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Collection « Les auteur(e)s classiques »

Koue-Yü, Discours des royaumes (1re partie, 1893-1894)
Extraits


Une édition électronique réalisée à partir du texte KOUE-YÜ, Discours des royaumes, première partie. Traduits et annotés par C. de HARLEZ (1832-1899). Article paru dans le Journal asiatique : 1893, Sér. 9, T. 2, pp. 373-419, et 1894, sér. 9, T. 3, pp. 5-91. Reproduit en fac-similé sur le site Gallica de la Bibliothèque Nationale de France. Une édition réalisée par Pierre Palpant, bénévole, Paris.

La 29eB23. — Koue-Yü, Discours des royaumes (1re partie, 1893-1894),
traduits et annotés par C. de Harlez (1832-1899).

Extraits.

Kong-Wang se promenait sur les bords du King. Le duc Kien de Mit l’y suivit. Il  avait trois filles que le roi eut pu prendre comme épouses secondaires. Sa mère lui dit :

— (Prenez garde). Vous devriez les  présenter au roi. Trois brebis forment un troupeau ; trois hommes forment une pluralité. Trois filles forment un beau trio. Le roi à la chasse ne prend pas un troupeau. Un prince doit agir de manière à satisfaire le grand nombre. L’entourage du roi ne doit pas  réunir trois membres d’une même famille. Un trio de belles femmes est chose délectable ; beaucoup, pour le posséder, ont répudié leurs épouses. Que de vertus pour résister à cette tentation ! Un roi ne supporterait de céder en ce point à un être inférieur comme vous... Le faible qui s’expose à un risque extrême y périt.

Persuadé, par sa mère, le prince de Mi n’alla point  rendre hommage au roi, n’offrit point ses filles et l’année suivante Kong-Wang (irrité) anéantit sa principauté. 

Li-Wang  se conduisait d’une manière oppressive ; le peuple le décriait. Le kong de Tai l’en avertit et lui dit :

—  Le peuple ne supporte plus votre domination.

Le roi, irrité, fit venir des devins de Wei pour surveiller et découvrir les médisants, et ceux qui lui étaient dénoncés étaient mis à mort. Les gens alors n’osèrent plus rien dire, mais se regardèrent seulement d’un regard significatif.

Le roi, tout joyeux, dit au kong de Tai :

— J’ai su arrêter les méchantes langues ; maintenant elles n’osent plus rien dire.

Le kong lui répondit :

— Cela c’est simplement endiguer. Endiguer, fermer la bouche, du peuple, c’est plus difficile encore que d’arrêter un torrent. Le torrent que l’on veut obstruer rebondit et cause encore plus de dommages aux hommes ; il en est ainsi du peuple. (Il s’élèvera encore davantage contre son chef et lui nuira plus encore.)

De même que 1e torrent, si l’on sait faire couler ses eaux, peut-être dirigé convenablement, de même, si le peuple est traité avec bonté, laissé libre, il par-lera comme il pense.

Aussi le Fils du Ciel, voulant savoir, entendre dire ce qu’est son gouvernement (ce qu’on en pense), se fait présenter les poésies populaires par ses ministres et fonctionnaires supérieurs ; les chants, par les (musiciens) aveugles ; les annales historiques, par les historiens ; les avertissements et remontrances, par les docteurs ; les poésies légères, irrégulières (fou), par les aveugles privés de pupilles ; les récits, par les aveugles pourvus de pupilles. Les artistes présentent aussi les avis, les représentations ; le public, les petites gens, parlent à leur gré. Les officiers du palais achèvent leurs comptes. Les censeurs examinent les fautes et scrutent la conduite politique des chefs du peuple. Le chef des musiciens et le grand annaliste instruisent et avertissent, reprennent ; les docteurs préparent le texte de ces avertissements et les présentent au souverain. Celui-ci doit les accepter et les suivre.
Quand cela se fait ainsi, les affaires du royaume ont un cours prospère ; il ne se produit pas de rébellion. Le peuple a des bouches comme la terre a des montagnes et des fleuves ; les biens, les richesses, en sortent, comme la rivière de sa source. C’est du travail du peuple que viennent les vêtements et la nourriture nécessaires à la vie. Ce qui sort de la bouche, les paroles, peut causer le mal comme le bien. Ce qui est bien, on le fait ; ce qui est mal, on le prévient et l’entrave. Ce que le peuple médite en son cœur, il l’exprime et le répand par sa bouche ; il l’entreprend et l’accomplit. Alors on peut l’arrêter (puisqu’on sait ce qu’il projette). Si on le bâillonne,  comment saura‑t‑on ce que l’on a à craindre ou attendre de lui ?

Le roi n’écouta pas ces remontrances.

Le roi ne voulut pas écouter les conseils de son ministre et trois ans après le peuple le chassa et le relégua à Yong-ngân, à l’est du Ho. 

La deuxième année du règne de Yeou-Wang, les trois fleuves du Tsi-tcheou se soulevèrent et leurs eaux furent jetées hors de leur lit.

Apprenant ce fait, Pe-Yang-fou, grand officier de Tcheou, dit :

— Tcheou périra bientôt. Les éléments  actifs du ciel et de la terre ne doivent point troubler leurs rapports d’ordre ; s’ils les intervertissent, le peuple sera dans le trouble. Quand le Yang se baisse, il ne sait plus sortir des éléments où il est entré. Quand le Yin lui résiste et presse contre le Yang, il ne sait plus s’élever. C’est quand ces circonstances se produisent qu’il y a un tremblement de terre.
Voilà que le lit des trois fleuves tremble, c’est que le Yang est sorti de sa place naturelle et écrase le Yin dans lequel il s’est introduit. La source des fleuves est obstruée, et quand cela arrive, l’État périt. Quand l’eau imbibe la terre, le peuple jouit de leurs fruits ; quand elles ne se pénètrent pas, le peuple manque des ressources nécessaires.

Comment espérer ne point périr ?

Quand jadis le Lo s’épuisa, la dynastie Hia prit fin ; quand le Ho perdit ses eaux, celle des Shangs périt. Aujourd’hui la vertu, la puissance de Tcheou est tombée au rang de celles des derniers souverains des deux premières dynasties. Les sources de ses fleuves sont obstruées ; ils s’épuiseront. L’État est comme ses montagnes, et ses fleuves. Les montagnes s’écroulent, les fleuves se tarissent, c’est le signe certain de la décadence. Les fleuves s’épuisent déjà, les montagnes tomberont ; la ruine de l’État ne tardera pas de plus que onze ans. Ce que le ciel rejette ne dépasse pas ce terme.

Il en fut comme disait Tchong-Yang-fou. Les trois fleuves se desséchèrent, le mont Khi s’écroula et la onzième année après ce discours, Yeou‑Wang fut assassiné, la puissance du roi de Tchou se transporta à l’est.


Retour au livre Koue-Yü, Discours des royaumes Dernière mise à jour de cette page le mercredi 10 janvier 2007 13:55
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur au Cegep de Chicoutimi.
 



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