RECHERCHE SUR LE SITE

Références
bibliographiques
avec le catalogue


En plein texte
avec Google

Recherche avancée
 

Tous les ouvrages
numérisés de cette
bibliothèque sont
disponibles en trois
formats de fichiers :
Word (.doc),
PDF et RTF

Pour une liste
complète des auteurs
de la bibliothèque,
en fichier Excel,
cliquer ici.
 

Collection « Les auteur(e)s classiques »

Histoire de la Chine (1942)
Extraits


Une édition électronique réalisée à partir du texte de René GROUSSET (1885-1952), Histoire de la Chine (1942)*, avec la carte du continent asiatique, et la carte des provinces chinoises. Paris : Club des Libraires de France, sans date, 344 pages. Une édition numérique réalisée par Pierre Palpant, bénévole, Paris.

Extraits

C16. — René GROUSSET : Histoire de la Chine. 

Extraits : le début des chapitres …

L’expansion d’une race de pionniers. Pour paradoxal qu’il paraisse, s’il fallait comparer l’histoire de la Chine à celle de quelque autre grande collectivité humaine, c’est à l’histoire du Canada ou des États-Unis qu’il faudrait songer. Dans les deux cas, il s’agit essentiellement et par-delà les vicissitudes politiques, de la conquête d’immenses territoires vierges par un peuple de laboureurs qui ne trouvèrent devant eux que de pauvres populations semi-nomades. Le plus dur de la lutte dut être mené contre la nature elle-même en défrichant le sol, en abattant la forêt primitive, en domptant les fleuves, en faisant partout de la terre arable. Seulement il n’a fallu que trois siècles aux Franco-Canadiens et aux Anglo-Saxons pour soumettre à la charrue le continent nord-américain, tandis que la conquête agricole du continent chinois a exigé près de quatre millénaires. Commencée aux confins du lœss et de la Grande Plaine vers le IIe millénaire avant J.-C., elle n’est pas encore entièrement terminée de nos jours puisque dans les montagnes du sud-ouest les « aborigènes » Lolo et Miao‑tseu ont résisté aux empiétements du fermier chinois.

Féodalité et chevalerie. La Chine archaïque, du VIIIe au IIIe siècle avant J.-C., pourrait fournir à nos médiévistes des matériaux pour une étude comparée du régime féodal à travers l’histoire. Dans la société chinoise de ce temps comme dans la France du Xe siècle, la disparition du pouvoir royal entraîna en effet des institutions assez analogues. Le morcellement des seigneuries fut d’abord poussé aussi loin, puis, ici aussi, un certain nombre de grandes baronnies préparèrent le regroupement territorial.

Les sages d’autrefois. La spéculation philosophique en Chine, on l’a vu, sort peut-être de très anciennes conceptions naturalistes nées au spectacle de l’alternance des saisons. Ce serait devant le rythme saisonnier que la pensée chinoise de l’époque archaïque aurait été amenée à classer les choses selon deux catégories générales, le yin et le yang, qui représentaient l’obscurité et la lumière, l’humidité et la chaleur, et, par analogie, la terre et le ciel, la rétraction et l’expansion, le genre féminin et le genre masculin, principes dont l’opposition et l’alternance, mais aussi l’interdépendance ou, mieux encore, la mutation expliquaient le processus des choses et toute la vie de l’univers. A ces deux principes opposés s’en superposa bientôt un troisième, le tao, qui était comme la loi même de leur solidarité, de leur interdépendance et de leur enchaînement sans fin.

De l’empire militaire à l’empire traditionnel. Les historiens chinois se sont plu à opposer le caractère des deux principaux capitaines qui se disputaient ainsi le pouvoir, Lieou Pang et Hiang Yu : Hiang Yu, géant brutal aux allures de soudard ; Lieou Pang, type de Chinois politique, rusé et adroitement généreux, encore que, lui aussi, aventurier sans passé. De Lieou Pang surtout ils nous ont laissé un portrait haut en couleur. « C’était un homme au nez proéminent, au front de dragon, avec une belle barbe. Sur la cuisse gauche il portait soixante-douze points noirs »  — signe, évidemment, de sa grandeur future. « Bien que fort pauvre, il aimait le vin et les femmes. » On nous apprend qu’il allait boire chez une vieille marchande, la dame Wang ; soit générosité, soit vantardise, il offrait toujours de payer le vin au-dessus du prix fixé ; en réalité il n’achetait qu’à crédit. Il est vrai qu’un jour que, parfaitement ivre, il s’était endormi dans la boutique, la vieille crut voir au-dessus de lui planer un dragon, nouveau présage d’une haute destinée : plus que jamais elle donna son vin à crédit.

