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Collection « Les auteur(e)s classiques »

Système de politique positive, publié entre 1851 et 1854
Extraits des tomes II et III
AVERTISSEMENT


Une édition électronique réalisée à partir du livre d’Auguste Comte (1854), Système de politique positive publié entre 1851 et 1854. Extraits des tomes II et III. Paris : Les Presses universitaires de France, Troisième édition, 1969, 212 pages. Collection : “SUP – Les Grands Textes”.


La pensée d'Auguste Comte a une forme tellement systématique qu'il est pratiquement impossible d'en étudier de près un élément, si l'on ignore entièrement la construction de l'ensemble. Il faut donc connaître au moins les cadres où s'inscrit cette pensée, et les moyens d'expression qu'elle utilise, ce qui peut se faire d'ailleurs assez commodément, au moyen de tableaux ou de schémas, analogues à ceux que Comte lui-même a parfois publiés.


I. - La Loi des trois états (dite loi de filiation, ou loi d'évolution) est principalement exposée dans le tome III du Système de politique positive ; on en trouvera donc le détail dans la Deuxième Partie du présent volume . Mais on aura avantage à connaître d'ores et déjà l'ordre de succession et les caractères principaux des trois états, c'est-à-dire des trois formes que prennent successivement toutes les conceptions humaines, individuelles ou collectives, à partir de l'enfance jusqu'à l'âge viril. L'état initial est l'état « théologique », caractérisé par la recherche des causes, et la fiction des divinités; l'état final, état scientifique ou « positif », substitue la détermination des lois à la recherche des causes, et les connaissances relatives aux connaissances absolues ; l'état intermédiaire, ou « métaphysique », est un état « équivoque », qui, substituant les entités aux divinités, constitue une sorte d'état théologique dégénéré - liant l'un à l'autre, Comte parle souvent de l'état « théologico-métaphysique » - mais qui, en un autre sens, ruinant les fictions théologiques, peut apparaître comme une première manifestation de l'état positif.

Les caractères de ces trois états sont rassemblés dans le Tableau suivant.

LA LOI DES TROIS ÉTATS

L'enfance

L'adolescence

La virilité

ÉTAT THÉOLOGIQUE ou fictif (chimérique).

ÉTAT MÉTAPHYSIQUE (ontologique) ou abstrait ou négatif, critique, dissolvant.

ÉTAT SCIENTIFIQUE (physique) ou positif.

État initial (provisoire, préparatoire.

État transitoire (intermédiaire).

État final, définitif, fixe (normal).

Prétention à la connaissance absolue (recherche des causes)

Connaissance relative
(science: lois)

Synthèse absolue donc fictive.

Impuissance à organiser.

Synthèse réelle, parce que relative, subjective.

Les théologiens (la fiction) et les militaires (la conquête)

Les métaphysiciens (l'abstraction) et les légistes (la défense)

Les savants (la démonstration) et les industriels (le travail)


II. - La Série des sciences (dite aussi loi de classement) est l'objet du Cours de philosophie positive tout entier; elle se Présente sous la forme d'une hiérarchie des six sciences fondamentales - Mathématique, Astronomie, Physique, Chimie, Biologie, Sociologie - disposées selon un ordre de dépendance (les suivantes dépendant des précédentes, mais non réciproquement), qui se trouve être aussi l'ordre de généralité et de simplicité décroissantes (ou l'ordre de spécialité et de complexité croissantes), l'ordre de dignité croissante - des sciences « inférieures » aux « supérieures » - et l'ordre d'importance humaine croissante ; c'est également l'ordre dans lequel les sciences se sont trouvées constituées à l'état positif, et celui selon lequel elles doivent être enseignées; enfin, à mesure qu'on passe des sciences du Monde aux sciences de l'Homme, les phénomènes sont de moins en moins aisés à prévoir, mais de plus en plus faciles à modifier.

