Dantès Bellegarde, Écrivains haïtiens. Notices biographiques et pages choisies


 

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Collection « Les auteur(e)s classiques »

Dantès Bellegarde, Écrivains haïtiens. Notices biographiques et pages choisies. (1947)
Préface


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Dantès Bellegarde, Écrivains haïtiens. Notices biographiques et pages choisies. Première série. Port-au-Prince: Société d'Éditions et de Librairie, 1947, 302 pp. Une édition numérique réalisée par Meschac Lebrun, bénévole, slameur, Ville de Port-au-Prince Ouest, Haïti.

[7]

Écrivains haïtiens.
Notices biographiques et pages choisies.

Première série

Préface

À la veille du centenaire de l'indépendance nationale, l'Œuvre des Écrivains Haïtiens, fondée en 1897, confia à quatre de ses membres, Solon Ménos, Georges Sylvain, Amilcar Duval et moi-même, le soin de composer un recueil de morceaux choisis des poètes et des prosateurs d'Haïti.

Cette anthologie en deux volumes parut à Port-au-Prince le 1er janvier 1904. Deux ans plus tard, elle fut couronnée par l'Académie française qui adressa à cette occasion, par la plume de son secrétaire perpétuel, M. Gaston Boissier, « un salut lointain aux Haïtiens restés fidèles à la culture française ».

Commentant cet événement littéraire, l'un des auteurs du recueil, M. Solon Ménos, disait dans un discours du 14 janvier 1907 : ...« Telle est l'excellence de l'art que devant lui s'évanouissent instantanément les malentendus et même les préventions les plus invétérées. Le prix décerné par l'Académie française est d'autant plus estimable qu'il s'applique à un ouvrage consacré à la glorification de notre indépendance. Il n'est pas téméraire de dire qu'une coïncidence aussi significative accroît la haute valeur de cette récompense, attribuée comme par un décret de grande naturalisation à notre littérature autonome. »

« Littérature autonome » est bien l'expression qui convient pour caractériser la production littéraire haïtienne durant un siècle et demi d'existence nationale, sans qu'on veuille ou puisse donner au mot « autonomie » le sens excessif d'autarcie culturelle.

La littérature haïtienne a été avant tout une littérature d'action. [8] La plupart de nos auteurs ont écrit beaucoup plus pour agir que pour faire œuvre littéraire. Ils se sont en effet inspirés de la lutte héroïque pour la liberté et l'indépendance ou se sont consacrés à débrouiller nos origines historiques et à discuter des plans d'organisation sociale. Presque tous ont milité dans la politique. C'est pourquoi le groupe des historiens et sociologues est particulièrement imposant. Et c'est aussi pourquoi leurs productions, nées dans la fièvre des polémiques, manquent souvent de ces qualités de fond et de forme qui donnent une valeur durable aux œuvres de l'esprit.

Guy-Joseph Bonnet, Thomas Madiou, Baron de Vastey, Beaubrun Ardouin, Céligny Ardouin, Saint-Rémy, Bauvais Lespinasse, Emile Nau, Eugène Nau, Linstant-Pradines, Saint-Amand, Hannibal Price, F. D. Légitime, Demesvar Delorme, Edmond Paul, Armand Thoby, Louis-Joseph Janvier, Duraciné Pouilh, Emmanuel Edouard, J. B. Dehoux, Enélus Robin, Dantès Fortunat, Dulciné Jn-Louis, Justin Bouzon, Joseph Jérémie, Justin Dévot, Frédéric Marcelin, Georges Sylvain, Solon Ménos, Jacques N. Léger, Joseph Justin, J. B. Dorsainvil, L. J. Marcelin, Edmond Héraux, Benito Sylvain, H. Pauléus-Sannon, Fleury Féquière, Thalès Manigat, Nemours Auguste, Vergniaud Leconte, Adhémar Auguste, Justin Lhérisson, L. C. Lhérisson, Léon Audain, Auguste Magloire, Windsor Bellegarde, Sténio Vincent, Price Mars, Abel Léger, Général Nemours, Gaston Dalencour, B. Danache, Antoine Michel, J. C. Dorsainvil, Duraciné Vaval, François Dalencourt, Louis Mercier, Placide David, Louis Emile Elie, Jules Faine, Susanne Comhaire-Sylvain, Catts Pressoir, Rulx Léon, Camille Lhérisson, Madeleine Max Bouchereau, T. C. Brutus, Pierre Eug. de Lespinasse, Rodolphe Charmant, Candelon Rigaud, Hannibal Price fils, Félix Soray, Félix Magloire, Mentor Laurent, Georges Séjourné, Francis Salgado, Hermann Corvington, Edmond [9] Mangonès, Charles Bouchereau, Clovis Kernizan, Etienne Charlier, Louis Maximilien, Kléber Jacob, Lorimer Denis et François Duvalier, Louis Mars, etc., ont écrit des études ou essais qui forment une contribution importante à l'histoire de la société haïtienne.

