à tous les degrés et qu'elle nous conduit à « l'amour de Dieu, le sentiment le plus élevé de tous nos amours ».

M. Janet suit l'homme dans la vie privée, comme dans la vie publique ; partout il rencontre l'activité comme l'unique condition du bonheur, non la vie agitée, mais l'activité se proposant un but précis et certain, ayant de la suite et de la persévérance, sentant qu'elle progresse et se développe ; il s'élève avec force contre toute doctrine qui met la société en tutelle, qui « dispense l'homme [45] de la responsabilité par une fausse et humiliante sollicitude, supprime ou restreint la liberté ». C'est contre cette fausse notion du bonheur, dit-il fièrement, que tout notre livre est dirigé. Doctrine aussi funeste aux hommes qu'aux sociétés, paralysant l'initiative du citoyen, épuisant la richesse de l'État, faisant de l'un, un instrument inerte, de l'autre, une puissance monstrueuse et destinée, si jamais elle devait triompher, à entraîner leur ruine mutuelle !

Le rôle de l'imagination dans le bonheur n'avait jamais été plus heureusement analysé. La démonstration est décisive : « C'est l'idée, c'est l'espérance, dit-il, c'est la vue anticipée du succès qui enflamment les hommes et leur font affronter tous les obstacles ; cette sorte de demi-enivrement est la condition impérieuse de l'inspiration et du travail. Les grandes hypothèses d'où naissent les grandes théories sont filles de l'imagination », et il n'hésite pas à proclamer [46] que cette faculté maîtresse est en tout la force motrice de la vie.

Ce livre puissant et fécond, ingénieux et vrai, aussi ferme qu'éloquent, présentant un heureux mélange de mesure et d'ardeur, ayant ce mérite rare de donner, à celui qui le médite, la paix et l'espérance, le courage et l'élan, mettait au premier rang des moralistes M. Paul Janet que l'Académie française couronnait pour la troisième fois.

L'Académie des Sciences morales et politiques, qui n'avait pas cessé de suivre son lauréat de 1853, l'appela dans son sein le 13 février 1864. [5]

Quatre mois après, il était nommé, en remplacement de Saisset, professeur d'histoire de la philosophie.

Quel était alors l'état véritable de la philosophie ? Le spiritualisme, jadis maître absolu [47] des chaires, subissait le sort de toutes les doctrines dont le règne avait été longtemps incontesté ; les jeunes gens, usant comme toujours de leur indépendance pour aller à de nouveaux systèmes, s'éprenaient des formes d'un positivisme rajeuni qui leur semblait en harmonie avec les découvertes scientifiques si bien faites pour exalter leur imagination. À voir ce dédain du passé, cet affranchissement de ce qu'on appelait les théories classiques, cet enthousiasme pour les sciences dont les progrès allaient, disait-on, tout changer en peu de temps, il était permis de prévoir une rupture entre la science et le spiritualisme.

En même temps arrivait d'Allemagne un souffle nouveau, mélange singulier de métaphysique et de matérialisme.

C'est contre ces deux adversaires, les positivistes et les métaphysiciens de l'école allemande, que M. Janet, décidé à garantir la liberté des recherches scientifiques, résolut de défendre le spiritualisme. Tel fut l'objet [48] du livre qu'il consacra en 1865, à la Crise philosophique ; tel fut le but qu'il se proposa dans ses cours et qu'il assigna à ses écrits.

Ce qui appartient en propre à Paul Janet, c'est la place qu'il choisit et qu'il entendait occuper dans la lutte. Fidèle aux maximes de la dialectique platonicienne, il appliqua tous les efforts de son esprit à chercher si ses adversaires n'auraient pas une parcelle de vérité ; de ce rigoureux examen, son impartialité tira des lumières ; il arriva ainsi à une doctrine très personnelle qui inspira toute son œuvre philosophique. Il demeura fidèle au spiritualisme, fondement de ses plus intimes convictions, mais il entendit assurer désormais à cette doctrine sa pleine indépendance.

La nouvelle école accusait la philosophie classique d'avoir été la servante des pouvoirs établis, d'avoir accepté en quelque sorte un rôle et une fonction officielle, d'avoir professé que sa valeur se mesurait à ses conséquences pratiques et sociales. De là à estimer [49] la vérité d'une doctrine suivant le profit qu'en tirait la politique, il n'y avait qu'un pas. C'était lier ce qu'il y a de plus élevé, ce qu'il y a de permanent dans la conception des destinées humaines à ce qu'il y a de plus fragile et de plus contingent.

M. Paul Janet rompit avec ces maximes : suivant lui, le philosophe digne de ce nom cherche la vérité en elle-même, abstraction faite de son utilité ; sa mission n'est pas d'assurer l'ordre dans la cité, de régler les conditions de la vie publique ; il poursuit le vrai en soi, assuré que la vérité ne peut jamais, en aucun cas, nuire à personne. Il transportait du coup la philosophie dans une sphère supérieure et l'affranchissait des passions comme des vicissitudes des partis.

En guerre, pendant le cours du XVIIIe siècle, avec l'idée religieuse, la philosophie avait été longtemps un adversaire sans merci ; au XIXe siècle, il semblait qu'elle eût cessé la lutte, le désarmement était devenu un traité de paix. M. Paul Janet observait, non sans [50] alarmes, l'effet sur les jeunes esprits de cette alliance, qui était tenue pour une abdication de la pensée libre ; ce lien lui semblait non moins fatal à l'essor des idées que la chaîne des partis politiques ; il voulait « faire rentrer le spiritualisme dans le giron de la philosophie, le délivrer de tout patronage artificiel, empêcher qu'il parût une branche de l'orthodoxie religieuse, lui ôter l'apparence d'un parti pris, le réconcilier avec le libre examen, la critique, l'esprit nouveau, afin que la philosophie cessât d'être considérée comme une ancilla theologiæ ». [6]

M. Paul Janet était très frappé des caractères et des découvertes des savants de notre temps ; il applaudissait au rapprochement de la philosophie et des sciences, il avait suivi avec attention les progrès de la psychologie expérimentale ; ses sympathies accompagnaient les efforts des jeunes gens, ouvrant des voies nouvelles aux investigations, [51] appliquant à des domaines jadis inexplorés toutes les formes du libre examen ; il encourageait ses disciples à étudier les branches les plus diverses du savoir, mais à la condition qu'ils revinssent de ce voyage de découvertes, plus fidèles que jamais à la philosophie ; médecins ou chimistes, mathématiciens ou physiciens, ils devaient rapporter de leurs études préparatoires des faits accumulés, des exemples, des lumières de vérité, mais ne pas demeurer des transfuges, hésitant entre deux voies, n'en embrassant aucune, prêts à subordonner la philosophie. Paul Janet n'avait pas cherché à l'affranchir de la politique ou de la théologie pour en faire une ancilla scientiæ.

Considérée sous ce triple aspect, l'œuvre à laquelle il s'est voué prend tout son caractère ; on en voit la portée. Ceux mêmes qui en ont parfois souffert, qui ont été effrayés de ses hardiesses, étaient contraints de reconnaître que cette entreprise était très fière : elle était inspirée par un profond [52] sentiment de la grandeur de la philosophie et le souci de son indépendance.