Triomphe des Lettrés. Nous venons d’évoquer le parallélisme entre la formation de l’empire romain et celle de l’empire des Han. Il faut que la conquête romaine ait été bien solide pour n’avoir pas été remise en question par la guerre civile qui, du passage du Rubicon à la bataille d’Actium, sévit de manière à peu près permanente dans le monde latin (49-31 avant J.-C.). De même la Chine des Han subit quelques années plus tard une crise si grave que la dynastie faillit y disparaître, mais à laquelle la domination chinoise en Asie devait finalement résister.

Révélation du bouddhisme. Le bouddhisme est une religion essentiellement indienne et qui resta limitée à l’Inde pendant six cents ans. Son fondateur, Çâkyamouni, qui mérita de devenir le Bouddha, c’est-à-dire le sage par excellence, avait vécu dans le bassin oriental du Gange entre 563 et 483 avant J.-C. C’était un jeune noble de la jungle népalaise qui avait renoncé au monde pour mener la vie érémitique. Après de longues macérations il en discerna l’inutilité et sous l’Arbre de la bodhi, à Gayâ, au sud de l’actuel Patna, dans le Sud‑Bihar actuel, il parvint à « l’illumination ». Il comprit la loi de la douleur universelle : le monde n’était qu’un torrent d’impermanence se résolvant en douleur. Ce pessimisme, disons-le tout de suite, provenait d’une croyance universellement admise dans l’Inde, la croyance à la métempsycose ou transmigration des âmes. Le spiritualisme occidental nous propose comme récom-pense la vie éternelle. La vie éternelle que proposaient les doctrines indiennes prenait forme de cauchemar parce que liée aux aléas de la transmigration : naître, souffrir, mourir, renaître pour éternellement souffrir et mourir, c’étaient « les travaux forcés de la vie à éternité ».

Splendeur et décadence des Han. La longue paix des Han valut à la Chine une richesse inouïe. L’histoire de l’art en porte témoignage.

L’art des Han est particulièrement intéressant pour nous parce qu’il est l’aboutissement de toute l’évolution artistique des époques antérieures. Et cela à la veille du moment où les influences étran­gères, introduites par le bouddhisme, vont bouleverser les données traditionnelles.

T’ai-tsong le Grand. La chute de la dynastie souei semblait devoir précipiter la Chine dans une nouvelle période de morcellement et d’anarchie. Dans chaque province surgissaient des chefs militaires qui se disputaient le pays. Ce fut alors qu’apparut le guerrier de génie qui de ses puissantes mains allait restaurer l’empire et imposer pour trois siècles un cours nouveau à l’histoire et à la civilisation chinoises.

Un grand siècle : au temps du poète Li T’ai-po. L’empereur Hiuan‑tsong à son avènement n’avait que vingt-huit ans. Il était actif, courageux de sa personne — il l’avait prouvé dans la dramatique nuit du 25 juillet 710, — avec un sentiment très vif de ses devoirs, de la grandeur de sa maison, du rôle impérial de la Chine en Asie. Son règne (712-756) fut un des grands règnes, son siècle fut à bien des égards le « Grand Siècle » de l’histoire chinoise. Rarement autant de talents se trouvèrent groupés. Fort lettré, poète et musicien lui-même, Hiuan‑tsong protégea personnellement les lettres et s’entoura d’une pléiade de poètes. Ce fut de son temps que vécurent les deux plus grands lyriques de la Chine, Li T’ai-po (701-762) et Tou Fou (712-770).