Peu de poètes haïtiens ont cherché leur inspiration dans le folklore national, comme l'a fait avec succès le musicien Justin Elie qui a puisé dans les chants populaires la matière de la plupart de ses compositions. Les autres, en plus grand nombre, sont descendus en eux-mêmes et nous ont raconté leurs joies et peines en des poèmes intimes ou dans des confessions lyriques. Quelques-uns ont abordé ces grands thèmes éternels l'amour, la mort, la destinée humaine, la patrie, Dieu qui sont les mêmes pour les poètes de tous les temps et de tous les pays.

La liste des poètes, dont certains sont en même temps des prosateurs remarquables, est très longue : Jules Solime Milscent, Isaac Louverture, Pierre Faubert, Coriolan Ardouin, Ignace Nau, C. Séguy-Villevaleix, Virginie Sampeur, Oswald Durand, Abel Elie, A. Fleury-Battier, Alcibiade Pommayrac, Ducas-Hippolyte, Pascher Lespès, Aurèle Chevry, McDonald Alexandre, Isnardin Vieux, Louis Borno, Georges Sylvain, Auguste Scott, Arsène Chevry, Massillon Coicou, Amédée Brun, Etzer Vilaire, Justin Lhérisson, Nerva Lataillade, Edmond Laforest, Damoclès Vieux, Probus Blot, Maurice Brun, Constantin Mayard, Ernest Douyon, Seymour Pradel, Ida Faubert, Charles Moravia, Timothée Paret, Léon Laleau, Henri Durand, Luc Grimard, Dominique Hippolyte, Frédéric Burr-Reynaud, G. Lescouflair, Christian Werleigh, Louis Morpeau, Antonio Vieux, L. D. Hall, Emile Roumer, Carl Brouard, Jacques Roumain, Jean Brierre, Roussan Camille, Pierre Mayard, Gervais Jastram, Magloire-St-Aude, Regnord Bernard, René Bélance, [10] Marcel Dauphin, Justinien Ricot, P. Chrisphonte, René Dépestre, etc.

Parmi les romanciers et conteurs nous trouvons quelques noms distingués : Eméric Bergeaud, Demesvar Delorme, Janvier, Frédéric Marcelin, Justin Lhérisson, Fernand Hibbert, Antoine Innocent, Justin Godefroy, Jules Dévieux, Amilcar Duval, Félix Magloire, Edgar N. Numa, J. B. Cinéas, Stéphen Alexis, Luc Grimard, Léon Laleau, Félix Courtois, Thomas Lechaud, Richard Constant, Marc Verne, Cléante Valcin Desgraves, Mme Etienne Bourand, Emile Marcelin, Pétion Savain, Casséus, Jacques Roumain, les frères Thoby-Marcelin, F. Morisseau-Leroy, Jn-Joseph Vilaire, Victor Mangonès, Gaston Théard, Léon Lahens, Félix Viard, etc.