Qu'il étudie les « Problèmes du XIXe siècle », qu'il analyse « le Cerveau et la Pensée », ou expose dans son ensemble la « Philosophie française contemporaine ». M. Paul Janet continue avec la même persévérance et poursuit, sous les différents aspects, sa réfutation du matérialisme, sa démonstration de la réalité de l'âme et de Dieu. Son enseignement, durant trente-cinq années, dans sa chaire de la Sorbonne, fut consacré aux mêmes doctrines.

Il lui sembla qu'il n'avait pas donné sur la morale sa pensée tout entière ; il voulut ne laisser subsister ni obscurité, ni équivoque. Il n'admettait pas, comme Épicure ou comme Spinoza, que la morale fût la poursuite du bonheur ; il ne voulait pas non plus que l'appât des récompenses portât atteinte à l'idéal en l'abaissant. Elle était, à ses yeux, la science du devoir, la recherche de la perfection, c'est-à-dire la vertu du [53] désintéressement et du sacrifice. Paul Janet avait trop de loyauté envers lui-même pour reculer devant le problème qui, de nos jours, domine la morale ; peut-elle être indépendante de l'idée de Dieu ? Il n'hésitait pas à répondre qu'il n'existe « qu'un moyen de fonder une morale absolument indépendante de toute métaphysique, c'est de proclamer la doctrine du plaisir ou de l'utilité ». Alors, la morale cesse de commander ; elle devient un art servile, un calcul d'habileté. La loi morale n'était pour lui ni une convention arbitraire, ni une abstraction, mais une réalité voulue et maintenue par un être supérieur qui est la perfection du bien, qui est la cause et la fin de tout, « S'il n'y a, dit-il excellemment, nul être qui aime les hommes et qui m'aime moi-même, pourquoi suis-je tenu de les aimer ? Si le monde n'est pas bon, s'il n'est pas fait pour le bien, si le bien n'est pas son origine et sa fin, qu'ai-je à faire ici-bas, et que m'importe cette fourmilière dont je fais partie ?... Il faut que je puisse [54] dire : Adveniat regnum tuum. Comment le pourrai-je, s'il n'y a pas un Père qui, en nous confiant le soin de faire arriver son règne, l'a rendu au moins possible en faisant le monde ? » [7] Il proclamait ainsi que la morale étudiée sans parti pris conduit nécessairement à reconnaître une cause morale du monde, c'est-à-dire l'existence de Dieu.

Ni ses travaux, ni ses méditations philosophiques ne l'absorbaient entièrement ; les problèmes politiques dont il avait, naguère, étudié l'histoire, lui semblaient, après la métaphysique et la morale, les plus dignes d'occuper sa pensée ; il en cherchait la solution dans le passé comme dans le présent et ne cachait pas ses convictions, sans jamais chercher à en tirer profit ou bruit. Il vivait au milieu d'amis qui jugeaient sévèrement un régime de silence et aspiraient « à la liberté, principe de tout progrès » ; il n'avait publié aucun écrit retentissant, mais quand [55] l'occasion s'était offerte, il n'avait pas craint d'affirmer, en 1863, avec l'indépendance du philosophe, que rien n'était plus contraire au développement de l'activité et de l'énergie personnelle qu'un « mécanisme dans lequel les particuliers étaient engrenés par autorité publique » ct qui était « confié à la direction d'un moteur irresponsable ». [8] Aussi, toutes les sympathies de son intelligence et de son amitié allaient-elles vers les hommes qui, en 1871, autour de M. Thiers, entreprenaient, après nos désastres, la tâche de relever la France ; il était avec eux en commerce d'intimité. M. Jules Simon s'était formé un conseil composé d'universitaires qu'il aimait à consulter. Paul Janet en faisait partie et jouissait vivement de cette collaboration intellectuelle.

La seule fonction nouvelle qu'il accepta dans cette période de sa vie, lui vint d'une institution sans précédents en notre pays, [56] créée par l'initiative hardie d'un homme, sorte de faculté libre, travaillant pour l'État sans lui rien demander, n'attendant de lui aucune subvention et lui offrant ce que le gouvernement avait, naguère, tenté sans y réussir, des candidats spécialement instruits et préparés aux fonctions administratives et diplomatiques, centre d'enseignement supérieur où les jeunes gens venaient apprendre, en écoutant les maîtres les plus distingués de leur temps, à devenir des citoyens actifs, capables de s'associer à la mission des gouvernants et de la comprendre. Celui qui fondait en 1812 l'École des Sciences politiques avait un trop profond discernement de la valeur intellectuelle pour ne pas faire appel avant tout autre à l'écrivain qui s'était consacré avec éclat à leur histoire. Ceux qui m'écoutent et qui ont été, dès le premier jour, l'honneur de cette école, savent ce que furent ses leçons. À un enseignement nouveau il voulut apporter des études nouvelles. Ses auditeurs en eurent les prémisses. Ses [57] cours devinrent des livres. En quelques années, il publia Saint-Simon et le Saint-Simonisme, des fragments sur Fourier, puis, remontant aux origines du socialisme contemporain, sur Babeuf.

Il passait ainsi en revue les idées politiques au XIXe siècle, ajoutant en quelque sorte à son grand ouvrage des fragments qui en préparaient la suite. Entre les dernières pages de L'Histoire de la science politique, qui s'arrêtait en 1788, et les époques contemporaines, il avait jusqu'alors omis le problème qui obsède à bon droit l'âme de la France. Quel est le sens de la Révolution française ? Quelle est sa philosophie ? Qu'en ont pensé les témoins et les juges ? Paul Janet résolut de les interroger en suivant l'ordre des temps. Les premiers qui en ont parlé sont des étrangers, comme si le tourbillon des passions avait enlevé aux acteurs le temps de réfléchir : c'est Burke qui, ne distinguant dans les événements que la tradition, voit avec horreur une nation faire table rase du [58] passé ; c'est Fichte, au contraire, « tout plein de cette ivresse idéologique et spéculative dont l'Allemagne s'est bien guérie depuis », qui, saisi d'enthousiasme, croit que la philosophie réglant désormais les affaires de ce monde, l'humanité sera à jamais affranchie ; c'est Joseph de Maistre épouvanté des crimes, ne jugeant la Révolution qu'à travers un voile sanglant, et se sentant tellement dépassé par l'immensité du mal que, pour l'expliquer, il évoque toutes les forces du ciel et de l'enfer.

À ceux qui avaient tout approuvé ou tout maudit, le philosophe oppose les juges qui ont conservé leur esprit libre : avec le sage Mounier, avec Mme de Staël, il nous montre l'ancien régime condamné, le droit pour un peuple de se donner une constitution revendiqué et les forfaits des révolutionnaires flétris. M. Janet dresse ainsi l'image de la Révolution et l'éclaire sous toutes ses faces à la lumière de tous les grands esprits qui ont tenté d'en expliquer la nature. Il n'y a [59] rien de plus poignant dans la littérature historique que cet effort prolongé pendant trois générations, sous la royauté absolue, sous la monarchie constitutionnelle, sous deux empires et sous trois républiques, effort qui n'a pas encore atteint son terme, pour tirer du formidable torrent où ont bouillonné toutes les conceptions d'une nation surexcitée les idées maîtresses, qui, comme un fleuve paisible, doivent servir un jour, quand le peuple sera plus instruit, à diriger et à porter les sociétés.