Crise sociale et ruine de l’État. La Chine des T’ang ne se remit jamais complètement de la secousse causée par la révolte de Ngan Lou‑chan. La restauration impériale qui parut terminer le drame ne réussit point à ramener l’ancienne prospérité. Pendant les troubles la Chine avait perdu, exception faite de l’Annam‑Tonkin, toutes ses possessions extérieures. Les huit années de guerre civile (755-763) avec leur bilan de pillages, de destruction de richesses, d’abandon des cultures, provoquèrent une énorme diminution de la population. A la veille de la guerre civile, après cent quarante ans de paix intérieure, le recensement de 754 avait accusé un nombre de familles équivalant à 52 millions d’habitants. En 839, quand cependant la restauration avait eu déjà trois quarts de siècle pour effacer les maux de la guerre civile, le recensement ne donnait plus que 30 millions.

Les Song et le problème des réformes. La dynastie des Song est une dynastie selon le cœur du peuple chinois. Non qu’ils aient renouvelé en Asie les conquêtes des Han et des T’ang. Tout au contraire, ils ne réussirent pas à chasser les Tartares des portions du territoire national que ceux-ci détenaient encore et dans la seconde moitié de leur règne ils durent abandonner à ces mêmes Tartares toute la Chine du Nord. Mais les lettrés chinois n’ont jamais prisé la gloire des armes à l’égal de la culture ; leur tournure d’esprit classique, sans doute aussi leur jalousie de classe à l’égard de l’élément militaire les poussaient à dénigrer systématiquement au nom de la philosophie toute politique guerrière, quitte, lorsque leurs théories antimilitaristes avaient provoqué l’invasion, à opposer aux armes victorieuses une protestation impuissante et un patriotisme tardif. La lecture du T’ong kien kang mou, l’histoire générale de la Chine écrite précisément par le représentant le plus qualifié des intellectuels song, est caractéristique à cet égard. En revanche la dynastie song ne pouvait que mériter leur sympathie par son goût pour la culture classique, les spéculations philosophiques, l’érudition, l’archéologie, le dilettantisme.

Un rêveur couronné : l’empereur Houei-tsong. L’empereur Houei-tsong, monté sur le trône de K’ai-fong à l’âge de dix-neuf ans en février-mars 1100, fut un des souverains les plus cultivés qu’ait possédés la Chine. Esthète et archéologue, grand collectionneur et critique d’art, il fut lui-même un peintre de talent. Il présidait en personne les réunions du T’ou‑houa‑yuan, académie de peinture dont les membres, vêtus de violet et portant des insignes d’or et de jade, jouissaient du privilège d’être admis dans les appartements privés du souverain. Houei-tsong proposait lui-même aux peintres les sujets de concours et jugeait les candidats. Nous connaissons quelques-uns de ces thèmes qui montrent bien le goût impérial : « Les bambous enveloppent l’auberge près du pont » ; ou bien : « une barque restant toute la journée sans emploi, personne ne désirant passer la rivière » ; et encore : « la promenade d’un faisan dans le parc du palais ». personnellement l’empereur était spécialisé dans les peintures d’oiseaux et de fleurs et il est possible que certaines des œuvres à lui attribuées dans les collections japonaises soient effectivement de son pinceau. Il avait d’autre part réuni dans son palais de K’ai-fong une collection unique de peintures anciennes (plus de six mille noms !) dont nous avons encore le catalogue.

La douceur de vivre. La dynastie des Song, ayant renoncé à l’espoir de reconquérir la Chine du Nord, ne songea plus, dans son empire désormais res-treint aux provinces méridionales, qu’à retrouver l’atmosphère de poésie et d’art des palais de K’ai-fong, la douceur de vivre. Deux courtes guerres contre les Kin, en 1161 et 1206, ne troublèrent qu’épisodiquement la paix. En dépit des énormes pertes territoriales faites par l’empire, la catastrophe de 1126 ne sembla elle-même qu’un simple épisode. Dans tous les domaines la délicate civilisation des Song, fleur de la culture chinoise, continuait. Le moment est venu d’en évoquer l’art et la poésie. Nous commen-cerons par un retour sur l’époque de K’ai-fong (960-1126) pour passer ensuite à celle de Hang-tcheou (1132-1276).

