Auguste Bebel (1891), La femme et le socialisme. Traduit de l'Allemand par Henri Bavé


 

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Collection « Les auteur(e)s classiques »

René Guénon, Erreur spirite. (1952 [1977]
Avant-propos


Une édition numérique réalisée à partir du livre de René Guénon, Erreur spirite. Paris: Les Éditions traditionnelles, 1977, 407 pp. Réimpression de la nouvelle édition de 1972, elle-même étant une reproduction intégrale de l'édition de 1952. Une édition numérique réalisée avec le concours de Daniel Boulagnon, bénévole, professeur de philosophie au lycée Alfred Kastler de Denain (France).

[1]

L’ERREUR SPIRITE

Avant-propos

En abordant la question du spiritisme, nous tenons à dire tout de suite, aussi nettement que possible, dans quel esprit nous entendons la traiter. Une foule d’ouvrages ont déjà été consacrés à cette question, et, dans ces derniers temps, ils sont devenus plus nombreux que jamais ; pourtant, nous ne pensons pas qu’on ait encore dit là-dessus tout ce qu’il y avait à dire, ni que le présent travail risque de faire double emploi avec aucun autre. Nous ne nous proposons pas, d’ailleurs, de faire un exposé complet du sujet sous tous ses aspects, ce qui nous obligerait à reproduire trop de choses qu’on peut trouver facilement dans d’autres ouvrages, et ce qui serait, par conséquent, une tâche aussi énorme que peu utile. Nous croyons préférable de nous borner aux points qui ont été traités jusqu’ici de la façon la plus insuffisante : c'est pourquoi nous nous attacherons tout d’abord à dissiper les confusions et les méprises que nous avons eu fréquemment l’occasion de constater en cet ordre d’idées, et ensuite nous montrerons surtout les erreurs qui forment le fond de la doctrine spirite, si tant est que l’on puisse consentir à appeler cela une doctrine.

Nous pensons qu’il serait difficile, et d’ailleurs peu intéressant, d’envisager la question, dans son ensemble, au point de vue historique ; en effet, on peut faire l’histoire d’une secte bien définie, formant un tout nettement organisé, ou possédant au moins une certaine cohésion ; mais [2] ce n’est pas ainsi que se présente le spiritisme. Il est nécessaire de faire remarquer que les spirites ont été, dès l’origine, divisés en plusieurs écoles, qui se sont encore multipliées par la suite, et qu’ils ont toujours constitué d’innombrables groupements indépendants et parfois rivaux les uns des autres ; si même il était possible de dresser une liste complète de toutes ces écoles et de tous ces groupements, la fastidieuse monotonie d’une telle énumération ne serait certes pas compensée par le profit qu’on en pourrait retirer. Et encore faut-il ajouter que, pour pouvoir se dire spirite, il n’est nullement indispensable d’appartenir à une association quelconque ; il suffit d’admettre certaines théories, qui s’accompagnent ordinairement de pratiques correspondantes ; bien des gens peuvent faire du spiritisme isolément, ou en petits groupes, sans se rattacher à aucune organisation, et il y a là un élément que l’historien ne saurait atteindre. En cela, le spiritisme se comporte tout autrement que le théosophisme et la plupart des écoles occultistes ; ce point est loin d’être le plus important parmi tous ceux qui l’en distinguent, mais il est la conséquence de certaines autres différences moins extérieures, sur lesquelles nous aurons l’occasion de nous expliquer. Nous pensons que ce que nous venons de dire fait assez comprendre pourquoi nous n’introduirons ici les considérations historiques que dans la mesure où elles nous paraîtront susceptibles d’éclairer notre exposé, et sans en faire l’objet d’une partie spéciale.