M. Paul Janet n'hésite pas à clore sa laborieuse enquête en proclamant que ce qu'il faut condamner dans la Révolution, ce ne sont pas les principes, mais les moyens. Conclusion d'un sage et que confirment avec éclat les événements ! Un siècle d'expérience a démontré que nos libertés n'étaient pas des abstractions, mais le besoin de tout peuple civilisé, que la Déclarations des Droits renfermait l'essence de principes salutaires. Heureuse leçon, si nous savions y ajouter ce [60] que nous ont enseigné nos fautes ; les échecs répétés de nos constitutions viennent de ce que les gouvernements issus de la Révolution, ayant tous le culte de la force, ont cru que l'autorité morale, la seule qui conduise les hommes, venait d'elle, ont parlé du droit sans le respecter, sans lui donner le dernier mot, et se sont imaginé qu'ils abdiqueraient s'ils ne réservaient pas au pouvoir exécutif la faculté de le violer ; ils n'ont pas compris qu'il n'existait pas, en politique, d'œuvre plus chimérique, en droit constitutionnel, de construction plus factice, que d'inscrire dans des textes de lois des libertés, sans accorder aux citoyens des garanties, provoquant ainsi un duel sans issue entre l'État ayant la force, l'individu le droit dépourvu de sanction, et perdant de vue que l'idée de devoir et de responsabilité, absente de l'éducation des citoyens et des peuples dont elle devrait être l'objet unique, serait seule capable d'établir enfin l'équilibre.

Dans toutes ses études d'histoire, Paul Janet [61] avait une pensée qui guidait et dominait son esprit ; les relations de la morale et de la politique. Ce que voulait l'homme, comment il concevait les faits sociaux, le rôle de sa volonté, la nature de ses efforts, sa personnalité, d'où découlent ses droits, voilà ce qui touchait le philosophe ; il aimait à analyser un caractère, à pénétrer dans les replis du cœur humain, à reconstituer la pensée d'un homme ; il a semé autour de lui des notes, des esquisses, parfois des portraits qui sont exquis. Ce que recherchait Janet dans son modèle, ce n'était pas la ressemblance des traits, c'était « l'âme de sa physionomie ». Il excellait à faire revivre ceux qu'il avait connus ; il n'y avait rien de banal dans ses éloges. Le ton était juste et la sincérité absolue. De tous ceux qui ont passé depuis trente ans dans notre Académie, en est-il un seul qui ait été plus aimé de nous tous, plus apprécié dans l'intimité, plus défiant de lui-même et plus digne d'être loué que Constant Martha ? La notice que Janet [62] consacra à notre confrère est un chef-d'œuvre de grâce, de finesse, d'émotion tendre et vraie. Rien de plus touchant que la peinture de ce caractère entrevu à travers la plus vive amitié. Quel est celui d'entre nous qui, en lisant ces pages destinées à l'École normale, ne retrouve cet esprit supérieur, cet écrivain incomparable, auquel n'a manqué, pour monter au premier rang, qu'un peu plus de hardiesse et ce savoir-faire qui est le génie des médiocres ? En mettant son ami au niveau qu'il aurait du occuper, Janet se montrait, une fois de plus, moins soucieux du succès que fidèle à la morale.

Celui qui avait été son maître, Victor Cousin, était mort depuis vingt ans. II crut que l'heure était venue de juger son action. Le prestige n'était plus qu'un souvenir. Les uns avaient attaqué avec passion sa mémoire ; d'autres en avaient parlé avec esprit et malice ; d'autres enfin avec une admiration sans réserves. Il se sentait assez d'indépendance pour faire la part des critiques et des [63] louanges. Il lui semblait que le seul hommage digne d'un philosophe était la liberté dans le jugement. Il définit nettement la grandeur de l'œuvre de Cousin, et en marqua les lacunes, consacrant ainsi à l'histoire de la philosophie au XIXe siècle une page que lui seul pouvait écrire.

Ni ses méditations philosophiques, ni ses études d'histoire politique ne l'absorbaient exclusivement. Il avait un goût très vif pour l'histoire littéraire. Ses lectures étaient très variées ; il ne mettait pas de fausse honte à cacher son amour pour les romans. Lorsque arrivait l'été, ce Parisien de naissance échappait avec bonheur au fracas de la ville. De sa petite maison de Forges, il gagnait les bois, un livre à la main ; c'était Walter Scott auquel il demeura fidèle, et qu'il relisait jusqu'à la fin de sa vie ; c'étaient des mémoires, des correspondances se rapportant aux deux siècles qui l'avaient précédé et surtout au XVIIe siècle. Il lisait par plaisir, comme délassement d'esprit, sans but arrêté ; mais son [64] intelligence était trop active pour que le crayon et bientôt la plume ne se missent pas de la partie. En vain s'était-il promis de ne pas écrire de toutes les vacances. Le besoin de résumer sa pensée, de la fixer, de discuter avec soi-même un problème, remportait sur tous les serments. Qui de nous lui reprocherait ces innocents parjures ? Nous leur devons des pages charmantes, mais trop dispersées, dans la Revue des Deux Mondes et dans les profondeurs inaccessibles du Journal des Savants. Le lecteur y reconnaissait l'érudit et le psychologue qui le conduisait de Pascal à Fénelon, de Retz à La Rochefoucauld, de Molière à Bossuet, de Mme de Grignan à Mme de Maintenon et le ramenait, à travers Montesquieu et Rousseau, vers les temps modernes pour y retrouver Lamartine et Prévost-Paradol. Que de fragments à peine connus dont la réunion serait précieuse ! Que de découvertes à faire en sa compagnie dans cette immense série d'études ! Qu'il vive familièrement avec Descartes ou pénètre dans [65] la pensée de Malebranche, qu'il suive l'influence de Spinoza en Allemagne et en France, qu'en analysant la philosophie anglaise, il expose l'œuvre de son historien, M. de Rémusat, qu'il passe de Swedenborg à Diderot, de Kant à Maine de Biran, il nous guide avec une égale sûreté et nous laisse une impression aussi juste que forte sur ceux qu'il appelle heureusement « les maîtres de la pensée moderne ».

À ses yeux, toute la mission du philosophe était l'éducation des hommes. Ce qu'il avait poursuivi dans ses chaires de Bourges, de Strasbourg et de Paris, il entendait le continuer au Conseil supérieur de l'Instruction publique. Il y siégea depuis 1880, comme délégué de la Faculté des lettres ; il fut rapporteur des projets concernant l'enseignement de la philosophie dans les plans d'études de 1880 et de 1885. Il estimait qu'elle était indispensable à la formation de l'esprit ; il sut le dire avec une hauteur de vues et une fermeté de doctrines qui décidèrent du succès.

[66]

Ceux qui aujourd'hui défendent les éludes philosophiques en péril ne peuvent-ils pas se demander ce qui fût advenu si, dans le sein du Conseil supérieur, il y a vingt ans, ne s'était élevée cette voix écoutée de tous ? Le langage que tenait alors M. Janet est de tous les temps. S'il est vrai que la philosophie est une méthode de penser, si, bien enseignée, elle donne à la conception plus de force, à la conscience plus de certitude, au raisonnement plus de rigueur, à l'homme un sentiment plus net de sa responsabilité, si, comme la sagesse et la modération qui ne se peuvent séparer, elle sait apaiser les haines et ne favorise qu'une passion, celle du bien et du vrai, si elle apprend au jeune homme, au terme de ses études, avant de se lancer dans la vie, comment s'accomplissent, sans souci des sacrifices, les devoirs envers la famille et la cité, envers Dieu et la Patrie, n'est-il pas permis de se demander de quelle présomptueuse légèreté sont atteints les hommes qui croiraient en [67] notre temps cette étude un luxe inutile ?

