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Collection « Les auteur(e)s classiques »

Oeuvres complètes de J. Michelet, Histoire de France. (1893)
Tome septième: RENAISSANCE

Préface


Une édition électronique réalisée à partir du texte de Jules Michelet, Oeuvres complètes de J. Michelet. Histoire de France. Tome septième. Renaissance. (1895). Édition définitive revue et corrigée avec les notes et les appendices. Paris: Ernest Flammarion, Éditeur, 1895, 408 pages. Une édition électronique réalisée à partir du fac-similé de l'édition originale telle que reproduite par la Bibliothèque Nationale de France. Une édition numérique réalisée par M. Jean-Marc Simonet, professeur retraité de l'enseignement, Université de Paris XI-Orsay.

Préface

 

Dix ans d’études donnés au Moyen-âge, dix ans à la Révolution, il nous reste, pour relier ce grand ensemble, de placer entre ces deux histoires celle de la Renaissance et de l’âge moderne. 

Ce volume est la Renaissance proprement, dite ; le suivant, qui va paraître, s’appellera la Réforme. 

Nous supprimons généralement les citations de livres imprimés que tout le monde a dans les mains. Nous ne citerons guère que les manuscrits. 

Ayant marqué le point de départ et le but, en deux longues histoires, nous marcherons d’un pas d’autant plus sûr et plus rapide dans l’espace intermédiaire. 

Nous ne pouvions retourner de la Révolution à la Renaissance p002 sans revoir nos travaux sur le Moyen-âge, sans connaître et apprécier les publications qui se sont faites depuis leur achèvement. 

Elles n’ont modifié en rien ce que nous avons écrit sur le quatorzième et le quinzième siècle (tomes III, IV, V, VI). Les dix années qui se sont écoulées depuis n’ont en rien ébranlé ce travail, le premier où les textes imprimés aient été contrôlés par les actes manuscrits. 

Quant à nos origines dont le premier volume donne l’histoire, de savantes recherches y ont ajouté, peu changé toutefois. Telle nous avons posé la base de cette construction, telles nos estimables concurrents l’ont adoptée, et ils ont bâti dessus avec confiance. 

C’est au Moyen-âge proprement dit (deuxième volume, de l’an 1000 à l’an 1300) que se rapportent généralement les nombreuses publications de textes inédits qu’on a faites dans cet intervalle. Elles nous ont fort éclairés sur les mœurs de ces temps, sur l’art gothique, etc. Il n’est point de notre franchise d’effacer rien de ce qui est écrit. Nous aimons mieux donner, dans l’Introduction qu’on va lire, la pensée plus exacte qui sort des textes. Ce que nous écrivîmes alors est vrai comme l’idéal que se posa le Moyen-âge. Et ce que nous p003 donnons ici, c’est sa réalité, accusée par lui-même. 

Le résultat, au total, diffère peu. Alors (en 1833), quand l’entraînement pour l’art du Moyen-âge nous rendit moins sévère pour ce système en général, nous déclarâmes pourtant que son principe était sujet à la loi universelle de toute vie, qu’il devait passer, comme nous tous, hommes, peuples et religions, par l’utile épuration de la mort. Est-ce un si grand mal de mourir ? A ce prix, on renaît en ce qu’on eut de meilleur. 

Ce livre, au reste, n’est pas écrit pour faire peine aux mourants. C’est un appel aux forces vives. 

Celle de l’Antiquité tenait, je pense, à ce qu’elle crut que l’homme fait son destin lui-même (fabrum suæ quemque esse fortunæ). Ce temps-ci, au contraire, frappé des grandes puissances collectives qu’il a créées, s’imagine que l’individu est trop faible contre elles. Ces temps-là crurent à l’homme ; nous croyons à l’individu. 

Il en résulte cette chose fâcheuse : nos progrès tournent contre nous. L’énormité même de notre œuvre, à mesure que nous l’exhaussons, nous ravale et nous décourage. Devant cette pyramide nous nous trouvons imperceptibles, nous ne nous voyons plus nous-mêmes. Et qui l’a bâtie, sinon nous ? 

p004 L’industrie que nous avons créée hier, elle nous semble déjà notre embarras, notre fatalité. L’histoire, qui n’est pas moins, que l’intelligence de la vie, elle devait nous vivifier, elle nous a alanguis au contraire, nous faisant croire que le temps est tout, et la volonté peu de chose. 

Nous avons évoqué l’histoire, et la voici partout ; nous en sommes assiégés, étouffés, écrasés ; nous marchons tout courbés sous ce bagage, nous ne respirons plus, n’inventons plus. Le passé tue l’avenir. D’où vient que l’art est mort (sauf de si rares exceptions) ? c’est que l’histoire l’a tué. 

Au nom de l’histoire même, au nom de la vie, nous protestons. L’histoire n’a rien à voir avec ces tas de pierres. L’histoire est celle de l’âme et de la pensée originale, de l’initiative féconde, de l’héroïsme, héroïsme d’action, héroïsme de création. 

Elle enseigne qu’une âme pèse infiniment plus qu’un royaume, un empire, un système d’États, parfois plus que le genre humain. 

De quel droit ? du droit de Luther, qui, d’un Non dit au pape, à l’Église, à l’Empire, enlève la moitié de l’Europe. 

Du droit de Christophe Colomb, qui dément et Rome et les siècles, les conciles, la tradition. 

p005 Du droit de Copernik, qui, contre les doctes et les peuples, méprisant à la fois l’instinct et la science, les sens même et le témoignage des yeux, subordonna l’observation à la Raison, et seul vainquit l’humanité. 

C’est la solide pierre où s’assoit le seizième siècle. 

Paris, 15 janvier 1855.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le jeudi 27 septembre 2007 7:13
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur au Cegep de Chicoutimi.
 



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