Un autre point que nous n’entendons pas davantage traiter d’une façon complète, c’est l’examen des phénomènes que les spirites invoquent à l’appui de leurs théories, et que d’autres, tout en en admettant également la réalité, interprètent d’ailleurs d’une façon entièrement différente. Nous en dirons assez pour indiquer ce que nous pensons à cet égard, mais la description plus ou moins détaillée de ces phénomènes a été si souvent donnée par les expérimentateurs qu’il serait tout à fait superflu d’y revenir ; du reste, ce n’est pas là ce qui nous intéresse particulièrement, et nous préférons, à ce propos, signaler la [3] possibilité de certaines explications que les expérimentateurs dont il s’agit, spirites ou non, ne soupçonnent certainement pas. Sans doute, il convient de remarquer que, dans le spiritisme, les théories ne sont jamais séparées de l’expérimentation, et nous n’entendons pas non plus les en séparer entièrement dans notre exposé ; mais ce que nous prétendons, c’est que les phénomènes ne fournissent qu’une base purement illusoire aux théories spirites, et aussi que, sans ces dernières, ce n’est plus du tout au spiritisme que l’on aurait affaire. D’ailleurs, cela ne nous empêche pas de reconnaître que, si le spiritisme était uniquement théorique, il serait beaucoup moins dangereux qu’il ne l’est et n’exercerait pas le même attrait sur bien des gens ; et nous insisterons d’autant plus sur ce danger qu’il constitue le plus pressant des motifs qui nous ont déterminé à écrire ce livre.

Nous avons déjà dit ailleurs combien est néfaste, à notre avis, l’expansion de ces théories diverses qui ont vu le jour depuis moins d’un siècle, et que l’on peut désigner, d’une façon générale, sous le nom de « néo-spiritualisme ». Assurément, il y a, à notre époque, bien d’autres « contrevérités », qu’il est bon de combattre également ; mais celles-là ont un caractère tout spécial, qui les rend plus nuisibles peut-être, et en tout cas d’une autre manière, que celles qui se présentent sous une forme simplement philosophique ou scientifique. Tout cela, en effet, est plus ou moins de la « pseudo-religion » ; cette expression, que nous avons appliquée au théosophisme, nous pourrions aussi l’appliquer au spiritisme ; bien que ce dernier affiche souvent des prétentions scientifiques en raison du côté expérimental dans lequel il croit trouver, non seulement la base, mais la source même de sa doctrine, il n’est au fond qu’une déviation de l’esprit religieux, conforme à cette mentalité « scientiste » qui est celle de beaucoup de nos contemporains. De plus, parmi toutes les doctrines « néo-spiritua-listes », le spiritisme est certainement la plus répandue et la plus populaire, et cela se comprend sans peine, car il en est la forme la plus « simpliste », nous dirions même volontiers [4] la plus grossière ; il est à la portée de toutes les intelligences, si médiocres soient-elles, et les phénomènes sur lesquels il s’appuie, ou du moins les plus ordinaires d’entre eux, peuvent aussi être facilement obtenus par n’importe qui. C’est donc le spiritisme qui fait le plus grand nombre de victimes, et ses ravages se sont encore accrus en ces dernières années, dans des proportions inattendues, par un effet du trouble que les récents événements ont apporté dans les esprits. Quand nous parlons ici de ravages et de victimes, ce ne sont point de simples métaphores : toutes les choses de ce genre, et le spiritisme plus encore que les autres, ont pour résultat de déséquilibrer et de détraquer irrémédiablement une foule de malheureux qui, s’ils ne les avaient rencontrées sur leur chemin, auraient pu continuer à vivre d’une vie normale. Il y a là un péril qui ne saurait être tenu pour négligeable, et que, dans les circonstances actuelles surtout, il est particulièrement nécessaire et opportun de dénoncer avec insistance ; et ces considérations viennent, pour nous, renforcer la préoccupation, d’ordre plus général, de sauvegarder les droits de la vérité contre toutes les formes de l’erreur.