Entre son cours consciencieusement poursuivi à la Faculté des lettres, ses travaux académiques, les rapports que multipliait la confiance affectueuse de ses confrères, sa vie s'écoulait très régulière et très pleine. Celui qui, à vingt-cinq ans, avait parlé avec tant de talent de la famille, en avait deviné le charme ; non seulement il avait écrit un beau livre, mais il avait reçu sa récompense ; la destinée avait voulu qu'il pût goûter toutes les joies du foyer. Il était né pour les éprouver et les faire sentir autour de lui. Tout ce qu'il refusait à la vie publique, il le réservait et le prodiguait aux siens ; un cœur confiant, une bonté naturelle, un esprit qui se portait sur tout, pour animer sans jamais blesser, une intelligence qui se prêtait à tous les sujets et à tous les âges, n'étaient-ce pas des traits qui composent un caractère fait pour inspirer la plus tendre affection et répandre autour de soi le bonheur ?

[68]

Un jour vint où toutes ces joies intimes eurent leur couronnement. L'union qu'avait ardemment souhaitée cinquante ans auparavant le jeune homme, qui avait réalisé et dépassé tous ses rêves, allait être renouvelée en présence des enfants et petits-enfants. Les noces d'or couronnant après un demi-siècle un mariage d'amour, ne sont-elles pas la plus grande bénédiction d'une famille ? Qui la méritait plus que notre confrère et celle qui avait partagé ses travaux et sa vie ? Leurs treize enfants et petits-enfants se pressaient autour d'eux, empruntant aux fragments tirés de la Famille la peinture d'une existence unie et heureuse. Le livre et la vie étaient issus de la même inspiration.

Celle fête devait précéder de bien peu le déclin d'une santé, jusque-là si forte. C'était le soir d'un beau jour, les derniers feux du couchant.

Il n'avait pas attendu l'affaiblissement de ses forces pour publier un dernier ouvrage dans lequel il avait concentré sa pensée. Il [69] aurait voulu laisser après lui un cours complet et développé qui aurait embrassé toute la science. Lorsqu'il était monté dans la chaire de philosophie de la Sorbonne, après la mort de son confrère et ami Caro, il avait fait cette promesse solennelle, annonçant qu'en dix années, il élèverait ce monument définitif. Il avait trop présumé de ses forces. Il ne put publier qu'une partie de son cours. Les Principes de métaphysique et de psychologie, professés de 1888 à 1894, parurent en 1897.

« Ce livre, dit-il, est en quelque sorte mon testament philosophique... Il y a aujourd'hui cinquante-six ans que j'ai commencé à penser. L'amour de la philosophie n'a jamais tari en moi. Encore aujourd'hui, affaibli et refroidi par l'âge, j'ai conservé pour cette belle science le même amour, la même ferveur, la même foi. Quelques crises que j'aie traversées, rien ne m'a découragé. Je n'ai pas eu l'oreille fermée aux nouveautés ; elles m'ont toujours intéressé et souvent [70] séduit. Je ne me suis pas montré à leur égard un adversaire hargneux et effrayé ; j'en ai pris ce que j'en ai pu ; mais, malgré ces concessions légitimes, je suis resté fidèle aux grandes pensées de la philosophie éternelle dont parle Leibniz, et ces pensées n'ont jamais cessé de me paraître immortellement vraies. »

Cet ouvrage solide et éloquent n'était pas seulement le couronnement d'une vie, il apportait à la science française un livre qui lui manquait. L'Académie des Sciences morales et politiques résolut de lui décerner en 1898 sa plus haute récompense. Au prix Jean Reynaud qu'elle accorde à l'œuvre la plus remarquable publiée depuis cinq ans, s'ajouta un rapport dont vous avez tous gardé le souvenir. C'était la dernière lecture et comme la dernière pensée de cet esprit si fier, de cette âme si élevée, de ce cœur si chaud que nous avons perdu peu de mois après M. Janet : M. Charles Lévêque n'hésite pas à mettre ce livre au premier rang : [71] il loue sa concision, sa simplicité, la clarté du raisonnement et du style ; il fait ressortir ce qu'a de nouveau et de puissant ce jugement qui est, à lui seul, une définition : « Les savants pensent les objets. Les philosophes pensent la pensée des objets. » Il suit l'auteur, de chapitre en chapitre, étudiant avec lui l'idée de l'infini, de l'absolu et de la perfection, et approuvant cette conclusion : « Dieu est l'Être infini, absolu et parfait, qui a produit toutes choses et qui les gouverne toutes. » À cette fin dernière de la métaphysique, s'ajoute avec l'analyse de la nature humaine, les éludes les plus fortes sur la volonté et la liberté. « II s'est complu, disait avec force notre rapporteur, dans une impartialité haute et sereine qui n'est jamais l'indifférence. Il aime à dire : « Je me suis « intéressé à tout. » Et, par un juste retour, voici que, dans son dernier ouvrage, à ne citer que celui-là, tout intéresse, depuis les confidences de la préface, jusqu'à ces déclarations réconfortantes de la conclusion : [72] « Nous ne sommes pas au nombre des découragés et des désespérés ; nous aimons les idées ; nous n'avons pas peur d'elles ; ce seront elles qui travailleront pour nous. »

L'hommage que l'Académie entendait décerner au Doyen de la section de philosophie allait bien au delà d'un seul livre, quelle qu'en fut la valeur : il s'étendait a l'œuvre tout entière.

Ce sont là les fêtes intimes de nos Compagnies. Plus l'existence d'un confrère a été modeste, plus elle s'est écoulée dans le silence, loin du fracas de la vie publique et plus il nous semble que nous lui devons, au terme de sa carrière, un de ces témoignages qui n'étonnent aucun témoin de sa vie et dont s'honore la justice.

La vertu présente les formes les plus diverses : tantôt les actes les plus éclatants, les dévouements qui font en quelques instants d'un homme, d'un enfant même, un héros, tantôt les longues abnégations du devoir ; dans cette salle où elle reçoit un [73] périodique hommage, qui ignore ces contrastes ? Lorsqu'une vie tout entière a été vouée à la pensée désintéressée, lorsque les succès légitimes de l'écrivain n'ont jamais été tournés au profit de l'ambition, lorsqu'un professeur parvenu, dès l'âge de quarante ans, à la Sorbonne, à l'Institut, voyant les élèves se presser autour de sa chaire, ses confrères l'entourer d'estime, n'a jamais songé à tirer de ses succès un avantage personnel, ne réclamant rien pour lui-même, ne cherchant que le triomphe de la vérité, bornant ses désirs, trouvant dans ses méditations sa plus haute récompense, vivant en sage, mourant avec la foi en l'éternité, l'Académie des Sciences morales et politiques n'abdiquerait-clle pas sa mission si elle n'allait chercher, dans le demi-jour où il a voulu vivre, ce grand serviteur de la pensée pour le faire monter au rang qui lui revient ?

Lorsque le 4 octobre 1899, après quelques mois de maladie, sans qu'il ait connu ces [74] jours de décadence pires que la mort, Paul Janet nous était enlevé, nous nous apercevions du vide immense qu'il laissait parmi nous. Plus nous étudions sa pensée et plus il nous manque. Il était bien ce philosophe auquel rien d'humain n'était étranger.