Cristallisation de la pensée chinoise. L’époque song n’est pas marquée seulement par cette extraordinaire floraison artistique, mais aussi par la renaissance de la philosophie confucéenne et, plus généralement, par l’importance accordée aux luttes d’idées. Or il se trouva que précisément à cette époque la mise au point d’une découverte inestimable vint donner à la pensée chinoise un instrument encore inconnu partout ail­leurs : la découverte ou plutôt la généralisation de l’imprimerie.

Le conquérant du monde. Tandis que dans leur ville d’art de Hang‑tcheou les derniers Song se passionnaient pour des problèmes d’esthétique ou de métaphysique, Gengis‑khan avait commencé la conquête de l’Asie.

Marco Polo. L’exemple des chrétiens mongols partis de Pékin à travers l’Asie centrale pour faire le pèlerinage de Jérusalem montre à quel point la conquête mongole, en unifiant l’Asie, avait rouvert les routes transcontinentales. Cette antique route de la soie et du pèlerinage bouddhique, fermée depuis le XIe siècle par les progrès de l’Islam, voici qu’elle laissait à nouveau passer les caravanes de marchands et de pèlerins. Là est l’indéniable bienfait de la conquête mongole : Gengis‑khan avait rendu possible Marco Polo.

Une  restauration nationale : les Ming Au cours de sa longue histoire, la Chine compte peu de sou-verains aussi remarquables que Qoubilaï. Par sa forte personnalité, ses qualités d’homme d’État, sa haute sagesse, la fermeté et l’humanité de son gouvernement, ce Mongol se place sur la même ligne que les plus grands empereurs chinois du temps passé. Son petit-fils et successeur Tèmur fut encore un prince énergique et conscien-cieux (1294-1307). Mais après eux leur dynastie, la dynastie Yuan, comme elle se dénommait, tomba dans une rapide dégénérescence. Ses princes, perdus de débauches et atteints d’aboulie, ne rachètent leurs vices que par une bigoterie lamaïque dont les lettrés confucéens leur font un nouveau grief. Surtout ils ne cessent de se quereller entre eux, ruinant en quelques années l’imposante façade administrative qui sous Qoubilaï a provoqué l’admiration de Marco Polo. Le dernier d’entre eux, Toghan Tèmur (1333-1368) qui ne se plaisait que dans la compagnie des lamas tibétains et des mignons, laissa le désordre dégénérer en anarchie.

Les grands empereurs mandchous : K’ang-hi et K’ien-long. La mainmise des Mandchous sur le trône de Chine en 1644 avait, il faut bien le reconnaître, tenu de l’escamotage. Avec une habileté qu’on n’eût guère attendue de ces barbares, les régents mandchous s’étaient glissés dans Pékin à la faveur de la lutte entre le bandit usurpateur et le général légitimiste, en aidant le second à châtier le premier, le tout aux applaudissements des loyalistes et du mandarinat ; dans la carence du pouvoir et sans effusion de sang ils s’étaient alors trouvés maîtres du vieil empire. Il y avait loin de cette prise de possession, somme toute pacifique, aux vingt années de dévastations et de massacres qu’avait exigées au XIIIe siècle la conquête de la Chine du Nord par les Mongols.

L’irruption de l’Occident. C’est le rythme même de l’histoire chinoise que les lignées impériales, après deux ou trois générations d’hommes de valeur, tombent dans l’abâtardissement. Le vieil empire que les fondateurs de dynasties avaient périodiquement refait, se dissocie à nouveau. La famille mandchoue montée sur le trône en 1644 et qui devait le conserver jusqu’en 1912, n’échappa point à cette loi. A partir de son cinquième souverain, Kia‑k’ing (1796-1820), la dégénérescence était évidente et ne devait faire que s’accentuer. Le mal-heur voulut que cette période d’épuisement dynastique corres-pondît à l’époque où le reste du monde, sous l’influence de l’esprit scientifique et du machinisme, se renouvelait. Les conséquences furent rapides. Vers 1650-1700 la Chine s’était encore maintenue à peu près au niveau de l’Europe comme l’avaient prouvé l’ex-pulsion des Hollandais de Formose et le recul des Russes à Albazin. Vers 1820-1850, elle se trouva tout à coup en retard de plusieurs siècles.