L'absence de théâtres réguliers a toujours été un obstacle à la production dramatique en Haïti. Ce genre est cependant représenté par des écrivains notables : Pierre Faubert, Liautaud Ethéart, Fleury-Battier, Henri Chauvet, Massillon Coicou, Vandenesse Ducassc, Georges Sylvain, Ed. Saintonge, Amilcar Duval, Duraciné Vaval, Fernand Hibbert, Léon Laleau, Georges Léger, F. Burr-Reynaud, Dominique Hippolyte, André Chevallier, Alphonse Henriquez, Augustin, Stéphen Alexis, Etienne Bourand, Henri Durand, Daniel Heurtelou, Mme Olivia Manigat-Rosemond, Jean Brierre, Mme Jeanne Pérez, Pierre Mayard, Roger Dorsinville, etc.

Ces listes sont loin d'être complètes. Beaucoup d'œuvres de valeur sont restées en portefeuille ou se sont perdues faute d'éditeurs pour les publier. Un grand nombre d'écrivains journalistes, économistes, sociologues, conteurs, poètes, qui comptent parmi les meilleurs de notre littérature ont semé leurs richesses dans des journaux et revues aujourd'hui introuvables. Une large place devrait également être réservée aux orateurs tels Charles Archin, Léger Cauvin, F. L. Cauvin, [11] Michel Oreste, Edmond Lespinasse, Louis-Edouard Pouget, Nemours Auguste, Pasteur Albert, Solon Ménos, Emile Deslandes, Etienne Mathon, Pierre Hudicourt, Yreck Châtelain, François Moïse, etc., qui, au parlement, au barreau ou dans la chaire, ont fait preuve d'un talent admirable.

Il m'a semblé que c'était un devoir patriotique de faire connaître à la génération présente et aux étrangers, amis d'Haïti, la plupart de ces hommes qui ont honoré notre littérature en travaillant, au milieu des tragiques difficultés de la vie nationale, à l'évolution intellectuelle de notre peuple.

L'ouvrage, dont j'offre aujourd'hui au public le premier volume, comprend trois séries, chacune de quarante écrivains haïtiens choisis parmi les prosateurs. J'ai pensé que la meilleure façon de les présenter était de donner de chaque auteur, avec une notice biographique assez complète, une page caractéristique de son talent, formant un tout par elle-même et vraiment intéressante pour le lecteur. C'était là un choix difficile à faire, et cela m'a obligé, pour éviter la monotonie, à « panacher » chacun des trois volumes en y faisant figurer des auteurs de genres différents appartenant à des générations différentes.

La lecture de cet ouvrage contribuera je l'espère à faire justice d'une opinion généralement répandue que les écrivains haïtiens ne se sont guère préoccupés, dans leurs œuvres, des choses d'Haïti. C'est le contraire qui est vrai.

Que, dans l'expression de leurs sentiments et de leurs pensées, les écrivains haïtiens aient subi l'influence de leurs modèles français et sacrifié bien souvent à des modes littéraires passagères, cela est trop naturel pour que l'on s'en étonne. Quelques élus ont pu toutefois se dégager de ces influences pour faire œuvre originale. Il en est de même dans toutes les littératures : très rares sont les écrivains qui, ayant eu le pouvoir [12] de s'évader de l'atmosphère intellectuelle dans laquelle ils vivaient, ont apporté au monde des formes d'art nouvelles ou révélé de nouveaux modes de sentir et de penser.

Il y a exactement cent-dix ans, un précurseur haïtien, Emile Nau, écrivait dans son journal Le Républicain de 1836 : « Nous ne pouvons pas nier que nous soyons sous l'influence de la civilisation européenne : autrement, il faudrait affirmer que nous ne devons qu'à nous-mêmes nos éléments de sociabilité. Mais il y a dans cette fusion du génie européen et du génie africain, qui constitue le caractère haïtien, quelque chose qui nous fait moins Français que l'Américain n'est Anglais ».

C'est ce « quelque chose » qui donne aux œuvres haïtiennes leur timbre particulier, même lorsque l'auteur, se rappelant qu'il est citoyen de l'humanité, aborde ces hauts sujets dont se nourrit la littérature universelle.

Dantès BELLEGARDE.

18 octobre 1946.


Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le vendredi 3 février 2017 14:39
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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