À lire les Causes finales ou son dernier livre, on est en présence d'un pur métaphysicien, vivant dans les sphères supérieures de l'abstraction. Si on ouvre la Famille, la Philosophie du Bonheur ou la Morale, on est entraîné et charmé : c'est un père, un conseil, un ami ayant la plus sûre pratique de la vie, guide éclairé, mêlant la fermeté à l'indulgence, faisant du devoir la raison du bonheur et se montrant en tout un de nos grands moralistes. Qu'on parcoure la galerie de portraits et d'études, on est séduit par le littérateur dont la grâce, l'observation fine, les caractères fortement tracés sont relevés par un style tellement approprié aux personnages, si parfaitement transparent qu'on oublie l'auteur pour se croire en tête à tête [75] avec le modèle. Si on remonte vers l'Histoire de la Science politique, vers la Philosophie de la Révolution, on se sent en face d'un de ces esprits profonds qui ont médité sur le gouvernement des sociétés, qui, étudiant l'histoire en psychologues, la politique en philosophes, ont pénétré au delà de ce qu'elles ont de contingent pour signaler cette répétition des mêmes fautes que, sous des noms divers et à travers des civilisations différentes, ceux qui réfléchissent ont à jamais condamnées.

Ainsi, littérateur, historien, philosophe, moraliste, Paul Janet a laissé des œuvres qui, lues longtemps après sa mort, fortifieront encore les âmes, feront penser et le feront aimer.

Peut-on concevoir, pour un homme qui n'a voulu être que professeur et écrivain, une ambition plus haute ?

[76]

[77]

Paul Janet

SA VIE

1823. 30 avril.

Sa naissance.

1841.

Entre à l'École Normale.

1844.

Secrétaire de Victor Cousin.

1845.

Professeur au collège royal de Bourges.

1848.

Professeur à la Faculté des Lettres de Strasbourg.

1853.

Prix à l'Académie des Sciences morales et politiques pour la Philosophie morale et politique de Platon et d'Aristote.

1856.

Prix à l'Académie française pour la Famille.

1857.

Professeur de logique au Lycée Louis-le-Grand.

1859.

Prix à l'Académie française pour l'Histoire de la Philosophie Morale et Politique.

[78]

1862. 17 novembre.

Suppléant de M. Garnier, professeur de philosophie à la Faculté des Lettres de Paris.

1863.

Prix à l'Académie française pour la Philosophie du Bonheur.

1864. 13 février.

Élu membre de l'Académie des Sciences morales et politiques.

1864. 20 juin.

Professeur d'Histoire de la Philosophie à la Faculté des Lettres.

1871.

Professeur à l'École des Sciences politiques.

1880.

Membre du Conseil supérieur de l'Instruction publique.

1887. 11 novembre.

Professeur de Philosophie à la Faculté des Lettres.

1899. 4 octobre.

Sa mort.


[79]

SES OUVRAGES

1. Essai sur la dialectique de Platon, thèse de doctorat, Paris. in-8°, Joubert, 1848. 2° édition sous ce titre : Études sur la dialectique dans Platon et dans Hegel, Paris, in-8°, Ladrange, 1861.

2. De plastica naturæ vita quæ a Cudwortho in systemate intellectuali celebratur, Facultati Parisiensi hanc thesim proponebat Paul Janet, Paris, Joubert, in-8°, 1848.

3. M. de Lamartine, Paris, in-8°, Joubert, 1848, (23 pages).

4. Du rapport de la morale et de la politique. Leçon d'ouverture à la Faculté des Lettres de Strasbourg, Paris, in-8°, 1849 (tirage à part de la Liberté de penser).

5. Introduction à un cours de morale et de théodicée. Leçon d'ouverture à la Faculté des Lettres de Strasbourg ; 18 novembre 1854, Strasbourg, in-8°, 1854.

[80]

6. La famille (Leçons de philosophie morale) ; in-18, Paris, Ladrange, couronné par l'Académie française, 1855. 5e édition, 1864. 7° édition, 1868. 13° édition, Paris, Calmann-Lévy, 1890. — La famiglia, traduction italienne, 1858. — Λ famiglia, traduction portugaise, Porto, 1868. — Familjen, traduction suédoise, 1869.

7. Discours prononcé à la distribution des prix. Lycée impérial Louis-le-Grand ; Paris, in-8°, 1857.

8. Les confessions de saint Augustin, traduction française et une introduction, in-18, Charpentier, 1858.

9. Histoire de la philosophie morale et politique dans l'antiquité et dans les temps modernes. 2 volumes in-8°, Paris, Ladrange, 1858 (couronné par l'Académie des sciences morales et par l'Académie française). 2° édition, sous ce litre : Histoire de la science politique dans ses rapports avec la morale ; Paris, 1872. — 3e édition, Paris, 2 vol. in-8°, Alcan, 1887.

10. La philosophie et M. Ernest Renan. Paris, in-8°, 1860.

11. Essai sur le médiateur plastique de Cudworth. Paris, in-8° (74 pages), Ladrange, 1860.

12. Leçon d'ouverture du cours de philosophie, prononcée à la Faculté des Lettres de Paris, [81] le 16 décembre 1862 ; in-8°, 22 pages, Paris, Dupont.

13. La philosophie du bonheur ; in-8°. Paris, Michel Lévy, 1863. 5e édition, in-18, 1891. — Het geluk in het menschelijk leven, traduction hollandaise, par Laurillard ; Amsterdam, 1864. Ly cans filocofi, traduction suédoise, Stockholm, 1869.

14. Le matérialisme contemporain ; in-18, 1863, Germer-Baillière. 3e édition, 1875. 5e édition, librairie Alcan, 1888. Der materialismus unser Zeit, par Von Reichlin-Weldegg, avec préface de H. von Fichte, traduction allemande ; Leipzig, 1866. The materialism of the present day, traduction anglaise, par G. Masson ; Londres, 1866. Kritik van het moderne materialism, traduction hollandaise, Utrecht, 1865. Matery palism Wspolezsesny, traduction polonaise, par Sophie de Glaser, Krakow, 1878.

15. Discours prononcé aux funérailles de M. Emile Saisset, 29 décembre 1863 ; Didot, in-4, 1863.

16. Une Académie Politique sous le cardinal de Fleury de 1724 à 1731. Lecture faite dans la séance publique annuelle des cinq Académies le 16 août 1865 ; Paris, in-4°, 1865.

17. La crise philosophique ; gr. in-18, (184 p.) Germer-Baillière, 1865.

18. Le cerveau et la pensée ; in-18, Germer-Baillière, 1867.

[82]

19. Éléments de morale ; in-18, Delagrave, 1869 ; 2e édition 1870 ; 3e édilion, 1884 ; 4e édition, 1890.

20. Discours prononcé le 16 novembre 1871 aux funérailles de H. Pellat ; Didot, in-4°, 1871.

21. La philosophie dans les comédies de Molière ; lu dans la séance publique annuelle des cinq Académies le 25 octobre 1872 ; Paris, Didot, in-4°.

22. Les problèmes du xixe siècle ; Paris, in-8°, Michel Lévy, 1872.

23. Saint-Simon et les saint-simoniens ; in-18, Germer-Baillière, 1872.

24. La morale ; in-8°, xiii-616 pages, Delagrave, 1874. 2e édition, 1886. 5e édition, 1898. The theory of marals, New-York, 1880.