La révolution chinoise. Les victoires japonaises de 1904-1905 avaient été pour la cour de Pékin une révélation. L’impératrice Ts’eu‑hi et les princes mandchous comprirent enfin qu’en s’opposant à l’adoption des méthodes européennes, ils s’étaient privés du moyen de tenir tête à l’Europe. Adorant ce qu’elle avait brûlé, la vieille souveraine (elle avait maintenant soixante-dix ans) promulgua des édits qui rappelaient à s’y méprendre les fameuses instructions impériales de la période des Cent jours. Comme elle ne pouvait cependant faire appel aux réformistes de 1898 dont la séparait trop de sang versé, elle plaça à la direction des affaires les vice-rois progres-sistes dont elle avait si longtemps négligé les conseils et au premier rang le nouveau vice-roi du Tche‑li, Yuan Che‑k’ai. 

… et la fin du dernier.

Au terme de cette histoire de plus de trente siècles, que conclurons-nous ? Par quels points de repère jalonner cet immense passé ? Si nous posions la question aux érudits chinois, ils nous inviteraient sans doute à nous reporter à la liste, singulièrement brève, de ceux de leurs souverains qui, au cours de l’histoire, s’esti-mèrent dignes d’offrir le « sacrifice fong ».

C’était la cérémonie la plus auguste de l’antique religion impériale, célébrée dans la province du Chan‑tong, sur le sommet du T’ai-chan, la montagne la plus élevée de la Chine orientale qui, de ce fait, dans la croyance populaire, assurait la fermeté du sol, la régularité des pluies fécondantes, l’arrivée des âmes au berceau, le départ des mânes à l’heure de la mort. L’empereur ne gravissait le suprême sommet que pour s’entretenir directement avec la divinité, lui annoncer que l’empire jouissait du calme, et la dynastie du mandat céleste. Or, ce témoignage solennel, cinq sou­verains seulement ont, au cours des siècles, cru pouvoir en assumer la responsabilité, et les annales chinoises les énumèrent avec respect : ce furent l’empereur Wou‑ti, l’homme fort de la première dynastie Han, en 100 avant J.-C., quand la Pax Sinica fut par lui établie sur presque toute l’Asie orientale ; puis l’empereur Kouang Wou‑ti en 56 de notre ère, quand les Han eurent été par lui restaurés pour deux siècles de gloire ; puis les empereurs Kao-tsong et Hiuan‑tsong, en 666 et 725, deux dates où la Chine des T’ang apparaissait comme la maîtresse de l’Asie ; enfin l’excellent empereur Tchen‑tsong en 1008, lorsque la dynastie des grands Song eut rétabli l’unité chinoise et une longue paix.

Depuis lors — depuis neuf cent trente-quatre ans — aucun chef d’État chinois, non pas même les Ming, pourtant si favorables aux divinités du T’ai-chan, n’estima pouvoir se confronter avec le dieu qui préside à la stabilité du sol comme à la naissance et à la mort des générations. Mais par-delà dynastes et dynasties, plus ancien même que le culte des sages confucéens, celui de la montagne demeure, et d’innombrables pèlerins continuent à gravir le sommet sacré pour obtenir la fécondité de leur foyer et de leur champ. Existe-t-il meilleur symbole d’une stabilité et d’une continuité qui survivent à toutes les vicissitudes de l’histoire, la sta-bilité de cette patiente race de paysans, la continuité du labeur obstinément poursuivi sur cette même glèbe depuis plus de trois millénaires ?


Retour au livre de l'auteur: René Grousset (1885-1952) Dernière mise à jour de cette page le lundi 15 janvier 2007 7:17
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur au Cegep de Chicoutimi.
 



Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
La vie des Classiques des sciences sociales
dans Facebook.
Membre Crossref