Nous devons ajouter que notre intention n’est pas de nous en tenir à une critique purement négative ; il faut que la critique, justifiée par les raisons que nous venons de dire, nous soit une occasion d’exposer en même temps certaines vérités. Alors même que, sur bien des points, nous serons obligé de nous borner à des indications assez sommaires pour rester dans les limites que nous entendons nous imposer, nous n’en pensons pas moins qu’il nous sera possible de faire entrevoir ainsi bien des questions ignorées, susceptibles d’ouvrir de nouvelles voies de recherches à ceux qui sauront en apprécier la portée. Nous tenons d’ailleurs à prévenir que notre point de vue est fort différent, sous bien des rapports, de celui de la plupart des auteurs qui ont parlé du spiritisme, pour le combattre aussi bien que pour le défendre ; nous nous inspirons toujours, avant tout, des données de la métaphysique pure, telle que les doctrines orientales nous l’ont fait connaître ; nous estimons [5] que c’est seulement ainsi qu’on peut réfuter pleinement certaines erreurs, et non en se plaçant sur leur propre terrain. Nous savons trop bien aussi que, au point de vue philosophique, et même au point de vue scientifique, on peut discuter indéfiniment sans en être plus avancé, et que se prêter à de telles controverses, c’est souvent faire le jeu de son adversaire, pour peu que celui-ci ait quelque habileté à faire dévier la discussion. Nous sommes donc plus persuadé que quiconque de la nécessité d’une direction doctrinale dont on ne doit jamais s’écarter, et qui seule permet de toucher impunément à certaines choses ; et, d’autre part, comme nous voulons ne fermer la porte à aucune possibilité, et ne nous élever que contre ce que nous savons être faux, cette direction ne peut être, pour nous, que de l’ordre métaphysique, dans le sens où nous avons dit ailleurs que l’on devait entendre ce mot. Il va de soi qu’un ouvrage comme celui-ci ne doit pas pour cela être regardé comme proprement métaphysique dans toutes ses parties ; mais nous ne craignons pas d’affirmer qu’il y a, dans son inspiration, plus de métaphysique vraie que dans tout ce à quoi les philosophes donnent ce nom indûment. Et que personne ne s’effraie de cette déclaration : cette métaphysique vraie à laquelle nous faisons allusion n’a rien de commun avec les subtilités rebutantes de la philosophie, ni avec toutes les confusions que celle-ci crée et entretient à plaisir, et, de plus, la présente étude, dans son ensemble, n’aura rien de la rigueur d’un exposé exclusivement doctrinal. Ce que nous voulons dire, c’est que nous sommes guidé constamment par des principes qui, pour quiconque les a compris, sont d’une absolue certitude, et sans lesquels on risque fort de s’égarer dans les ténébreux labyrinthes du « monde inférieur », ainsi que trop d’explorateurs téméraires, malgré tous leurs titres scientifiques ou philosophiques, nous en ont donné le triste exemple.

Tout cela ne signifie point que nous méprisions les efforts de ceux qui se sont placés à des points de vue différents du nôtre ; bien au contraire, nous estimons que tous ces points de vue, pour autant qu’ils sont légitimes et valables, ne [6] peuvent que s’harmoniser et se compléter. Mais il y a des distinctions à faire et une hiérarchie à observer : un point de vue particulier ne vaut que dans un certain domaine, et il faut prendre garde aux limites au delà desquelles il cesse d’être applicable ; c’est ce qu’oublient trop souvent les spécialistes des sciences expérimentales. D’un autre côté, ceux qui se placent au point de vue religieux ont l’inappréciable avantage d’une direction doctrinale comme celle dont nous avons parlé, mais qui, en raison de la forme qu’elle revêt, n’est pas universellement acceptable, et qui d’ailleurs suffit à les empêcher de se perdre, mais non à leur fournir des solutions adéquates à toutes les questions. Quoi qu’il en soit, en présence des événements actuels, nous sommes persuadé qu’on ne fera jamais trop pour s’opposer à certaines activités malfaisantes, et que tout effort accompli dans ce sens, pourvu qu’il soit bien dirigé, aura son utilité, étant peut-être mieux adapté qu’un autre pour porter sur tel ou tel point déterminé ; et, pour parler un langage que quelques-uns comprendront, nous dirons encore qu’il n’y aura jamais trop de lumière répandue pour dissiper toutes les émanations du « Satellite sombre ».



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le mercredi 28 août 2019 18:35
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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