25. Philosophie de la Révolution française, in-18. Germer-Baillière, 1874. 4e édition, librairie Alcan, 1892.

26. Les causes finales. Librairie Germer-Baillièrc, 1876. 2e édition, Ι883. Final causes, Edinburg, 1878. 2e édition, 1883. Final causes, New-York, 1883. 2e édition, 1888.

27. Allocution prononcée à la distribution des prix du Lycée Louis-le-Grand, le 6 août 1878, Paris, in-8°, 1878.

28. Spinoza : De Dieu, de l'homme et de la béatitude ; [83] traduction française avec introduction ; Germer-Baillière, 1878.

29. La philosophie française contemporaine ; in-18, Michel Lévy, 1879.

30. Notice sur Barni (Jules Romain), 1879. (Association des anciens élèves de l'École Normale.)

31. Un républicain de la veille. Michel de Bourges, souvenirs personnels ; Revue politique du 17 avril 1880.

32. Traité élémentaire de philosophie à l'usage des classes ; Paris, in-8°, Delabrave, 1880. 2e édition, 1881. 3e édition, 1883. 4e édition, 1884. 6e édition, 1889.). Trad. espagnole, Paris Bouret, 1882. 2e édition, 1886. 3e édition, 1890.

33. Traité de philosophie ; in-8°, Detagrave, 1880. Traduction espagnole, Mexico, 1882.

34. Notice sur Cotelle (Toussaint Aνgε) (Association des anciens élèves de l'École Normale).

35. Pascal philosophe, discours prononcé le 11 septembre 1880, à l'inauguration de la statue de Pascal à Clermont-Ferrand ; Didot, in-4°, 1880.

36. Cours de morale à l'usage des écoles normales primaires, 1re année : Psychologie et Morale théorique, Paris, in-18, Delagrave, 1881. 2e année : Morale pratique, Paris, in-18, Delagrave, 1881. 2e édition, 1887.

37. Cours de morale à l'usage des écoles normales [84] primaires d'institutrices ; 1re et 2e année : Psychologie et Morale théorique, Paris, Delagrave, in-18, 1882. 3e année : Morale pratique, applications ; Paris, Delagrave, 1883.

38. Discours prononcé le 24 septembre 1882 à l'inauguration de la statue de Lakanal, à Foix ; Imp. F. Didot, in-4°, 1882.

39. Les origines du socialisme contemporain ; Paris, in-18, Germer-Baillière, 1883.

40. Cours complet d'enseignement secondaire spécial, Éléments de morale ; Paris, in-18, Delagrave, 1883. Éléments de morale pratique, 1889. Éléments de philosophie scientifique et de philosophie morale, lre édition, 1890. 2e édition, Paris, Delagrave, in-18, 1891.

41. Les maîtres de la pensée moderne ; in-18, Michel Lévy, 1883.

42. Victor Cousin et son œuvre, in-8°, Calmann-Lévy, 1885.

43. Histoire de la philosophie, Les problèmes et les écoles, en collaboration avec M. J. Séailles, in-8°. Delagrave, 1887. Traduction espagnole, Paris, Bouret, 1891.

44. Les lettres de Mme de Grignan ; in-18, Lireux, 1888. 2e édition, Paris, in-18. C. Lévy, 1895.

45. Les passions et les caractères dans la littérature du XVIIe siècle ; in-18, Calmann-Lévy, 1888.

[85]

46. Histoire de la Révolution française (Centenaire de 1789) ; in-18, Delagrave, 1889.

47. Lectures variées de littérature et de morale ; in-18, Delagrave, 1890.

48. La philosophie de Lamennais ; Paris, in-18, Alcan, 1890.

49. Cours de psychologie et de morale, 1re année. Psychologie théorique et appliquée, par Paul Janet et Raymond Thamin, Paris, Delagrave, in-18, 1891. 2e année : Morale théorique et Morale pratique, par Paul Janet ; Paris, in-18, Delagrave, 1891

50. Fénelon (de la collection des Grands écrivains français) ; in-18, Hachette, 1892.

51. Dubois, ancien directeur de l'École Normale supérieure. (Notice insérée dans le centenaire de l'École Normale. Ι795-1895. Paris, Hachette, 1895, gr. in-8°.)

52. Notice sur Martha (Benjamin Constant) (Extrait du Bulletin de l'Association des anciens élèves de l'École Normale.) Versailles, Cerf, in-8°, 1895.

53. Principes de métaphysique et de psychologie, leçons professées à la Faculté des Lettres de Paris ; 1888-1894 ; Paris, 2 vol. in-8°, Delagrave, 1897.

54. Notice sur Jules Simon (Association des anciens élèves de l'École Normale), 1897.

[86]

55. Notice sur Denis (François Jacques) (Association des anciens élèves de l'École Normale), 1898.

[86]


TRAVAUX ACADÉMIQUES

1. Rapport sur un ouvrage de M. Martha : « Les moralistes sous l'empire romain »,  t. LXXI, p. 285.

2. Un précurseur français de Hegel ; t. LΧΧΙΙΙ, p. 457.

3. Une académie politique sous le cardinal de Fleury ; t. LXXIV, p. 107.

4. Rapport sur un ouvrage de M. Mervoyer : «  Étude sur l'association des idées », t. LXXVI, p. 293.

5. Rapport sur un ouvrage de M. Caro : « La philosophie de Gœthe », t. LXXVIII, p. 293.

6. Rapport sur un ouvrage de H. Ém. Beaussire : « La liberté dans l'ordre intellectuel et moral », t. LXXXII, p. 457.

7. Rapports sur une publication de lettres inédites de Descartes, par M. de Budé, t, LXXXVII, p. 183.

8. Rapport sur un ouvrage de M. Ém. Beaussire : « La guerre civile et la guerre étrangère ».

9. La philosophie dans les comédies de Molière, t. XCI, p. 69.

[87]

10. Rapport sur un ouvrage de M. Fouillée : « La liberté et le déterminisme », t. C, p. 174.

11. Rapport sur un ouvrage .de M. Alex. Bain, traduit par M. Cazelles : « Les sens et l'intelligence », t. Cl, p. 703.

12. Rapport sur un ouvrage de M. Zeller : « Les tribuns et les révolutions en Italie », t. CCI, p. 714.

13. Rapport sur un ouvrage de M. Ribot : « La philosophie de Schopenhauer », t. CII, p. 669.

14. Notice sur des lettres inédites de Bayle, t. CII, p. 769.

15. Rapport sur « La Logique de Bain », traduite par M. Compayré, t. CV, p. 893.

16. Des causes finales, t. CVI, p. 491.

17. Un philosophe misanthrope, t. CIX, p. 369.

18. Rapport sur un ouvrage de M. Boussinesq : « Conciliation du déterminisme et de la liberté morale »,  t. CIX, p. 496.

19. Rapport sur les publications de M. Paul Bert, t. CXI, p. 178.

20. Rapport sur un ouvrage de M. Dupont-White : « Mélanges philosophiques », t. CXI, p. 180.

21. Rapport sur «  les Logiciens anglais », de M. Liard ; t. CXI, p. 281.

[88]

22. Rapport sur le livre de M. Liard : « La science positive et la métaphysique », t. CXIII, p. 146.

23. Rapport sur le livre de M. Brochard : « L'erreur », t. CXIII, p. 748.

24. Des qualités de l'esprit, t. CX1V, p. 204.

25. Rapport sur un ouvrage de M. Marion : « La solidarité morale », t. CXV, p. 597.

26. Rapport sur le divorce, de M. Louis Legrand, t. CXVI, p. 715, 717.

27. La localisation des sensations, t. CXIX, p. 67.

28. Observations sur la suggestion hypnotique, t. CXXII, p. 233.

29. Sur le socialisme d'État, t. CXXV, p. 503.

30. Sur un ouvrage de Hamilton, traduit par M. Joseph Reinach : « La logique parlementaire », t. CXXVII, p. 127.

31. De l'imagination créatrice et du génie, t. CXXVII, p. 388.

32. Rapport sur deux livres de H. Ludovic Carrau : « Les preuves des théories de Platon ». — « La conscience psychologique et morale » ; t. CXXIX, p. 451.