Sur cet ordre, qui constitue proprement une « série », il convient de faire deux remarques :

Comte a reconnu, a un certain moment (vers 1850) la nécessité de la prolonger en y ajoutant une septième science fondamentale, la Morale. Ayant pour objet l'étude de l'individu, comme la Sociologie celle de l'Humanité, la Morale considère dans l'homme, non seulement l'intelligence et l'activité, comme la Sociologie, mais aussi le sen-ti-ment. Ainsi c'est la science la plus complexe, la seule complète, parce que vrai-ment concrète: elle considère son objet, l'individu humain, dans sa totalité, alors que toutes les autres ne retiennent que certaines propriétés des êtres, en faisant abstraction des autres.

D'autre part, en toute occasion, Comte se plaît à retrouver cette série en progres-sant de divisions en subdivisions, ou inversement à la simplifier au moyen de réductions ou d'unifications successives, qui ne groupent pas toujours de la même façon les six - ou sept - sciences, mais qui ont, généralement, pour fin de condenser les termes inférieurs (les premiers de la liste) et de donner de plus en plus d'importance aux termes supérieurs. On peut donc composer un tableau qui permette de comparer les unes aux autres quelques-unes des figures variées que prend la série des sciences, à travers l'œuvre de Comte.


LA SÉRIE DES SCIENCES

Sciences
des corps bruts
= PHYSIQUE INORGANIQUE

Phénomènes généraux
de l'univers = PHYSIQUE
CÉLESTE ou

Mathématique.

Couple initial
(mathématico-astronomique).

Science préliminaire : Cosmologie (étude de la terre).

Cosmologie
abstraite = Mathématique
(étude fondamentale
de l'existence universelle).

 

Astronomie.

Phénomènes particuliers
aux corps terrestres
= PHYSIQUE TERRESTRE

Physique.

Couple intermédiaire

(physico-chimique).

Cosmologie
concrète = PHYSIQUE
(étude directe
de l'ordre matériel).

Physique céleste = Astronomie

 

Ordre matériel (Cosmologie).

Mathématique.

 

Astronomie.

Chimie.

Physique terrestre.

Physique générale = Physique

Lois physiques (l'activité).

Physique.

 

Chimie.

Physique spéciale = Chimie

 

Ordre vital (Biologie).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Sciences
des
corps organisés
= PHYSIQUE ORGANIQUE

Phénomènes
relatifs à l'individu = PHYSIOLOGIE ou

Biologie.

Couple final
(biologico-bociologique).

Science finale : SOCIOLOGIE (étude de l'homme).

Sociologie préliminaire = BIOLOGIE
(étude générale
de l'ordre vital).

 

 

 

 

 

 

 

Phénomènes relatifs
à l'espèce
= PHYSIQUE SOCIALE ou

Sociologie

 

 

 

SOCIOLOGIE FINALE
(étude directe
de l'ordre humain).

Collectif = Sociologie.

Lois intellectuelles (L'intelligence).

 

Individuel = Morale.

Lois morales (Ie sentiment).

 


III. - Il faut également se familiariser avec la Théorie de l'âme humaine que Comte utilise constamment. Elle distingue l'âme humaine en trois fonctions principales : sentiment, intelligence, activité, ou mieux : cœur, esprit, caractère, constituant respectivement le principe, le moyen et le résultat de l'existence humaine, dont les relations sont exprimées dans le « vers » suivant : « Agir par affection, et penser pour agir. »

Lorsqu'il s'agit de décrire et d'apprécier les différentes manifestations humaines, individuelles ou collectives, Comte les ordonne régulièrement en fonction de cette division ternaire, pour laquelle il emploie toujours les mêmes termes, mais en les disposant selon un ordre déterminé, chaque fois, par les exigences du sujet. Par exemple, les trois types de sociétés humaines, Famille, Cité, Église, concernent respectivement le sentiment, l'activité et l'intelligence ; les trois forces sociales - et les trois « Providences » - sont définies par la même méthode; les trois éléments constitutifs de la religion, le dogme, le culte et le régime s'adressent à l'intelligence, au sentiment, à l'activité ; les trois « transitions », qui séparent la théocratie de la sociocratie, développent successivement l'intelligence (l'élaboration grecque), l'activité (l'incorporation romaine) et le sentiment (la civilisation catholico-féodale). Les différentes pro-ductions ou créations de l'activité humaine se répartissent selon le même plan : à l'ordre intellectuel, ou mental, appartiennent les productions philosophiques et scien-ti-fiques; à l'ordre matériel, ou physique, les productions esthétiques, et pratiques, ou techniques ; enfin à l'ordre moral appartiennent les institutions morales et politiques.