33. Rapport sur un ouvrage de M. Lyon : L'idéalisme en Angleterre au XVIIIe siècle, CXXXI, p. 940 ; CXXXII, p. 429.

[89]

34. Rapport d'un ouvrage de M. Arréat : La morale dans le drame, l'épopée et le roman, CXXXI, p. 950.

35. Rapport sur deux ouvrages de M. Charaux : 1° Annales de l'enseignement supérieur de Grenoble ; 2° Pensées sur l'histoire, CXXXII, p. 606 ; CXXXIII, p. 313.

36. Rapport sur deux ouvrages : 1° Texte grec inédit de Damascius, par M. Ruelle : 2° L'automotisme psychologique, par M. Pierre Janet, CXXXIII, p. 153 et 629.

37. De la responsabilité philosophique, CXXXIII, p. 482 ; CXXXIV, p. 5.

38. Rapport sur un ouvrage de M. Arréat : Psychologie du peintre, CXXXVII, p. 546.

39. Les œuvres posthumes de Montesquieu, CXXXIX, p. 168.

40. Rapport sur un ouvrage de M. Pillon : L'année philosopuique, CXL, p. 123 et 508 ; CXLII, p. Î27 ; CXLIII, p.912 ;CXLVII, p. 154 ; CXLVIII, p. 143 ; CL, p. 961.

41. Rapport sur un ouvrage de M. Durckeim : De la division du travail social. CXL, p. 123 et 508.

42. Rapport sur un ouvrage de M. Reynaud : Grammaire comparée du grec et du latin, CXLIV, p. 139.

[90]

43. Observations sur Damascius, CXLVII, p. 853 ; CXLVIII, p. 811.

[90]

RAPPORTS
SUR LES CONCOURS


1. Rapport au nom de la section de morale sur : « Le traité des devoirs de Cicéron ». Mémoires de l'Académie, t. XII, p. 245, 1865.

2. Rapport sur le « concours de la philosophie de Malebranche ». Comptes rendus, t. LXXVIII, p. 5. — Mémoires de l'Académie, t. XIII, p. 221.

3. Rapport sur la philosophie de Kant. Comptes rendus, t. XCI, p. 231. — Mémoires de l'Académie, t. XIV, p. 31.

4. Rapport sur le concours relatif aux : « Dialogues de Platon ». Mémoires de l'Académie, t. XVII, p. 243.

5. Rapport sur le prix Jean Reynaud, l. XVII, p. 1085.

6. Rapport sur la philosophie de l'inconscient. C. R. t. CXXXVII, p. 801 ; t. CXXXVIII, p. 151. — Mémoires, t. XVIII, p. 557.

7. Rapporte sur le prix Gegner. C. R. t. CXXXIX, p. 647 ; t. CXXXXI, p. 540 ; t. CXXXXIII.p. 780 ; t. CXXXXV, p. 549.

8. Rapport sur la philosophie de Philon le Juif et l'école d'Alexandrie. C. R. t. CXXXXVI, p. 887 et 933. — Mémoires, t. XX, p. 275.

[91]

9. Rapport sur le prix Jean Reynaud. C. R. t. CL, p. 672 ; t. CLI, p. 101. — Mémoires, t. XIX, p. 921.

[91]

Collaboration à
la «Revue des deux mondes»


1856. 15 mars.

La cité de Dieu au XIXe siècle.

1857. 15 avril.

Stephansfeld (Asile d'aliénés en Alsace). Des caractères et du traitement de la folie.

1861. 1er juillet.

Alexis de Tocqueville et la science politique au XIXe siècle.

1862. 15 juin.

Une nouvelle défense du spiritualisme. (Essai de philosophie religieuse par Émile Saisset.)

1863. 15 mai.

Un nouveau système sur la vie future.

15 août.

Le matérialisme contemporain. I. l'École naturaliste en Allemagne.

1er décembre.

II. Une théorie anglaise : M. Darwin.

1864. 1er janvier.

Émile Saisset ; article nécrologique.

1er avril.

La philosophie du XVIIIe siècle.

[92]

15 juillet.

La crise philosophique et les idées spiritualistes en France. I. l'école critique.

1er août.

II. Le positivisme el l'idéalisme.

15 décembre.

La psychologie depuis Jouffroy : M. Adolphe Garnier.

1865. 15 mars.

Le scepticisme moderne : Pascal et Kant.

15 juin.

Le cerveau et la pensée.
I. Données physiologiques.

15 juillet.

II. Derniers débats scientifiques sur la folie.

1865. 1er juillet.

Un précurseur français de Hegel : dom Deschamps.

1866. 15 janvier.

L'histoire de la philosophie et l'éclectisme.

15 avril.

La méthode expérimentale el la Physiologie.

1er septembre.

La liberté de penser.

1er octobre.

L'esprit de discipline en littérature.

1867. 1er février.

Victor Cousin

15 juillet.

Spinoza et le Spinozisme.

1868. 15 janvier.

Descartes, son caractère et son génie.

15 mai.

Le spiritualisme français au XIXe siècle.

1er juillet.

Les problèmes philosophiques : M. Auguste Laugel.

[93]

15 octobre.

L'unité morale de l'espèce humaine.

1869. 15 mai.

Un apologiste chrétien au XIXe siècle : M. Guizot.

1er octobre.

La grammaire au moyen-âge.

15 octobre.

Mill et Hamilton : le problème de l'existence des corps.

1872. 1er janvier.

La philosophie de la révolution française.
I. les théoriciens de l'école révolutionnaire.

15 janvier.

II. Les historiens républicains et les critiques de la révolution.

15 août.

L'esprit révolutionnaire, la souveraineté nationale et le gouvernement de la République.

15 novembre.

Les réformes dans l'Enseignement secondaire.

1873. 15 février.

Le problème des causes finales et la Philosophie contemporaine.

15 novembre.

Une nouvelle phase de la philosophie spiritualiste.

1874. 1er mai.

L'idée de force et la philosophie dynamiste.

1er novembre.

La science sociale et la philosophie anglaise.

1875. 1er mars.

M. Charles de Rémusat.

[94]

15 septembre.

La philosophie dans les tragédies de Racine.

1876. 15 avril.

Le fondateur du socialisme moderne : Saint-Simon.

15 juillet.

La liberté de l'enseignement et la collation des grades.

1er octobre.

L'École st-simonienne : Bazard et Enfantin.

1877. 15 avril.

La métaphysique en Europe depuis Hegel :
I. La philosophie de la liberté : Schelling et Secrétan.

15 mai.