On trouvera, dans le Tableau suivant, le détail des dix « moteurs affectifs », des cinq « fonctions intellectuelles » et des trois « qualités pratiques »; ces divisions sont souvent utilisées, elles aussi; la division, par exemple, des instincts en égoïstes et altruistes, des instincts de « perfectionnement » en destructeur et constructeur, de l'ambition en orgueil et vanité, des sentiments en attachement, vénération et bonté, ou des fonctions intellectuelles en conception et expression.


TABLEAU SYSTÉMATIQUE DE L'ÂME

COEUR
 
(moteurs affectifs)

Personnels
(égoïsme)

Intérêt

Instincts de la conservation

de l'individu

Instinct nutritif

de l'espèce

Instinct sexuel

Instinct maternel

Instincts du perfectionnement

par destruction

Instinct militaire

par construction

Instinct industriel

Ambition

Temporelle. Besoin de domination...............

Orgueil

Spirituelle. Besoin d'approbation...................

Vanité

Sociaux
(altruisme)

Spéciaux......................................................................................................

Attachement

Vénération

Général........................................................................................................

Bonté

ESPRIT
(fonctions intellectuelles)

 

 

Concrète, relative aux êtres.............................

Synthétique

Conception

Passive
Contemplation

Abstraite, relative aux phénomènes.............

Analytique

 

 

Inductive, ou par comparaison........................

Généralisation

 

Active
Méditation

Déductive ou par coordination........................

Systématisation

Expression (Mimique, orale, écrite).............................................................................

Communication

CARACTÈRE (qualités pratiques)

Activité.......................................................................................................................................

Courage

Prudence

Fermeté.......................................................................................................................................

Persévérance


IV. - Le Vocabulaire de Comte est un vocabulaire technique. Certains des termes qu'il emploie ont été créés par lui, mais selon des analogies si claires qu'on peut se dispenser de les définir : il a créé sociologie, sur le modèle de biologie, ou de cosmologie, etc. ; sociocratie, sur théocratie ; astrolâtrie, sociolâtrie, sur idolâtrie, avec cette différence, toutefois» que ces deux mots ne comportent pas de nuance péjorative.

En dehors de ces inventions, exceptionnelles, Comte, toujours respectueux du langage humain, emploie les mots les moins recherchés, les moins affectés, mais il leur donne un sens précis, et toujours le même . En particulier, on trouve chez lui des séries, et principalement des couples de termes opposés ou corrélatifs, dont le sens est fixé précisément par ces oppositions ou corrélations. Ainsi, synthétique, sympathique, synergique, s'expliquent si l'on pense qu'ils ont tous trois le même préfixe et se rappor-tent respectivement à l'intelligence, au sentiment, et à l'activité. On rencontrera fréquemment les couples : temporel-spirituel, subjectif-objectif, absolu-relatif, égoïsme-altruisme, qui ne surprendront pas le lecteur. Dans d'autres cas, il sera bon d'être averti: le rapport de propriétés à substances, ou celui de phénomènes à êtres, correspond au rapport d'abstrait à concret ; spontané s'oppose à systématique, qu'il faut se garder de confondre avec synthétique, lequel s'oppose à analytique ; critique s'oppose à organique, qui n'est pas l'équivalent de positif, encore que l'état métaphysique puisse être dit négatif ou critique; la relation statique-dynamique est dans l'usage, mais il faut bien voir le sens précis que lui donne Comte, en sociologie en particulier, où elle correspond à la relation ordre-progrès; il faut savoir, enfin, que le terme de solidarité désigne les rapports sociaux entre contemporains, les rapports entre générations étant systématiquement caractérisés par celui de continuité.

Retour à l'auteur: Auguste Comte Dernière mise à jour de cette page le samedi 4 novembre 2006 8:17
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur au Cégep de Chicoutimi.
 



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