II. Un philosophe misanthrope : Schopenhauer.

1er juin.

III. La philosophie de la volonté et la philosophie de l'inconscient.

15 septembre.

La propriété pendant la Révolution française.

1878. 15 avril.

L'histoire de la philosophie ancienne en Allemagne.

1879. 1er janvier.

L'Instruction primaire au point de vue de la psychologie.

1er juin.

Éludes et discours par M. Bersot.

1er août.

Le Globe de la Restauration et Paul-François Dubois.

1er octobre.

Le socialisme au XIXe siècle : Charles Fourier.

1880. 1er mai.

Schopenhauer et ta physiologie française : Cabanis et Bichat.

[95]

15 juillet.

Les origines du socialisme contemporain :
I. Le socialisme révolutionnaire.

1er août.

II. Le Communisme au XVΊΙΙe siècle, et la conspiration de Babeuf.

1881. 15 mars.

La philosophie de Molière.

15 octobre.

La philosophie de la croyance.

1882. 1er juin.

Un essai de réalisme spiritualiste.

1883. 1er septembre.

L'éducation des femmes.

1884. 1er janvier.

Victor Cousin et son œuvre philosophique.
I. Les premiers maîtres de Cousin ; le voyage d'Allemagne.

15 janvier.

II. Le cours de 1818. Le vrai, Le beau et Le bien. Le cours de 1820.

1er février.

III. La disgrâce. Cousin et Hegel. Le cours de 1828.

15 février.

IV. L'enseignement de la philosophie de 1830 à 1852.

1er mars.

V. L'histoire do la philosophie ; l'idée éclectique.

1er - 15 septembre.

Les lettres de Mme de Grignan.

1885. 1er juin.

Le testament d'un philosophe : le nouveau spiritualisme.

15 août.

Les clefs de La Bruyère.

1886. 15 août.

Bossuet moraliste.

[96]

1887. 1er août.

Les origines de la philosophie d'Auguste Comte : Comte et Saint-Simon.

1888. 1er avril.

Une chaire de psychologie expérimentale et comparée au Collège de France.

1889. 1er février.

La philosophie de Lamennais.
I. Lamennais, théologien et théocrate.

1er mars.

II. Lamennais, libéral et révolutionnaire.

15 mars.

III. Lamennais, métaphysicien et esthéticien.

1890. 15 mars.

La philosophie catholique en France au XlXe siècle : Chateaubriand et le génie du christianisme.

1892. 15 juillet.

La psychologie et ses modernes critiques.

1899. 15 avril.

La philosophie de Pierre Leroux.
I. La critique de l'éclectisme.

15 mai.

II. L'idée de l'humanité.


[96]

JOURNAUX DES SAVANTS

1888. Février.

Mme de Maintenon, d'après sa correspondance authentique.

Mars.

Idem.

[97]

Juin.

Montesquieu, par Albert Sorel. Turgot par Léon Say.

Septembre.

Dictionnaire de pédagogie et d'instruction primaire.

1889. janvier.

Idem.

Février.

Œuvres de Blaise Pascal (Édit. Faugère).

Juin.

Maximes de La Rochefoucauld.

Juillet.

Idem.

1890. Janvier.

La vie de Molière. — Notice bibliographique sur Molière par Paul Mesnard (Œuvres de Molière, t. X, collection des Grands Écrivains, 1889). La comédie de Molière, l'homme et son milieu, par Gustave Larroumet, 1887.

Mars.

Idem.

Septembre.

L'Allemagne depuis Leibniz. Essai sur la formation de la conscience nationale de l'Allemagne (1700-1848), par Levi-Brühl, 1890.

Décembre.

Alexandre Hardy et le théâtre français à la fin du XVIe siècle, et au commencement du XVIIe siècle, par M. Rigal.

1891. Février.

Œuvres du cardinal de Retz, nouvelle édition. (Collection des Grands Écrivains de la France), [98] 9 vol. in-8° (1872-1887, Paris).

Mars.

Idem.

Juin.

Idem.

1892. Janvier.

Sébastien Castellion, sa vie, son œuvre, 1515-1563, par Ferdinand Buisson, Paris, 1891.

Avril.

Mme de La Fayette, par le comte d'Haussonville (Collection des Grands Écrivains français, Paris, 1891).

Septembre.

Bossuet historien du protestantisme. Étude sur l'histoire des variations par Alfred Rébelliau.

Novembre.

Idem.

Décembre.

Mélanges inédits de Montesquieu, publiés par le baron de Montesquieu (Bordeaux, 1892). — Deux opuscules de Montesquieu, 1891.

1893. Mars.

Idem.

Juin.

Nos adieux à la vieille Sorbonne, par Oct. Gréard, Paris, 1893.

Août.

L'ancien collège d'Harcourt et le lycée Saint-Louis, par M. l'abbé Bouquet, Paris, 1891.

Octobre.

Idem.

1894. Avril.

Le roman en France depuis 1610 jusqu'à nos jours, par M. Paul Morillot.

[99]

Juin.

Prévost-Paradol. Étude, suivie d'un choix de lettres, par Octave Gréard, 1894.

Octobre.

Idem.

1895. Mars.

Lamartine, par Émile Deschanel. Paris, 1893.

Juin.

La philosophie de Jacobi, par Levi-Brühl, 1894.

novembre.

Idem.

1896. Janvier.

J.-J. Rousseau et les origines du cosmopolitisme littéraire, par (J. Texte. (Librairie Hachette).

Avril.

Idem.

Septembre.

Histoire des doctrines esthétiques et littéraires en Allemagne : Lessing, par Em. Grucker (Paris, Berger-Levrault, 1896).

1897. Mars.

Idem.

Mai.

Idem.

1898. Janvier.

Geoffroy et la critique dramatique sous le Consulat et l'Empire, par M. Charles des Granges. (Paris, 1897, Hachette.)

Avril.

Œuvres de Descartes, publiées par Charles Adam et Paul Tannery, sous les auspices du ministère de l'Instruction publique. (Correspondance, t. I, Léopold Cerf, imprimeur-éditeur.)

Août.

Dernier travail, derniers souvenirs, [100] par M. Ernest Legouvé, de l'Académie française. (Hetzel, 1898.)

Novembre.

Houdard de la Motte, par M. Paul Dupont, maître de conférences à la Faculté des lettres de l'Université de Lille. (Hachette, Paris, 1898.)

1899. Février.

La correspondance de Descartes, t. II, publiée par M. Charles Adam et Paul Tannery. (Paris, Léopold Cerf, 1898.) (Suite.)

Juin.

John Stuart Mill. Correspondance inédite avec Gustave d'Eichthal. — Avant-propos et traduction par Eugène d'Eichthal. (Paris, Alcan, 1898.)

Octobre.

Mort de M. Janet.



[1] Le Centenaire de l'École normale, p. 274.

[2] Philosophie du bonheur, p. 46.

[3] M. Boutroux, Notice sur Paul Janet à l'École normale, p. 9.

[4] Rapport de M. Villemain sur les concours de l'année 1863.

[5] Élu en remplacement de M. Villermé, il siégea pendant deux ans dans la section de morale et, en 1866, diverses mutations lui permirent de prendre la place qui lui appartenait dans la section de philosophie.

[6] Étude sur Victor Cousin.

[7] La morale, p. 612.

[8] Philosophie du bonheur, p. 360.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 28 juin 2015 10:47
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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